Certains la choisissent "absolue" : moins de 1 ou 2 dollars par personne et par jour, par exemple, pour les pays en voie de développement (critère Banque mondiale). D'autres avancent une évaluation relative qui permet, dans certains pays développés, de déclarer pauvre tout ménage dont les revenus sont en dessous... du seuil de pauvreté.
On fixe celui-ci généralement à 60% du revenu médian du pays (le revenu qui partage la population en deux parties de même effectif) c'est-à-dire, en France en 2005 : 817 € pour une personne seule ou 1.716 € pour un couple avec deux enfants de moins de 14 ans. Bien sûr, tout cela est bien théorique. Et à cette mesure strictement monétaire, certains préfèrent une analyse qualitative des conditions de vie : le chauffage du logement, l'alimentation, l'habillement, les loisirs, l'endettement... voire l'inventaire du patrimoine.
IPSOS et le Secours Populaire se sont justement intéressés à la question du point de vue subjectif. Et qu'ont-ils trouvé ? Que près d'un Français sur trois déclare avoir connu une situation qu'il considère de pauvreté. Et que la moitié dit connaître quelqu'un dans cette situation actuellement. Evidemment, ce ne sont que des sentiments, et le seuil de pauvreté fixé au jugé par les sondés (1.016 € pour une personne seule, soit le Smic net mensuel) apparaît plus élevé que la norme statistique.
Chacun semble avoir intégré le niveau de vie global : ne pas pouvoir envoyer son enfant en vacances au moins une fois par an est considéré comme un critère de pauvreté (pour les trois quarts). Tout comme ne pas pouvoir accéder à des biens culturels ou de loisirs (pour 69%). Ou ne pas pouvoir payer seul son loyer (pour 85%).
Fragilité sociale
A gratter ce sondage publié en septembre, un autre "sentiment" vient frapper. Celui de ne plus pouvoir compter sur personne. Ou, pour être plus exact, d'exprimer un doute. Quatre Français sur dix disent ainsi qu'en cas de coup dur ils n'ont pas la certitude de pouvoir disposer d'une aide alimentaire et d'un endroit pour se loger, même sur une courte période. 16% en sont sûrs, 25% ne savent pas.
Cet aveu de fragilité sociale, dominant chez les plus âgés ou les moins diplômés, emboîte le pas aux dommages collatéraux du chômage, craint ou subi. On sait qu'être chômeur, c'est parler moins avec autrui (7,7 interlocuteurs par semaine contre 9,7 pour les actifs employés, source INSEE - 1997), exprimer plus fréquemment un sentiment de solitude ou d'ennui (INSEE - 2003), moins rencontrer ses amis ou sa famille (une fréquence 40% inférieure à celle d'un salarié ayant un emploi stable, source CREDOC 2003-2005), vivre moins souvent en couple (34% des chômeurs et des contrats précaires sont célibataires contre 18% des salariés en CDI, source CREDOC). Toute chose qui s'accentue avec la répétition des périodes d'inactivité.
Car l'isolement appelle l'isolement. Et les enquêtes du CREDOC (Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie), que ce soit il y a vingt-cinq ans ou maintenant, montrent que la demande d'aide à la famille et aux amis s'effrite sensiblement à mesure que l'individu traverse un nombre important de périodes de chômage : pour les chômeurs ayant connu plus de trois fois le chômage au cours des dix dernières années, s'ils devaient se retrouver sans ressources, 37% s'adresseraient d'abord à leurs proches tandis que 57% feraient d'abord appel aux institutions sociales (bureaux d'aide, mairie, assistance sociale).
D'où la nécessité, pour les pouvoirs publics, de lutter sur plusieurs fronts contre ce que le sociologue Robert Castel appelait la "désaffiliation sociale", concept plus large et plus "dynamique" que le seul concept de pauvreté.
(Source : Le Monde)
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