En Belgique, le système d’indemnisation chômage est en principe illimité dans le temps. En 2004, la loi sur l’activation du comportement de recherche d’emploi (ACR) a durci les conditions du versement de l’allocation-chômage. Désormais, ils doivent faire la preuve de leur recherche d’emploi sur les douze derniers mois : participer aux mesures d’aide au reclassement proposées, se soumettre au contrôle régulier organisé par leur commune… Certains appellent ça «la chasse aux chômeurs», comme Yves Martens, porte-parole de la Plateforme contre le plan de chasse aux chômeurs, née en 2004, qui compte 25.000 adhérents.
Pourquoi avoir créé une plateforme de lutte contre la chasse aux chômeurs ?
Nous informons et accompagnons les chômeurs qui doivent se présenter à des entretiens dans le cadre de la loi d’activation du comportement de recherche d’emploi. Mais notre but essentiel, c’est son retrait pur et simple. On veut pouvoir aider les gens à passer entre les bombes mais le but ultime, c’est d’arrêter le bombardement. Les chômeurs doivent avoir de bonnes conditions d’indemnisation pour ne pas avoir à accepter un boulot à n’importe quel prix. Et ne pas exercer de pression à la baisse sur les conditions de travail des salariés. Les travailleurs solidaires avec les chômeurs se protègent d’abord eux-mêmes. Il faut qu’ils se rendent compte que si les chômeurs ont moins, ils auront moins aussi. La loi d’activation fait des chômeurs des proies pour le travail au noir et le travail précaire.
Comment se répartissent Flamands et Wallons dans votre plateforme ?
Le côté francophone est très bien représenté. Mais les Flamands ne sont quasi pas montés dans la barque.
Pourquoi ?
Le monde de l’emploi est très différent des deux côtés du pays. Le taux de chômage est de 22% à Bruxelles, de 18% en Wallonie et seulement de 6 à 7% en Flandre. Par ailleurs, la Flandre est acquise à la conception anglo-saxonne de l’Etat social actif, celle de Tony Blair, de Gerhard Schröder. Dans cette conception, l’Etat n’est pas réellement actif mais il met la responsabilité sur les personnes en situation de précarité, les chômeurs.
Selon vous, cette conception a donné lieu, en Belgique, à la loi d’activation…
A la chasse aux chômeurs. «L’activation du comportement de recherche d’emploi»… ce sont des mots terribles. Prenez le mot «emploi» : on sait qu’il n’y en a pas suffisamment pour tout le monde. Le mot «recherche» : la plupart des gens cherchent du travail mais quand ils voient les portes leur claquer au nez, ils se découragent. Avec ce système, le découragement n’est pas autorisé, on vous met une pression permanente, c’est le bâton de «l’activation». Prenez encore le mot «comportement», on voit bien tout son côté subjectif. Il ne suffit pas de chercher, il faut aussi avoir le bon comportement. De plus, ce système repose sur un contrôle administratif de preuves écrites, inefficace pour la recherche d’emploi.
Combien de chômeurs ont été exclus depuis 2004 ?
On est dans un processus progressif. Entre 2004 et 2006, 4.015 suspensions de quatre mois ont été prononcées et 1.047 exclusions définitives. Au premier semestre 2007, 2.485 suspensions de quatre mois ont été prononcées et 1.144 exclusions définitives. Ça s’emballe clairement, je peux vous dire que le deuxième semestre 2007 sera pire que le premier semestre [fin août, il y avait en Belgique 427.495 personnes bénéficiant d’une allocation chômage, 6.000 de moins qu’à fin juillet, ndlr].
Comment comparer le système belge par rapport aux autres systèmes en Europe ?
Il faut être honnête, notre système est moins «hard» qu’en Allemagne ou en Angleterre. Dans les pays scandinaves, le système est coercitif mais le taux d’indemnisation est de 90% du salaire de référence. Chez nous, le seuil de pauvreté pour un isolé est de 822 € et 84% des allocations de chômage sont en dessous de 850 €.
On dit pourtant que les allocations chômage sont «illimitées» en Belgique ?
En principe oui, mais le système favorise l’exclusion et si les allocations sont illimitées, elles sont très basses. Aujourd’hui, on est en train de sortir de ce système mais sans revaloriser les allocations.
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