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RSA et épargne disponible : Nous saisissons les Députés

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Suite à notre article dénonçant la taxation arbitraire de 3% des allocataires du RSA sur leur petite épargne, nous avons adressé aux Présidents des groupes de gauche le courrier suivant :

A l’attention de : M. Jean-Marc AYRAULT, Président du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche de l’Assemblée nationale,
M. Jean-Claude SANDRIER, Président du groupe gauche démocrate et républicaine de l’Assemblée nationale.

Objet : La taxation de 3% sur l’«épargne disponible» des allocataires du RSA

Paris, le 1er mars 2010.


Messieurs les Députés,

A l’heure où, par centaines de milliers, des victimes de la crise ayant épuisé leurs droits à l’assurance chômage sombrent dans les minima sociaux, l’association de chômeurs et précaires que nous sommes souhaite attirer votre attention sur l’injustice suivante : les bénéficiaires du Revenu de solidarité active doivent déclarer le montant de leur «épargne disponible» ; ensuite, 3% de ce montant - même modeste - est déduit de leur maigre allocation.

Ainsi, une personne qui a reçu une indemnité de licenciement et l'a mise sur son Livret A, une autre qui, se retrouvant dans la mouise, a bénéficié d'un don de sa famille et l'a placé sur un LEP, un senior qui avait prudemment contracté une assurance-vie avant de sombrer dans l'exclusion professionnelle ou un parent qui a ouvert un compte d'épargne destiné à son enfant mineur, sont désormais sanctionnés par l'amputation drastique de leur allocation mensuelle. Concrètement, sur un bas de laine de 10.000 €, la caisse d’allocations familiales déduit 3%, soit 300 €, soit 25 € par mois de leur RSA, lui-même déjà amputé du «forfait logement» que vous devez connaître.

Il s'agit, ni plus ni moins, d'une discrète taxation contribuant à un autofinancement du dispositif. Quoique marginal, le gain obtenu a des conséquences dramatiques pour ceux qui, étant déjà dans une situation de pauvreté et de précarité, en font les frais.

3% : une escroquerie !

En France, le Smic ne permet déjà pas de vivre : c'est pareil pour les minima sociaux. Ceux qui disposent d'un matelas de sécurité l'utilisent, dans le meilleur des cas, pour faire face aux impondérables en attendant que leur situation s’améliore ; dans le pire ils le grignotent en se versant un complément mensuel afin de subsister, une fois le loyer réglé...

Mais en France le RSAste, qui n'est plus un citoyen comme les autres, n'a pas le droit d'avoir quelques sous de côté : qu'il ait été prévoyant ou chanceux, au nom de l'égalité entre les pauvres, ses «capitaux» (car c'est considéré comme tel) doivent être uniformément taxés à hauteur de 3%… alors que les intérêts de la petite épargne sont loin d'atteindre ce taux !

Cette règle des 3% annuels figurait déjà dans l'article 7 du décret n°88-1111 du 12/12/1988 instaurant le RMI, puis a été reprise à l'identique dans les textes instaurant le RSA (voir article R132-1 du code de l'Action sociale et des familles). Du temps du RMI, pour des raisons techniques et juridiques, elle était peu appliquée : seuls les allocataires faisant l'objet d'un contrôle CAF spécifique étaient susceptibles d'y passer. A la faveur du RSA, les conditions d'application se sont durcies, la CAF ayant considérablement renforcé ses moyens de contrôle, notamment via l'interconnexion de fichiers avec le fisc qui lui permet désormais de fliquer chaque allocataire et de vérifier dans son dos le montant déclaré de son épargne.

Avec le RSA, la «règle des 3%» est désormais systématiquement mise en œuvre dans des conditions scandaleuses, car la CAF ne respecte pas la loi au sens strict, qui prend en compte l'épargne de la manière suivante (article R132-1 du code de l'Action sociale et des familles) :

• soit les capitaux sont productifs de revenus, auquel cas l'allocataire doit déclarer lesdits revenus (ou intérêts) dans sa déclaration trimestrielle de ressources (la DTR);
• soit les capitaux ne génèrent aucun revenu et la règle des 3% annuels s'applique : l'allocataire doit déclarer, à la rubrique "autre revenu" de sa déclaration trimestrielle, une ressource égale à 0,75% desdits capitaux.

