La question du pouvoir d'achat des prestations et des minima sociaux est cruciale en ce début d'année. Tous les ans, le gouvernement doit décider de leur revalorisation. Depuis 1984, elle correspond au montant de l'inflation. Début 2008, la revalorisation a été particulièrement peu généreuse : 1,6% pour le RMI ; 1,1% pour le minimum vieillesse et pour les retraites du régime général ; 1% pour les prestations familiales alors que l'inflation a été l'an dernier de 2,6% en glissement. En même temps, le gouvernement augmente de 3,4% le plafond de la Sécurité sociale, censé refléter la hausse moyenne des salaires. Peut-on justifier ce grand écart ?
En septembre 2007, le gouvernement prévoyait que la hausse des prix en moyenne annuelle serait de 1,3% en 2007. Comme la hausse des prestations de janvier 2007 incorporait une prévision de hausse des prix de 1,8%, le gouvernement a estimé qu'il y avait eu une hausse des prestations trop forte de 0,5%.
Avec une prévision d'inflation de 1,6% pour 2008, il a donc inscrit dans la loi de financement de la Sécurité sociale une hausse des prestations de 1,1% en janvier 2008. En décembre dernier, compte tenu de la poussée d'inflation en fin d'année, il est apparu que la hausse des prix était de 1,5% en moyenne annuelle en 2007 ; la prévision d'inflation pour 2008 est maintenant de l'ordre de 2,2%.
La hausse des prestations aurait donc dû être de 1,9% en janvier 2008.
Mais, malgré les protestations des associations et des syndicats, le gouvernement a maintenu la hausse de 1,1%. Les prestations auront donc un pouvoir d'achat plus bas de 1,5% en janvier 2008 relativement à leur niveau de janvier 2007. La stagnation du pouvoir d'achat des prestations est une politique de long terme en France. Durant les dix dernières années, la base mensuelle des allocations familiales (BMAF) a légèrement diminué en pouvoir d'achat, les gouvernements successifs ayant pris l'habitude de minorer quelque peu l'indexation. La faiblesse de la hausse accordée en 2008 fait qu'en dix ans, la BMAF aura subi une baisse de 1,9% en pouvoir d'achat. Durant ces dix ans, le pouvoir d'achat du salaire moyen aura, lui, augmenté de 14%.
En 2008, le pouvoir d'achat des prestations est nettement plus bas que son niveau maximum atteint en 1984 (- 4,6%). Le minimum vieillesse a connu une évolution un peu plus favorable : une hausse de pouvoir d'achat de 0,2% en dix ans ; de 3% en vingt-quatre ans. Enfin, le RMI a connu une légère hausse de pouvoir d'achat jusqu'en 2001, mais il a depuis légèrement diminué.
La stagnation du pouvoir d'achat des prestations signifie que celles-ci diminuent constamment par rapport au revenu médian des ménages et donc par rapport au seuil de pauvreté, fixé à 60% du revenu médian. Certes, cette baisse est utile pour réduire la croissance des prestations sociales et le déficit de la Sécurité sociale, mais est-elle socialement justifiée ? Les allocations familiales ont perdu 24,5% de leur valeur relative depuis 1984 et cette baisse continue. Les enfants coûtent-ils de moins en moins cher à élever ? Peut-on justifier que le niveau de vie des familles avec enfants baisse continuellement par rapport au niveau de vie des personnes sans enfant ?
Il faudrait augmenter les allocations familiales de 33% pour qu'elles retrouvent leur niveau relatif de 1984. Au moment de sa création, le RMI valait 34,9% du revenu médian. En 2007, il n'en valait plus que 30%, soit une baisse relative de 14%. En 1990, un "rmiste", qui a droit à l'allocation logement, était légèrement au-dessus du seuil de pauvreté. Il est maintenant nettement en dessous.
Enfin, le minimum vieillesse a subi une érosion similaire, passant de 52% du revenu médian en 1984 à 42,5% en 2007, soit une perte de 18% en niveau relatif. En 2007, compte tenu des allocations logement, un retraité au minimum vieillesse touchait environ 61,6% du revenu médian ; soit légèrement au-dessus du seuil de pauvreté. Si le pouvoir d'achat du minimum vieillesse n'est pas augmenté, il passera en dessous du seuil de pauvreté en 2009.
Cette forte augmentation du nombre de personnes âgées pauvres n'est guère compatible avec l'objectif proclamé de Martin Hirsch de faire baisser d'un tiers le taux de pauvreté en France. Rien ne justifie la baisse tendancielle du niveau de vie des familles et des plus pauvres. L'indexation des prestations familiales, du minimum vieillesse et du RMI sur le revenu médian devrait être une des priorités de la politique sociale.
(Source : La Tribune)
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