Des RIB, des attestations de Sécurité sociale, des arrêts maladie, des curriculum vitæ… Chaque jour, les salariés du service courrier du site Pôle Emploi de Courbevoie (Hauts-de-Seine) voient passer entre leurs mains plus de 10.000 enveloppes. Ils les ouvrent, datent chaque page et les trient en fonction de leur destination. Ils traitent le courrier de 64 agences de l’Ouest francilien. Auparavant, ces tâches étaient effectuées au sein de chaque site.
Ici, la quasi-totalité des personnes recrutées sont en contrat unique d’insertion-contrat d’accompagnement dans l’emploi (CUI-CAE), embauchées pour une durée de six mois. Ces contrats aidés ont pour objet de «faciliter l’insertion professionnelle des personnes sans emploi rencontrant des difficultés sociales et professionnelles d’accès à l’emploi». Dans ce but, ils prévoient 3 jours de formation obligatoires pour un contrat de six mois.
Salariés de plus de 40 ans
Pourtant, les salariés interrogés, qui ont tous plus de 40 ans, décrivent le même sentiment d’abandon. Une salariée qui a vu son contrat se terminer en décembre explique ainsi qu’on ne l’a pas aidée à chercher du travail. «Je n’ai pas eu de référent, pas de formation qui m’aide à trouver un travail derrière. Je me retrouve à nouveau au chômage.» Sur leurs contrats, les rubriques «aide à la définition de projet» et «formation dans le cadre du projet professionnel» n’ont pas été remplies [1].
Une salariée, qui cherche un emploi de secrétaire, explique ainsi : «Les entreprises ont besoin de personnes qui connaissent bien le logiciel Excel. J’ai demandé une journée de formation. Mais on me l’a refusée.» Elle et plusieurs de ses collègues ont en revanche suivi trois jours de formation à la rédaction de CV et de lettres de motivation. «Ce n’est pas utile ! J’ai déjà rédigé mon CV et ma lettre avec un conseiller», souffle-t-elle. [...]
Les syndicats réagissent
Le SNU-FSU a demandé à plusieurs reprises la requalification de ces contrats aidés en CDI, expliquant que les CDD ne peuvent pas être utilisés dans le cadre d’une activité «normale et permanente de l’entreprise» [2]. Mais ces demandes restent sans réponse. Le syndicat dénonce «une entorse au droit du travail sciemment organisée par la direction régionale de Pôle emploi Île-de-France». Laquelle, contactée par nos soins, n’a pas souhaité réagir.
Par ailleurs, Christophe Moreau, conseiller à l’agence d’Antony (92) et secrétaire départemental du SNU-FSU, explique que, dans son agence comme dans d’autres, «il reste toujours du travail administratif à effectuer, qui ne peut pas être externalisé. Dans certaines agences, les conseillers ont été priés de prendre une demi-journée par semaine pour effectuer des tâches administratives. Alors qu’ils manquent déjà de temps pour recevoir les demandeurs d’emploi.»
(Source : La Croix)
[1] Les contrats uniques d'insertion doivent être obligatoirement assortis d’«actions de formation» en lien avec «la réalisation du projet professionnel» des intéressés afin de favoriser leur réinsertion dans l'emploi. Mais dans plus de 60% des cas, l'engagement n'est même pas respecté. Or, ce manquement de l'employeur peut être dénoncé devant les Prud'hommes et lui coûter cher.
[2] Selon l'article L1242-1 du code du travail, «un contrat à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à une activité normale et permanente de l'entreprise». Les CUI sont aussi des CDD et relèvent de cet article.
En mai dernier, une ex CDD de Pôle Emploi à Marseille a saisi le tribunal des Prud'hommes en s'appuyant sur cet article. Elle travaillait sur une plateforme téléphonique, et ce sont en tout 7 de ses collègues, embauchés en CDD de 6 mois renouvelé une fois, qui poursuivent leur employeur, car le travail effectué sur ces plateformes correspond effectivement à une activité normale et permanente de l'organisme (puisque, jusqu'à preuve du contraire, Pôle Emploi n'a pas décidé de supprimer le 3949 ni à Marseille, ni ailleurs…).
Et pour finir, les CUI ne doivent pas servir à remplacer des salariés absents. Qu'on se le dise !
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