Pourquoi ? Sans s’étendre sur les conséquences de la mesure, François Fillon a annoncé, lors du deuxième plan de rigueur en novembre 2011, le gel du barème de l’impôt sur le revenu, et ce pour deux années consécutives (2012 et 2013). Une vraie rupture car, depuis quarante ans, la grille sur laquelle repose le calcul de l’impôt était révisée chaque année pour tenir compte de la hausse du coût de la vie : c’est ce qu’on appelle l’indexation sur le taux d’inflation. Or, il y a bien eu augmentation des prix l’an dernier (+2,5%) et, malgré cela, l’ajustement traditionnel n’aura pas eu lieu.
Douloureuse découverte… en septembre
Résultat : entre 100.000 et 200.000 foyers vont payer l’IR pour la première fois cette année. Par effet domino, nombre de contribuables pourraient aussi changer de tranche, et plus généralement ceux qui ont gagné plus en 2011 paieront plus en 2012. «Le gel du barème a un effet mécanique : cela conduit à une augmentation généralisée de l’impôt sur le revenu», décrypte Vincent Drezet, du Syndicat national unifié des impôts (SNUI). Selon ses simulations, les hausses s’étaleront de 1,17% pour un couple aisé sans enfants à… 12,57% pour un célibataire. «Un couple gagnant chacun le Smic sur treize mois verra son impôt sur le revenu grimper de 60 euros. Plus les revenus sont faibles, plus la hausse d'impôt est douloureuse».
Alors que nombre de Français ont jusqu’au 15 février pour payer leur premier tiers provisionnel, la hausse n’est pas encore visible. C’est à la rentrée, en recevant leur avis d’imposition, qu’ils feront cette découverte.
Le gouvernement s’attend à engranger 1,7 milliard d'€ dans les caisses de l’Etat. Et le double en 2013, soit 3,4 milliards. A titre de comparaison, le passage de la TVA de 5,5% à 7% ne devrait rapporter «que» 1,8 milliard en 2012. Le gel du barème de l’IR n’est donc pas une «mesurette».
Des effets en cascade
La désindexation du barème de l’impôt sur le revenu frappera quasiment tous les contribuables. Mais, proportionnellement, certains mettront plus la main à la poche que d’autres. Fiscaliste et directeur de la banque privée Legal & General, Michel Georges n’a aucun doute sur le sujet : «Tout le monde sera touché, mais les bas revenus devront faire plus d’efforts. On sait pertinemment que le poids de l’impôt sur le revenu est proportionnellement plus important pour les ménages modestes».
A première vue, les familles non imposables s’acquitteront de sommes relativement faibles. Voire nulles puisque le fisc ne réclame pas son dû lorsqu’il est inférieur à 61 €. Un argument que le gouvernement met en avant pour défendre l’idée selon laquelle cette mesure ne pénalise pas les plus fragiles. «C’est oublier un peu vite que ceux qui, jusqu’ici, avaient moins de 60 € d’impôt vont dépasser ce seuil et vont désormais verser leur obole», rétorque Christian Eckert, député PS et spécialiste des finances publiques.
Outre le fait de goûter pour la première fois aux joies de l’IR, ces foyers risquent ainsi de perdre les aides qui correspondaient à leur tranche : tarifs sociaux pour la cantine scolaire et les centres de loisirs, réduction sur les transports, coup de pouce pour le fioul… Les ménages non imposables bénéficient souvent d’aides versées par les communes, les départements ou les régions. «En devenant imposables ou en changeant de tranche, certaines familles risquent de perdre ces avantages», prévient Thierry Damien, président de l’association Familles rurales. Et d’ajouter : «Lorsque les parents viennent en septembre inscrire leurs enfants dans nos centres de loisirs, certains sont à 5 ou 10 € près. Comment feront-ils ?»
Les personnes modestes paieront plus d’impôts locaux
Les seniors pauvres ont droit à des ristournes sur leurs impôts locaux. Certains vont les perdre. Ainsi, selon l’analyse de la Commission des Finances du Sénat, des dégrèvements de taxe foncière et de taxe d’habitation sont accordés aux personnes de plus de 75 ans si leur revenu fiscal de référence ne dépasse pas 10.024 € par part de quotient familial.
Suivant l’évolution du barème de l’IR, ces plafonds ne seront pas révisés cette année et certains contribuables modestes et/ou âgés vont devoir payer davantage. L’opération est rentable pour l’Etat puisque c’est lui qui rembourse le manque à gagner pour les collectivités locales. Le gouvernement a ainsi prévu d’économiser 73 millions d'€ sur la taxe d’habitation dès 2012 et 9 millions sur la taxe foncière. Des chiffres qui doubleront en 2013.
Enfin, le barème de l’IR restant inchangé, celui de l’impôt sur la fortune (ISF) ne bougera pas non plus. Du coup, les riches paieront un peu plus d’ISF. Combien ? 44 millions d'€ au total en 2012 et 88 millions en 2013.
(Source : Le Parisien)
NDLR : Le nouveau gouvernement "socialiste" ne compte pas revenir sur ce gel qu'il avait pourtant dénoncé quand il était dans l'opposition... La mesure est donc maintenue en 2013 avec une décote pour les plus modestes (dont l'impôt brut ne dépasse pas 960 €) qui, en réalité, n'est qu'un jeu à somme nulle.
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