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Accueil Social, économie et politique Le vrai visage de Laurent Wauquiez

Le vrai visage de Laurent Wauquiez

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Il souhaite non seulement astreindre les allocataires du RSA à des travaux d'intérêt général mais, plus largement, plafonner le cumul des aides sociales «à 75% du Smic» pour marquer l'écart avec «celui qui travaille». Une véritable imposture.

A l'instar de son successeur Xavier Bertrand, ministre du Travail, de l'Emploi «et du Chômaaaaaaage !», le bon soldat Wauquiez avait l'air tout gentil, comme ça, avec son petit cheveu sur la langue. Mais, patatrac… hier soir, il a enfin tombé le masque.
Admirez son intervention sur BFM-TV face à un journaliste qui, pour paraphraser Frédéric Lordon, a posé «des questions acérées ayant à peu près le tranchant d'une asperge» (attention, sortez vos sacs à vomi !) :



De quoi nous faire commencer la semaine dans la joie et la bonne humeur, pas vrai ?

Les «classes moyennes» à nouveau convoitées

L'ex secrétaire d'Etat à l'Emploi — promu, malgré son piètre bilan, ministre des Affaires européennes —, catholique affiché et membre de l'UMP, est l'un des fondateurs de «la Droite sociale» (vous avez le droit de ricaner), un "cercle de réflexion" prétendant regrouper une cinquantaine de parlementaires qui, après avoir servi avec zèle les contribuables les plus aisés au détriment de l'intérêt général selon la "feuille de route" de Nicolas Sarkozy, affirment désormais leur volonté de «replacer les classes moyennes au cœur des politiques publiques».

La plaisanterie est savoureuse puisque, depuis quatre ans, le "Président du pouvoir d'achat" les roule dans la farine. Mais 2012 se profile à l'horizon et, dieu merci, les «classes moyennes» ont une mémoire de carassin... Afin de reconquérir cet électorat aussi large que disparate au bénéfice de son Maître, la recette — toujours la même — est simple : à l'encontre des principes chrétiens les plus élémentaires, des droits de l'homme et des conventions internationales, Laurent Wauquiez, porte parole/animateur de sa «Droite sociale», n'hésite pas stigmatiser les plus faibles et à liguer la "France d'en bas" contre celle qui est au fond du trou.

L'exemple du salarié aux 3x8 chez Michelin, «modeste» propriétaire dont la maison se situe en face de celle d'un homme «qui est au RSA», est d'une violence inouïe, digne du racolage lépéniste le plus crasse. Plus répugnant encore est l'usage que fait Laurent Wauquiez d'un détail faussement humanisant : ce travailleur naïf, attiré par les sirènes frontistes, l'a «pris par la main» afin de lui communiquer sa haine envers son voisin, un «assisté» de 32 ans qui mériterait, par conséquent, d'aller dormir à la rue ! Décidément, pour mener campagne, l'UMP hésite pas à sombrer dans l'ignoble.

«Le cancer de la société française»

Comme l'a expliqué Mathieu Magnaudeix sur Mediapart, le fantasme de la France, «pays d'assistés» est désormais vigoureusement agité en vue des élections. Et l'offensive, qui ne concerne plus quelques fainéants soupçonnés de fraude mais des familles entières, ne fait que commencer ! On se croirait au Royaume-Uni où le gouvernement libéral-conservateur de David Cameron, se plaignant d'un «chômage transgénérationnel» (alors que leur taux de chômage bat des records et que la récession les guette…) fait la chasse à la «culture anti-travail» et à la «culture de l'assistance» qui gangrèneraient la société britannique. S'attaquer aux victimes de leur modèle économique : quelle façon plus pitoyable de nier son échec !

«Aujourd'hui, un couple qui est au RSA, en cumulant les différents systèmes de minima sociaux (???), peut gagner plus qu'un couple dans lequel il y a une personne qui travaille au Smic, a déclaré Laurent Wauquiez. Ça, c'est la société française qui tourne à l'envers.» En effet, on marche sur la tête : quoi de plus aberrant qu'une société qui prône la "valeur travail" alors que celui-ci est non seulement rare, mais ne paie pas ! Aujourd'hui, ceux qui bossent ne s'en sortent plus, ceux qui retrouvent un emploi travaillent carrément à perte, tandis que ceux dont les employeurs ne veulent pas sont condamnés à la misère. Au lieu de dénoncer ce travail qui décourage car il ne paie plus en suggérant de revenir, par exemple, sur les 24 milliards d'euros d'allègements généraux dits "pour l'emploi" dont l'Etat se déleste chaque année et qui «encouragent» les entreprises à rémunérer leurs collaborateurs en dessous d’1,6 Smic — ceci expliquant que la France est championne du salaire minimum ou que la moitié de nos salariés gagne moins de 1.600 euros nets par mois… —, Laurent Wauquiez préfère incriminer notre système de protection sociale et, bien évidemment, ses bénéficiaires les plus fragilisés. Là est sa première imposture.

