Voici un peuple qui a chassé la droite au pouvoir en assiégeant pacifiquement le palais présidentiel, puis une «gauche» libérale de remplacement, elle aussi évincée des «responsabilités» parce qu’elle entendait mener la même politique que la droite. Un peuple qui a imposé un référendum afin de déterminer s’il fallait «sauver» ou non les banques irresponsables qui ont plongé leur pays dans la crise, suivi d'une victoire à 93% imposant le non-renflouement des banques, leur nationalisation et, point d’orgue de ce processus par bien des aspects «révolutionnaire», l’élection d’une assemblée constituante le 27 novembre 2010, chargée d’écrire les nouvelles lois fondamentales qui traduiront dorénavant la colère populaire contre un capitalisme mortifère ainsi que les aspirations du peuple à une autre société.
Ici ou là, le tableau est idyllique :
• Quand l’Islande réinvente la démocratie
• Le syndrome du larbin et la révolution islandaise
• La révolution silencieuse de l’Islande : un précédent inquiétant pour nos élites politico-financières
Chez Rue89, on est plus nuancé... «S'il a choisi des solutions originales après l'effondrement de son économie, le pays n'est pas devenu un paradis anticapitaliste. [...] La population de cette île reste attachée à l'économie de marché [...], le gouvernement de Johanna Siguroardottir s'escrime à respecter les règles dictées par le FMI, [...] la population semble s'être résignée à avaler la potion amère. [...] On est donc loin du conte de fée qui circule sur le net. L'Islande ne vit pas une alternative réussie et harmonieuse au capitalisme mais une suite de tâtonnements confus, douloureux et résignés… en restant dans les rails du FMI», estime Pascal Riché.
Il n'empêche : à l'heure où l'Union européenne, totalement asservie aux marchés, se montre génétiquement antagonique avec le progrès social et travaille chaque jour davantage contre ses peuples, nous précipitant droit dans le mur, le cas de ce tout petit pays de 300.000 habitants un peu moins soumis que nous autres — et dont un volcan au nom imprononçable a paralysé notre trafic aérien en avril dernier, permettant à des milliers de riverains d'aéroports d'ouvrir enfin leurs fenêtres, sinon dormir tranquillement —, interpelle et inspire bienveillance.
SH
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