En 2004, une dizaine de personnes contribuèrent au lancement de l'association. Elles furent plusieurs centaines à s'investir parfois au quotidien ces 16 dernières années. L'aventure se poursuit aujourd'hui, soutenue par une équipe très impliquée dans la défense des droits des Chômeurs & Précaires, sur le terrain des revendications sociales, sur nos forums et dans les rubriques d'actualité du site. Parmi ces formidables bénévoles, quatre fondateurs :
Avant de devenir "chômeuse de longue durée", j'ai eu longtemps ma place sur le marché du travail : non-stop depuis 1980 dont 8 ans de guichet/caisse à la Société Générale (une erreur de jeunesse rectifiée par un DUT "Tech’ de Co" obtenu en 1991 : vive le congé individuel de formation !), puis 10 ans chez Warner Music, d'abord à la télévente, ensuite au marketing commercial (je signale qu'à l'époque j'avais moins de 30 ans, un CV très sommaire et qu'on m'a embauchée de suite. Ensuite, évoluer en interne restait ardu - plus encore pour une femme - mais à force de compétence, j'avais presque réussi).
"Privilégiée" et heureuse d'aller œuvrer pour une cause qui m'était chère - la musique -, j'ai donné le meilleur de moi-même et cru pouvoir enfin m'épanouir professionnellement... Acharnement, concessions, patience : on m'a gentiment licenciée en 2001 quand s'est amplifiée la fameuse crise du disque dont on parle beaucoup aujourd'hui, avec ses charrettes et sa très, très sale ambiance.
Afin d'approfondir mes connaissances en PAO, espérant me recycler à nouveau, j'ai investi dans une formation de maquettiste de presse au CFPJ. Mais les salaires réservés à une débutante "âgée" (39 ans !) dans ce nouveau métier étaient largement en dessous de mes frais fixes ! Bosser pour la gloire ? Toutes les rémunérations proposées autour de mes capacités étaient franchement misérables, inférieures à mon allocation chômage ou carrément au Smic. J'avais droit à 912 jours d'ARE : j'ai donc pris le temps de décrocher un emploi digne de ce nom. J'ai envoyé quelque 1.800 candidatures. En vain. Avec le recul, je considère que je me suis retrouvée piégée dans ce qu'on appelle pudiquement aujourd'hui le "retournement conjoncturel 2001-2003".
À fond la déprime, tout remettre à plat, puis peu à peu recommencer à lire, à m'informer, et enfin relever la tête : une vraie révolution qu'on ne fait pas quand on travaille. Entre deux, j'ai bien consacré mon énergie à une association de soirées rock. Mais j'ai vraiment retrouvé ma dignité dans la lutte avec les associations AC! puis l'APEIS et maintenant APNÉE/Actuchomage.
Merde in France, quel gâchis ! Me voici depuis le 1er janvier 2004 à 14 € par jour pour (sur)vivre, mais je préfère ça au Smic et à l'esclavagisme moderne. Car je refuse de brader ce que je suis au nom de leur sacro-sainte "économie". Pauvre je suis selon leurs critères, mais bien plus riche humainement...
Pilar SERRA
Pourquoi j’adhère à APNÉE-Actuchomage ? Sans aucun doute, parce que c’est une rencontre entre mon cheminement entrepris depuis de nombreuses années et un formidable projet collectif, dont je partage les objectifs et l’esprit.
Parce que, de 1992 à 1994, j’ai connu le chômage et ses effets, le manque de réseau, l’isolement, la perte de confiance en soi suite à des accumulations d’humiliants entretiens ratés, une forme de discrimination.
Parce que je connais des proches qui ont été ravagés par l’exclusion du chômage alors que ce sont des personnes de grande qualité que la société a mis au rencart en se privant de leurs richesses. Parce que, depuis, le traitement de la question sociale ne cesse de se dégrader et de régresser. Tout un vécu que j’ai retrouvé dans les témoignages des "actuchômistes".
Parce que j’ai été amenée à passer de l’autre côté - celui du recruteur - et à encadrer, et que j’y ai vécu des contradictions, que je me suis interrogée sur mes pratiques professionnelles, sur mon rôle dans ce système aliénant, à la fois d’accompagnatrice de la "modernisation" et à la fois… fusible.
Parce que j’ai connu une certaine souffrance au travail et que j’ai vu des collègues en devenir malade et en mourir. Parce que je ne supportais plus ces inégalités, les atteintes graves faites aux droits des citoyens, et parce que je souhaite militer pour un autre rapport au travail.
Parce que 2001 a été aussi pour moi l’année des ruptures. Une période de déconstruction et de reconstruction s’est ouverte à ce moment là. Et comme un Phoenix qui renait de ses cendres, le goût pour l’enthousiasme, la vitalité du groupe et du projet collectif a repris petit à petit ses droits. Convaincue que le champ du social est indissociable de celui de la démocratie et du politique, alors, mon rapport au travail a commencé à changer : fini les 70 heures par semaine !