«Quelle est, pour moi, la principale injustice dans notre pays ? C'est que celui qui travaille n'ait pas un véritable écart avec celui qui bénéficie des minima sociaux.» Dénonçant «les dérives de l'assistanat» (plutôt que de pointer les dérives d'un gouvernement qui assiste outrageusement les entreprises sans contrepartie, ou bien celles d'un grand patronat qui se rémunère rubis sur ongle, se goinfre aux stock-options et aux retraites chapeaux), il estime que «cette situation-là est, pour moi, le cancer de la société française».

Voyez d'abord comment ce charlatan considère que la crise est finie, éludant le fait qu'en France il n'y a toujours pas assez d'emplois pour tout le monde et que 80% des offres du moment n'en sont que des miettes. Ensuite, voyez comment, au lieu d'admettre qu'il devient urgent que chacun puisse vivre dignement de son travail, Laurent Wauquiez a recours au nivelage par le bas afin maintenir le statu quo, proposant de «plafonner le cumul de tous les minima sociaux (???) à 75% du Smic, pas plus, pour s'assurer que, quels que soient les cas de figure, il y a une vraie différence entre celui qui travaille et celui qui est aux minima». Sauf que c'est du vent car actuellement, les plafonds d'accès à ces minima — qui ne sont ni cumulables, ni attribués individuellement mais en fonction des revenus du foyer fiscal — et aux aides sociales qui en découlent, calculés aux petits oignons, ne permettent à personne d'atteindre 75% du Smic ! Telle est sa seconde imposture.

La diversion est totale. Ainsi, pour désinciter les salariés à revendiquer de meilleurs revenus et combattre leurs véritables ennemis, il les enfume en leur proposant de maintenir les chômeurs et autres oisifs en dessous du seuil de pauvreté… alors qu'ils y sont déjà ! Ainsi compte-t-il promouvoir le «sens de l'équilibre au bénéfice des classes moyennes», qui n'y gagneront rien du tout. Ainsi fait-il en sorte de laisser le cancer de la précarité et de l'esclavagisme se propager dans le corps social.

Quand le travail gratuit et forcé devient un «service social»

«En contrepartie du RSA, il faut que chacun assume, chaque semaine, cinq heures de service social», insiste-t-il, évoquant la possibilité que les allocataires assument des tâches de surveillance des sorties d'école, de nettoyage ou d'accueil de services publics... Une proposition de loi sur le sujet devrait être déposée «dans les dix jours», a-t-il déclaré. La chose avait déjà été annoncée il y a trois semaines et nous l'avions copieusement commentée.

Quelle honte de transformer ces «travaux d'intérêt général» en «service social» ! Quelle hypocrisie ! Au moins Pierre Lang, député d'une droite 100% décomplexée, avait fait preuve d'un peu plus de franchise : les allocataires du RSA et autres chômeurs indemnisés depuis plus de six mois sont des délinquants, et leur oisiveté doit être punie. Quand bien même ne sont-ils pas responsables de leur situation. Quand bien même tout travail mérite salaire. Non : car dans les deux cas, le but de la manœuvre consiste à obliger des personnes à effectuer gratuitement des tâches qui relèvent de l'emploi public.

Laurent Wauquiez parle de «pompe aspirante» : en effet, prodiguant «de façon très généreuse, voire aveugle» des cadeaux aux plus riches, l'UMP a privé l'Etat de centaines de milliards d'euros de recettes fiscales, creusé ses déficits publics et sociaux, et les collectivités locales se sont également endettées. Donc, rien ne vaut une réserve de main d'œuvre gratuite pour continuer à faire fonctionner tout ça en préservant les nantis considérés comme "méritants", plus «assistés» que quiconque dans ce pays, et à qui l'on ne demandera aucun «petit effort» de solidarité. Pour obtenir l'adhésion de l'opinion à cette ignominie, le "diviser pour mieux régner" semble le plus approprié.

Et plus ça va, plus ça sent le brun

Elargissant le registre des boucs-émissaires, le maire du Puy-en-Velay juge anormal que notre système de protection sociale, «le plus généreux d'Europe» (ce qui est un peu exagéré), permette aussi aux étrangers, «très facilement, de bénéficier de nos différents outils de solidarité». Il se prononce pour «une durée minimum de travail» avant de pouvoir accéder aux «prestations d'assistance», évoquant une durée de référence de cinq ans. Pourtant, ce ne sont pas «les étrangers» qui «plombent notre protection sociale» mais bel et bien le chômage de masse, l'emploi précaire (dont il n'a cessé de faire la promotion) et les salaires trop bas qui participent au rabougrissement de la masse salariale. L'image du retraité maghrébin qui, à 65 ans, immigre en France pour bénéficier du minimum vieillesse relève du fantasme.

Obéissant, Laurent Wauquiez glane sur les terres du FN. C'était déjà la stratégie de Nicolas Sarkozy en 2007, et la campagne qui s'annonce en sera un pathétique copié-collé. Immigrés, chômeurs et RSAstes victimes de la crise : tous coupables, tant qu'il y aura des imbéciles pour le croire. Même si cette proposition de loi sera retoquée — car elle est non seulement inutile, mais contraire à la convention n°105 du 25 juin 1957 de l'OIT sur l'abolition du travail forcé dont la France est signataire —, elle remplit sa fonction idéologique.

SH

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Mis à jour ( Mardi, 10 Mai 2011 21:35 )  

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