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Les heures sup’ défiscalisées sur la sellette

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Un rapport parlementaire dresse un bilan sévère du dispositif, jugé inefficace et trop cher. Mazette, il était temps !

La loi Tepa (Travail, emploi et pouvoir d'achat), votée à l'été 2007 et mesure phare du quinquennat de Nicolas Sarkozy, est aujourd'hui une coquille vide. Seule tient encore la défiscalisation des heures supplémentaires, concrétisation du slogan de campagne "travailler plus pour gagner plus". Mais peut-être plus pour longtemps.

Un rapport parlementaire publié ce jeudi dresse en effet un bilan peu flatteur du dispositif, qui exonère de charges sociales les entreprises et les salariés sur les heures travaillées au-delà de la durée légale. Réalisé au nom du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques par deux députés issus de la majorité et de l'opposition, l'UMP Jean-Pierre Gorges et le socialiste Jean Mallot, ce rapport conclut à l'inefficacité et au coût trop élevé — 4,5 milliards d'euros en moyenne par an de manque à gagner pour les finances publiques — de ces incitations fiscales et sociales en faveur des heures supplémentaires. Au total, la mesure a coûté 0,23% du PIB et n'a rapporté que 0,15%.

Travailler plus pour gagner… 42 euros de plus par mois

Inefficace car "l’objectif visé, la valorisation du travail, n'a pas été atteint", explique le député d'Eure-et-Loir Jean-Pierre Gorges. Certes, le dispositif a permis de gratifier certains salariés. Ainsi, ce sont en moyenne 3,2 milliards d'euros par an qui sont reversés à quelque 9,4 millions d'entre eux grâce à l'exonération de cotisations sociales (l'heure est rémunérée au brut) et à l'exonération fiscale (la rémunération des heures supplémentaires est déductible de l'impôt sur le revenu). Le gain annuel moyen par salarié se monte environ à 500 euros par an, soit 42 euros par mois.

Ce dispositif ne bénéficie ni aux non salariés ni aux salariés à temps partiel, et dans sa globalité aux seuls salariés imposables. "C’est-à-dire qu’il exclut les personnes aux revenus les plus modestes", souligne le député de l'Allier Jean Mallot. Le profil type du bénéficiaire est un homme dans un emploi stable, à la rémunération médiane (1.600 euros par mois), travaillant plutôt dans la restauration ou la métallurgie, révèle le rapport.

1,3 milliard d'euros d'exonérations pour les entreprises

La défiscalisation des heures supplémentaires a surtout facilité les restructurations dans la fonction publique d'Etat — le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Elle a aussi eu un effet très positif pour les personnels de la Fonction publique hospitalière, particulièrement affectée par le passage aux 35 heures. Dans le secteur privé, en revanche, il a surtout conduit à "cristalliser" la durée du travail à 35 heures, employeurs comme salariés ayant un intérêt commun à déclarer des heures supplémentaires. En clair : les salariés qui travaillaient déjà avant la mesure 39 ou 40 heures et qui récupéraient le manque à gagner sous forme de RTT ou de primes salariales, ont institutionnalisé ces heures supplémentaires, et les ont déclarées. Mais "il n’y a pas eu d’heures supplémentaires supplémentaires", relève Jean-Pierre Gorges. Pour preuve, le volume relativement stable d'heures déclarées, même en période de crise et de ralentissement de l'activité : 730 millions en 2007, 727 millions en 2008, 677 en 2009 et 704 en 2010.

Un constat déjà pointé du doigt en 2010 par Pierre Cahuc et Stéphane Carcillo. Selon les deux économistes, si le nombre d'heures supplémentaires payées a certes progressé de 25% depuis 2007, la durée du travail, c'est à dire finalement le nombre d'heures travaillées, n'a pas bougé. Ils en concluent que la défiscalisation des heures supplémentaires est en réalité un outil d'optimisation fiscale pour les entreprises. Un avis que partagent les deux auteurs du rapport. Véritable aubaine, l'exonération de charges patronales sur les heures supplémentaires rapporte en moyenne 1,3 milliard d'euros par an aux entreprises. Or "l’heure supplémentaire est par principe l’heure où la marge de l’entreprise est maximale", explique Jean-Pierre Gorges, "car les coûts fixes de l’employeur sont déjà amortis sur les heures normales".

Alimenter les débats de la présidentielle

Les deux députés proposent donc de supprimer cet avantage pour les entreprises et de réaffecter le gain au subventionnement des premières embauches (des jeunes ou des chômeurs). Sur les autres préconisations, en revanche, les auteurs du rapport divergent. L'UMP Jean-Pierre Gorges est pour le maintien des avantages fiscaux et sociaux en faveur des salariés. Il demande à laisser une chance au dispositif de faire ses preuves en période de croissance. Le socialiste Jean Mallot souhaite, lui, une suppression pure et simple de cette mesure, et propose de réaffecter son coût au financement de 300.000 emplois jeunes.

Ce rapport a pour ambition d'être un outil de travail pour les parlementaires en vue des débats de l'automne sur le budget 2012. Il offrira de la matière aux députés et sénateurs qui voudront amender le projet de loi de finances présenté par le gouvernement. Il sera aussi, et surtout, l'objet de débats pour la présidentielle de 2012. Car à n'en pas douter, le pouvoir d'achat, le coût du travail et les 35 heures seront au cœur des affrontements entre la droite et la gauche pendant la campagne.

(Source : L'Expansion)


NDLR : Le rapport a soigneusement occulté le fait que, dans le contexte actuel, ce dispositif nuit gravement à l'emploi ! Car, par exemple, les 175 millions d'heures supplémentaires totalisées au cours du seul premier trimestre 2011 représentent l'équivalent de 382.000 postes à temps plein. Autrement dit, si on n'en avait effectué que la moitié et embauché des jeunes et des chômeurs, on aurait pu combler la moitié du retard pour revenir au niveau d'emploi d'avant crise...

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Mis à jour ( Jeudi, 10 Novembre 2011 12:05 )  

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