Suite de l'Acte 1 : «De la Valeur Travail à la Valeur Chômage»
Et de l'Acte 2 : «Chômage, Vertu refondatrice de la Société de demain»
Même pour celles et ceux qui s’y étaient préparés et ont vu dans son annonce un bien pour un mal, la gangrène du chômage est insidieuse. Si vous n’y prenez garde, elle vous pourrira la vie lentement mais sûrement, inéluctablement. Et même si vous vous sentez assez fort pour lui résister, d’autres se chargeront d’envenimer la plaie et de précipiter votre chute dans la précarité.
Cette mise en garde est, sans aucun doute, le premier précepte qu’il faut avoir en tête quand on aborde une période de chômage, notamment chez celles et ceux qui la connaissent à un âge charnière : la quarantaine ou la cinquantaine, et de plus en plus souvent à ces deux périodes de la vie. Il est évident que l’âge tient une place prépondérante dans la perception que l’on a de son chômage et, plus encore peut-être, le parcours de vie professionnelle, familiale, amicale… qui le précède.
À chaque individu son chômage dont l’appréciation varie en fonction de ses ressources, de son patrimoine, de sa situation familiale, de sa localisation géographique, de ses réseaux professionnels, de son entourage amical, de son métier et de ses savoir-faire, de son état de santé et de son âge. Il est donc illusoire d’espérer tirer des généralités d’une telle somme d’individualités, de parcours hétéroclites et d’aspirations diverses. En cela, le discours de certains hommes politiques qui ont fait du chômage et des chômeurs leur lit électoral, un outil de propagande idéologique, ne peut être que réducteur et, le plus souvent, caricatural.
Ce constat ne désigne pas nécessairement celles et ceux qui ont pour fâcheuse tendance de fustiger ou stigmatiser les chômeurs, même si c’est à eux qu’il s’adresse en priorité. Ce constat concerne aussi leurs opposants qui cherchent tout autant à mettre les chômeurs dans un même panier, celui des victimes d’un système économique infâme qui a fait du chômage une variable d’ajustement, au risque de mettre sur le carreau des millions d’individus.
Les cycles sociétaux sont si complexes que ni l’une ni l’autre de ces appréciations ne collent à la réalité. Et cette uniformisation des analyses, dans un sens comme dans l’autre, ne répond pas – et pour ainsi dire jamais – à la diversité des situations sur une période donnée. Le chômage reste avant tout une aventure ou une mésaventure personnelle que l’on mènera souvent seul avec soi-même. Un jour, on peut être plein d’allant, plein d’entrain et d’ardeur, et le lendemain à deux pas de l’abîme. Un jour, on peut se dire que l’avenir s’offre à nous et le lendemain plier sous le poids du doute. Un jour, on se sent acteur de son existence et le lendemain, victime en pénitence.
Le chômage n’est pas une ligne droite, un long fleuve tranquille régulé par les allocations mensuelles versées par Pôle Emploi. C’est une courbe sinusoïdale avec ses hauts et ses bas, ses apogées et ses périgées, ses enthousiasmes et ses doutes, ses instants d’effervescence et de solitude, ses moments d’intense liberté et d’esclavagisme mortifère aux contraintes d’un quotidien dénué de toutes satisfactions. En cela le chômage est une vraie épreuve à vivre et à surmonter. Une bataille que l’on gagne contre soi ou avec soi, que l’on perd contre soi et les autres. Un enchevêtrement de sentiments confus que l’on peine à démêler. Dès lors qu’on a perdu son job, l’esprit est plus vulnérable, plus sensible aux contradictions intérieures et aux contrariétés extérieures.
Mais intellectualiser le chômage n’a jamais fait avancer le schmilblick. Certains y ont passé des jours, des nuits, des semaines, des mois et des années. Pour quel résultat ? Il suffit de se lancer dans cet exercice, comme nous l’avons initier plus haut, pour s’apercevoir rapidement qu’on tourne en rond, qu’on se répète, que cette pseudo vérité qui nous sautait aux yeux un jour se défait le lendemain. Il n’y a pas de règles générales, pas de solutions toutes faites, pas de recettes miracles. La vérité est en chacun de nous. Cette évidence s’impose comme le second précepte que nous poserons ici.
Cependant, ces démonstrations que certains trouveront (non sans raison) pompeuses ou fumeuses sont nécessaires, indispensables, inévitables au cheminement qui nous unit à cet instant. Elles conduisent au cœur de notre sujet, à cette équation irréversible dont nous allons démonter un à un les paramètres. Nous la poserons sous sa formule contractée, donc forcément réductrice :
Altération de la Valeur Travail + Difficultés du Chômage = Obligation de faire de son inactivité professionnelle une période décomplexée et, de préférence, heureuse.
Cette équation édicte un postulat : le chômage recèle de vraies valeurs qui peuvent bonifier, «positiver» cette période plus ou moins longue et parfois renouvelée de notre existence. Ces dimensions du chômage sont aujourd’hui encore méconnues et marginales tant elles peuvent paraître subversives aux yeux d’un système qui se complaît dans la conformité, le déni de la différence et le refus des alternatives.
N’attendez donc pas de notre part la livraison de recettes miracles qui vous aideront à résoudre vos petits problèmes personnels, ces conseils éculés que vous recommandent la multitude d’ouvrages rédigés par de pseudos spécialistes de l’accompagnement professionnel et du retour à l’emploi. Nous n’en sommes pas.
Vous n’apprendrez pas ici à rédiger votre CV ou une lettre de motivation. Nous ne vous fournirons pas de stratagèmes imparables qui vous permettront de réussir vos entretiens d'embauche. Nous ne nous intéresserons pas au calcul de votre allocation chômage, pas plus qu’aux aides à la création d’entreprise auxquelles vous pourriez prétendre. Nous n’aborderons pas les tests psychologiques et autres études graphologiques bidons auxquels vous serez peut-être soumis lors de votre recherche d’emploi. Nous ne vous prodiguerons aucun conseil, aucune aide concrète, aucun accompagnement psychologique, aucun bons plans pour arrondir vos fins de mois. Tous ces aspects, nous les développons et traitons dans les forums d'Actuchomage auxquels nous nous intéresserons plus tard. Mais cet engagement opérationnel, quotidien, ne nous concerne pas ici.
Notre approche porte sur une perception plus globale, plus sociétale du chômage et de ses incidences. Nous avons même l’outrecuidance d’affirmer qu’elle se situe à l’avant-garde, que cette vision est l’avenir, qu’elle dessine la société de demain et qu’elle est déjà la solution aux problèmes d’aujourd’hui.
Jean Pransoin pour Actuchomage.org
PS : La suite à partir du 29 juillet.
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