En novembre 2004, Mme G. rédigeait une offre d’emploi pour son principal client – la société d’assurances niortaise François Bernard Assurances – sans, selon ses déclarations aux médias et au juge à l’audience, en avoir la compétence et le savoir faire. Un recrutement de première importance pour le PDG, qui cherchait un bras droit capable de prendre la tête de l’entreprise dans une dizaine d’années. Il l'était aussi pour la consultante, qui espérait trouver grâce aux yeux de son client et se faire embaucher à plein temps.
Elle fait publier son offre sur le site de l’APEC et d’Emailjob.com sous la responsabilité de son cabinet Perspectives RH. A l’Agence pour l’emploi des cadres, son texte est modifié et elle est informée dans la foulée que le critère d’âge (35-40 ans) est retiré. Sur Emailjob, l’annonce passe telle quelle le lendemain sans que la modification de l’APEC ne l’incite également à demander le retrait de la mention illégale.
«L’âge me semblait être un critère objectif pour un poste de transmission, s’est défendue Mme G. Mais je n’avais pas la volonté de discriminer. Si quelqu’un a pu se sentir discriminé, j’en suis désolée.» Spécialisée dans les bilans de compétences, la conseillère rédigeait sa première annonce. Elle a reconnu qu’elle méconnaissait la loi relative aux critères d’âges et avait commis une erreur.
Pour ma part, j’ai expliqué à la barre la démarche des 7 plaignants à l'échelon national pour faire cesser ces mentions illégales ainsi que, plus personnellement, m’être évité une réponse négative en ne postulant pas mais en poursuivant juridiquement l’infraction. J’ai souligné que la HALDE – Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations – n’ayant pas encore la possibilité de poursuivre directement, j’ai pris le risque d’un "suicide social", comme chacun des 7 plaignants, le respect de la loi comme objectif ne pouvant qu’aider le marché de l’emploi.
Maître Marret, me représentant, a dénoncé la volonté de «distinguer des personnes» par un critère d’âge et a estimé que la consultante n’a pas «pris conscience de la gravité de son acte pour les seniors et plus jeunes qui cherchent du travail». Elle a demandé 300 € de dommages & intérêt pour moi, «humilié par l’annonce et le comportement de Mme G.».
«Il y avait volonté de discriminer», a enchaîné Sonia Bellier, substitut du procureur, qui concède l’absence «d’intention malveillante». Anticipant sur les arguments de la défense, elle a estimé qu’il n’y avait pas de motif légitime à préférer une génération «dans le souci de trouver quelqu’un en vue d’une reprise».
«Elle a mentionné l’âge comme critère indicatif», a repris Maître Marianne Penot, du cabinet poitevin de Maître Gand, pour la défense de la mise en cause. «Elle a retenu les CV de 25 candidats dont deux seulement étaient dans cette tranche d’âge. Elle a examiné de façon complète et objective toutes les candidatures.»
Le candidat recruté avait 32 ans. «A 43 ans, monsieur de Rocher n’était pas plus éloigné de la fourchette. Sa candidature aurait pu être accueillie. Ma cliente n’est pas responsable de ses difficultés professionnelles.»
Maître Penot a aussi expliqué que la mention d’âge n’est «pas automatiquement discriminatoire : il n’y a pas de discrimination lorsque l’âge maximum est fondé sur la formation requise ou la période d’emploi avant la retraite. Le DG devait dans ce cas investir le poste de PDG après 10 ans de formation.» L’avocate a enfin rappelé la personnalité de sa cliente : elle-même victime de licenciement à 46 ans, elle a créé son propre cabinet, Perspective RH. «Elle connaît la difficulté d’emploi des seniors et a été membre d’une association de lutte contre les discriminations.»
Le jugement a été mis en délibéré. Il sera rendu le 20 septembre 2007.
Vincent de ROCHER
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