J’ai décidé de m’engager plus ouvertement dans le tissu associatif auprès d’un foyer de jeunes travailleurs, puis dans une association d’éducation populaire.
Pour toutes ces raisons, en 2007, par une belle journée ensoleillée de février, lorsqu’un inconnu ignorant mon parcours a croisé ma route et m’a parlé d’APNÉE, je n’ai pu que lui sourire et rester muette tant ses paroles résonnaient comme un écho au plus profond de mes aspirations militantes.
Des personnes avaient décidé de se bouger collectivement et de s’organiser pour se faire entendre, pour faire entendre un autre discours… j’étais en phase avec cette façon de penser et de faire !
Un an s’est écoulé, j’ai renouvelé sans hésitation mon adhésion, dans tous les sens du terme. Mon enthousiasme est le même pour participer à cette belle aventure collective.
Frédéric FOUCAULT
Véritable brique fondatrice de l'association, ce bipolaire au chômage décide, en 2003, de passer en rébellion contre la société qui se renie, le privant des droits qu’il croyait avoir acquis en signant un PARE.
Il va voir AC! Agir ensemble contre le chômage à la Bourse du Travail, mais après quelques actions d’éclat, juge peu efficace la portée des coups assenés. L’idée lui vient alors de passer à l’échelon supérieur pour porter les idées, les indignations et les revendications des classes sacrifiées sur l’autel de la précarité et de l’exclusion sociale.
Il tient les premières réunions chez lui, à Paris dans le XVe. Les échanges s’établissent et des idées nouvelles germent, surgissent, s’améliorent : le train est sur les rails. Dès lors, dans des cafés, avec des volontaires de la première heure, on établit, on peaufine, on trouve le nom et échafaude les esquisses de l’association.
Plusieurs mois s’écoulent avec des défections naturelles, mais la pugnacité d’un petit noyau fait qu’APNÉE dépose ses statuts et que l’idée première d’un bras armé électronique voit le jour : le site Actuchomage. Vous connaissez la suite, lectrices et lecteurs assidus, membres bienfaiteurs, donateurs, adhérent(e)s, participant(e)s aux forums, trouvant enfin en un seul site des réponses à toutes vos questions.
Référencé en première ligne par le moteur de recherche Google, sa fréquentation n’ayant fait qu’empirer depuis lors (nous souhaitons tous voir ce site disparaître un jour, ce qui signifiera la fin du fléau social qu’est le non emploi), c’est sans nul doute à ce jour le site mondial en français traitant de ce sujet recevant autant de visiteurs.
Cette belle réussite collective nous la devons à vous tous, qui allez amplifier l’action entreprise, et à ceux qui, historiquement, dès potron-minet, ont eu la clairvoyance de favoriser par ce média l’expression du plus grand nombre contre l’injustice frappant les plus démunis d’entre nous.
Yves BARRAUD
Tout a commencé en septembre 2001. À l’époque, j’étais confortablement installé dans la vie professionnelle, généreusement rétribué pour un boulot qui ne me fatiguait pas trop, il faut le reconnaître. J’étais focalisé sur mon petit bonheur égoïste, pépère, presque bourgeois.
Et puis, deux avions se sont encastrés dans les tours du World Trade Center de NY et ma vie a basculé. En quelques semaines, le business de la communication (publicité, édition, médias…) s’est effondré aussi sûrement que les deux buildings new-yorkais, et je me suis retrouvé… au chômage.
Il a fallu tout réapprendre et, pour commencer, s’ouvrir aux autres pour éviter de se retrouver seul à gamberger, avant de sombrer.
J’ai pris alors la décision de m’engager. D’abord en faveur des «Recalculés», ces chômeurs spoliés de leurs droits qui ont porté plainte contre l'Assedic de Paris. C’est aux côtés d’AC! Agir ensemble contre le chômage que j’ai entamé mon parcours militant en octobre 2003. Si la bataille juridique engagée a porté ses fruits - la réintégration dans leurs droits de 800.000 Recalculés pour 2 milliards d'euros débloqués par l'État -, il m’est vite apparu nécessaire de poursuivre et d’amplifier mon engagement contre toutes les formes de précarité et d’exclusion sociale.
Avec une dizaine de camarades, nous avons créé l’association APNÉE (Alternatives Pour une Nouvelle Économie de l’Emploi), puis ce site où j’ai pu exprimer mes convictions et mettre à profit mon expertise professionnelle en matières de presse et de communication.
Depuis 2004, Actuchomage reste une référence dans les médias associatifs, une exception aussi sur les questions de chômage et de précarité, par sa fréquentation qui n'a jamais faibli et les combats dont il fut et est toujours le fer de lance.