[...] Il est certain qu'en France, les syndicats ont beaucoup de difficultés à se faire entendre. On parle souvent de "pouvoir syndical" mais il existe en réalité un petit nombre de secteurs spécifiques, notamment le public, dans lesquels ce pouvoir est réel. Au fond, il a toujours été très réduit et les syndicats n'ont jamais eu de réel pouvoir de blocage. Ce qui leur donne du pouvoir, c'est cette capacité à créer un rapport de force en cherchant le soutien de l'opinion et en montrant qu'il sont en capacité de mobiliser. Comme tout contre-pouvoir, il se fait entendre par le moyen des minorités : la grève, les manifestations...
[...] Jusque dans les années 70, les organisations syndicales ont participé pleinement au changement. A partir des années 80, il y a eu un basculement, avec des réformes douloureuses socialement. Les syndicats se sont retrouvés sur la défensive et se sont vu reprocher leur conservatisme. Mais c'est aussi leur rôle, si les "réformes" sont contraires aux intérêts du salariat qu'ils sont censés défendre.
[...] Il y a quelques jours à Bruxelles, un plasticien tchèque caricaturait la France dans une œuvre en la couvrant d'un panneau "en grève". C'est une image juste ?
Non ! Il n'a pas lu les dernières statistiques : c'est faux. A vrai dire, cela n'a même jamais été vrai. La France ne fait pas davantage grève que ses voisins. Elle se situe en milieu de tableau et même plutôt dans la deuxième moitié des pays d'Europe occidentale. Elle est loin derrière l'Italie ou même le Canada ou l'Australie. Mais il est vrai que la France a une capacité à déclencher des conflits d'une ampleur que l'on ne voit pas ailleurs. Il y a ici une éruption sociale régulière, environ tous les dix ans, qui façonne cette image de pays gréviste.
Le conflit sous forme de grève a bien tendance à s'amenuiser mais pas le conflit lui-même. Des études montrent que le mécontentement et la conflictualité dans les entreprises sont de plus en plus forts et même l'encadrement est touché, sous pression. Les entreprises ont fait en sorte d'étouffer ce mécontentement mais il se manifeste différemment : par des pétitions, une multiplication des arrêts de travail, un recours aux prud'hommes plus fréquent… C'est finalement plus malsain qu'une grève qui permet de dire ouvertement son mécontentement et d'éviter ainsi le ressentiment.
=> LIRE TOUTE L'INTERVIEW sur LCI.fr
A (re)lire : La France, pays des grèves ?
Articles les plus récents :
- 04/02/2009 12:00 - Gandrange demande des comptes à Nicolas Sarkozy
- 03/02/2009 13:05 - 3,5 millions de mal-logés en France
- 03/02/2009 12:26 - Le retour des vieux pauvres
- 02/02/2009 21:57 - Convention Unedic : la CGC se dégonfle !
- 31/01/2009 01:01 - «La personne au RSA qui refusera deux fois un emploi, on coupe tout» !
Articles les plus anciens :
- 28/01/2009 11:27 - Mis à pied pour refus de travailler le dimanche
- 28/01/2009 10:43 - CMU : - 5% en un an
- 27/01/2009 10:56 - Crise : la décélération brutale des recettes sociales se confirme
- 26/01/2009 22:04 - LVMH aux Prud'hommes pour une histoire de fou
- 26/01/2009 19:03 - Plus de 50.000 suppressions de postes en une journée