Or la CAF, dans ses formulaires de DTR, ne fait absolument pas la distinction entre les capitaux productifs de revenus et les autres. Elle applique indifféremment la règle des 3% à toute l'épargne déclarée par l'allocataire, même celle qui produit beaucoup moins de 3% d'intérêts par an. Il y a là un abus de droit manifeste, voire un délit pénal de concussion.

Repenser la notion de «ressources»

La non prise en compte par la CAF de la distinction fixée par la loi entre «capitaux générateurs de revenus» et «capitaux non productifs de revenus» constituerait le meilleur angle d'attaque afin de remettre en cause les pratiques actuelles où celui qui dispose d'un petit pécule placé à la banque verra son RSA amputé alors que, selon le décret sur le «train de vie des RMIstes», le propriétaire d'un appartement à Paris, valant plusieurs centaines de milliers d'euros et utilisé à titre de résidence principale, ne subira aucune décote; même chose pour le propriétaire d'un véhicule haut de gamme d'une valeur neuve de 40.000 € !

En toute logique, pour le petit épargnant, seul le montant de ses intérêts doit être considéré comme «ressource». De plus, il n'y a aucune raison qu'il déclare à la CAF des intérêts qui ne sont pas imposés par le fisc, d'autant que l'interconnexion systématique des déclarations faites à la CAF avec les déclarations fiscales va clairement dans le sens d'un alignement de la notion de ressources sur celle de revenus imposables.

Il est urgent, Messieurs Ayrault et Sandrier, de repenser la notion extrêmement floue de «ressources» pour lui substituer celle de «revenus fiscaux» : ne seraient ainsi déduits du RSA que les sommes imposables perçues par l'allocataire. Ce qui exclurait d'emblée toute la petite épargne placée sur des comptes y compris défiscalisés.

Forfait logement : l'autre taxation

Le loyer est le poste qui pèse le plus lourd dans le budget des défavorisés. Imaginez l'enfer pour les minima sociaux qui, avec leur aumône de 460 € par mois, doivent choisir entre manger ou se retrouver à la rue.

En ce qui concerne les 95% de RSAstes qui ont la chance d'avoir encore un toit sur la tête et perçoivent de ce fait une aide au logement, on ampute mensuellement leur allocation d'un forfait qui s'élève, par exemple, à 55 € pour une personne seule (soit 660 € par an de revenu en moins : c'est toujours ça d'économisé pour la CAF !). En attendant, les Français instruits par les médias traditionnels sont persuadés que le RSA est à 455 € par mois alors que c'est un montant maximum qui ne concerne que 5% de ses bénéficiaires, les autres étant soumis depuis des lustres au fameux «forfait logement» - qui ramène leur allocation à 400 € - et, maintenant, à cette taxation sur l'épargne qui la rogne d'autant.


Avec le million de chômeurs qui arrivent en fin de droits cette année, dont une partie devra se contenter des minima sociaux, il serait bon que ce débat soit aussi l'occasion de remettre à plat les règles applicables au RSA qui restent aujourd'hui injustes, incohérentes et difficilement lisibles pour l'allocataire.

L’association de chômeurs et précaires que nous sommes vous demande d’intervenir.

Dans l’attente de votre avis qui nous serait précieux, par avance nous vous remercions et vous prions d’agréer l’expression de nos sentiments respectueux.

L'Association APNÉE - Alternatives Pour une Nouvelle Économie en faveur de l’Emploi


Post-scriptum : Cette lettre a également été adressée par e-mail à Jean-François COPÉ, président du groupe UMP, à François SAUVADET, président du groupe Nouveau Centre, ainsi qu'à Martin HIRSCH.


A ce jour, aucun député n'a encore répondu à nos courriers et les mails correspondants adressés avec avis de réception n'ont, visiblement, même pas été ouverts...




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