La présidente du Medef, Laurence Parisot, risque de frémir à la lecture du rapport de la mission commune des députés (commissions des Finances et des Affaires sociales) présenté hier sur les exonérations de cotisations sociales. Après avoir dénoncé l'envolée du coût des niches fiscales (73 milliards d’€ en 2007), les parlementaires de tous bords veulent raboter les quelque 50 milliards d'euros d'allègements sociaux éparpillés dans 72 dispositifs dont ils remettent en cause le coût et l'efficacité. L'auteur du rapport, Yves Bur (UMP), également rapporteur du budget de la Sécurité sociale, donne au gouvernement une «boîte à outils» pour boucler les textes financiers de l'automne.
Les allègements généraux de charges, notamment pour les bas salaires, et les «exonérations ciblées» de cotisations dans un secteur donné, ont représenté au total 28,7 milliards d'euros de manque à gagner pour la Sécurité sociale en 2007, rappelle le rapport. Les 23 milliards d'euros d'allègements généraux de charges dont bénéficient les entreprises entre 1 et 1,6 Smic sont tout d'abord dans le collimateur. Pas question de les supprimer brutalement (800.000 emplois sont concernés), mais une «extinction progressive» est évoquée. A court terme, plusieurs pistes sont avancées : abaisser le seuil de sortie à 1,4 Smic (6 milliards d'économies), réserver les allègements aux 500 ou 1.000 premiers emplois (3,2 à 4 milliards), ne plus indexer le barème sur le Smic, etc...
Le rapport juge «particulièrement intéressante» et «moralisatrice» l'idée d'annualiser le calcul des allègements (aujourd'hui mensualisé) pour mettre fin aux pratiques d'optimisation consistant à octroyer des 13e voire des 14e mois généreux plutôt que de relever les salaires. Le gain lié à cette annualisation dépasserait 2 milliards. Le gouvernement, s'il n'a rien décidé, est tenté de rogner sur ces allègements pour deux raisons : une vraie liberté va être donnée aux entreprises de s'exonérer des contraintes liées aux 35 heures, et les exonérations sur les heures supplémentaires (près de 4 milliards) ont très fortement accrues les subventions.
Deuxième volet clef : les «niches sociales», constituées de l'ensemble des rémunérations ou avantages extra-salariaux qui, ne donnant pas de droits à prestations, sont exclus de l'assiette des prélèvements (hormis la CSG). Soit 41 milliards d'euros, non pas de manque à gagner mais d'assiette non taxée. La mission, qui juge «ce régime trop favorable en l'état actuel des comptes sociaux», prône l'instauration d'une «contribution de solidarité» de 5% sur l'épargne salariale (intéressement, participation, abondement au PERCO) avec une franchise de 200 € par bénéficiaire, et la création d'une contribution également de 5%, mais sans franchise, sur les autres niches : chèques restaurant, CESU, indemnités de licenciement, parachutes dorés, etc... Cette «flat tax» (large assiette, faible taux) est depuis longtemps dans les cartons de Bercy. L'an dernier, le gouvernement s'est contenté d'accepter la taxation des stock-options défendue par… Yves Bur. Le sujet «niches» sera de nouveau d'actualité cet automne. A tout le moins, les parachutes dorés, stigmatisés récemment par l'UMP, pourraient être concernés.
Le rapport recommande enfin le «réexamen systématique» des exonérations «ciblées» (DOM, restauration, zones urbaines sensibles, zones de revitalisation rurale, etc). Leurs effets sur l'emploi sont jugés «limités, sinon existants». Le coût par emploi créé ou maintenu atteindrait 38.000 € dans les DOM et dans l'hôtellerie-restauration, ce secteur bénéficiant à lui seul «de 18 mesures d'exonérations (1,95 milliard) ainsi que d'aides budgétaires directes (800 millions)».
Gérard Bapt (PS), président de la mission, approuve l'essentiel de ces préconisations, même s'il s'oppose à la taxation de certains avantages accordés aux salariés (Ticket Restaurant notamment) et préconise, à l'inverse, une forte contribution sur les parachutes dorés et les actions gratuites. Surtout, le député socialiste souligne que «le gouvernement mène une politique opposée aux principes et aux conclusions de la mission en élargissant le champ des exonérations aujourd'hui aux heures supplémentaires et demain à l'intéressement. Il est placé devant ses contradictions».
(Source : Les Echos)
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