Le collectif Alerte, qui réunit 37 associations d'aide aux plus démunis dont Emmaüs, la Fondation Abbé Pierre, les Restaurants du Cœur ou encore ATD-Quart Monde, estime que, «face à la montée de l'inflation, face à l'augmentation des prix des denrées de base et du carburant», la revalorisation du Smic et des indemnités de chômage «n'est que justice». Mais le collectif s'indigne de l'oubli qui est fait au «3,5 millions de personnes qui n'ont que les minima sociaux pour vivre» en dessous du seuil de pauvreté alors que la flambée des denrées alimentaires les touche de plein fouet.
En dehors de la misérable revalorisation annuelle de 1,6% qui leur a été accordée au 1er janvier 2008, aucun rattrapage «n'a été annoncé pour ces derniers, notamment le RMI qui servira de base au RSA, l'API (allocation de parent isolé) et l'ASS (allocation spécifique de solidarité), hormis la revalorisation de l'AAH (allocation adulte handicapé) et du minimum vieillesse de 5%», soulignent les présidents des associations du collectif Alerte, qui demandent donc au gouvernement «une revalorisation immédiate des minima sociaux, d'un montant au moins égal à celle du Smic» dans un communiqué officiel.
Mais on sait bien que «les caisses sont vides» et qu'en cette veille de grandes vacances, la seule réaction d'un gouvernement convaincu que les plus pauvres sont responsables de leur situation sera de faire la sourde oreille. Même si des économistes réputés comme Jean Gadrey ou Henri Sterdyniak dénoncent le non-sens de cette politique : lire en commentaires…
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Commentaires
La question du pouvoir d'achat des prestations et des minima sociaux est cruciale en ce début d'année. Tous les ans, le gouvernement doit décider de leur revalorisation. Depuis 1984, elle correspond au montant de l'inflation. Début 2008, la revalorisation a été particulièremen t peu généreuse : 1,6% pour le RMI ; 1,1% pour le minimum vieillesse et pour les retraites du régime général ; 1% pour les prestations familiales alors que l'inflation a été l'an dernier de 2,6% en glissement. En même temps, le gouvernement augmente de 3,4% le plafond de la Sécurité sociale, censé refléter la hausse moyenne des salaires. Peut-on justifier ce grand écart ?
En septembre 2007, le gouvernement prévoyait que la hausse des prix en moyenne annuelle serait de 1,3% en 2007. Comme la hausse des prestations de janvier 2007 incorporait une prévision de hausse des prix de 1,8%, le gouvernement a estimé qu'il y avait eu une hausse des prestations trop forte de 0,5%.
Avec une prévision d'inflation de 1,6% pour 2008, il a donc inscrit dans la loi de financement de la Sécurité sociale une hausse des prestations de 1,1% en janvier 2008. En décembre dernier, compte tenu de la poussée d'inflation en fin d'année, il est apparu que la hausse des prix était de 1,5% en moyenne annuelle en 2007 ; la prévision d'inflation pour 2008 est maintenant de l'ordre de 2,2%.
La hausse des prestations aurait donc dû être de 1,9% en janvier 2008.
Mais, malgré les protestations des associations et des syndicats, le gouvernement a maintenu la hausse de 1,1%. Les prestations auront donc un pouvoir d'achat plus bas de 1,5% en janvier 2008 relativement à leur niveau de janvier 2007. La stagnation du pouvoir d'achat des prestations est une politique de long terme en France. Durant les dix dernières années, la base mensuelle des allocations familiales (BMAF) a légèrement diminué en pouvoir d'achat, les gouvernements successifs ayant pris l'habitude de minorer quelque peu l'indexation. La faiblesse de la hausse accordée en 2008 fait qu'en dix ans, la BMAF aura subi une baisse de 1,9% en pouvoir d'achat. Durant ces dix ans, le pouvoir d'achat du salaire moyen aura, lui, augmenté de 14%.
En 2008, le pouvoir d'achat des prestations est nettement plus bas que son niveau maximum atteint en 1984 (- 4,6%). Le minimum vieillesse a connu une évolution un peu plus favorable : une hausse de pouvoir d'achat de 0,2% en dix ans ; de 3% en vingt-quatre ans. Enfin, le RMI a connu une légère hausse de pouvoir d'achat jusqu'en 2001, mais il a depuis légèrement diminué.
La stagnation du pouvoir d'achat des prestations signifie que celles-ci diminuent constamment par rapport au revenu médian des ménages et donc par rapport au seuil de pauvreté, fixé à 60% du revenu médian. Certes, cette baisse est utile pour réduire la croissance des prestations sociales et le déficit de la Sécurité sociale, mais est-elle socialement justifiée ? Les allocations familiales ont perdu 24,5% de leur valeur relative depuis 1984 et cette baisse continue. Les enfants coûtent-ils de moins en moins cher à élever ? Peut-on justifier que le niveau de vie des familles avec enfants baisse continuellement par rapport au niveau de vie des personnes sans enfant ?
Il faudrait augmenter les allocations familiales de 33% pour qu'elles retrouvent leur niveau relatif de 1984. Au moment de sa création, le RMI valait 34,9% du revenu médian. En 2007, il n'en valait plus que 30%, soit une baisse relative de 14%. En 1990, un "rmiste", qui a droit à l'allocation logement, était légèrement au-dessus du seuil de pauvreté. Il est maintenant nettement en dessous.
Enfin, le minimum vieillesse a subi une érosion similaire, passant de 52% du revenu médian en 1984 à 42,5% en 2007, soit une perte de 18% en niveau relatif. En 2007, compte tenu des allocations logement, un retraité au minimum vieillesse touchait environ 61,6% du revenu médian ; soit légèrement au-dessus du seuil de pauvreté. Si le pouvoir d'achat du minimum vieillesse n'est pas augmenté, il passera en dessous du seuil de pauvreté en 2009.
Cette forte augmentation du nombre de personnes âgées pauvres n'est guère compatible avec l'objectif proclamé de Martin Hirsch de faire baisser d'un tiers le taux de pauvreté en France. Rien ne justifie la baisse tendancielle du niveau de vie des familles et des plus pauvres. L'indexation des prestations familiales, du minimum vieillesse et du RMI sur le revenu médian devrait être une des priorités de la politique sociale.
(Source : La Tribune) Répondre | Répondre avec citation |
Il était temps que la question des salaires revienne en force sur le devant de la scène, avec le retour d'une certaine croissance et dans une période de progression des profits. Il serait bon que la pauvreté, celle que les minima sociaux permettent d'atténuer, ne soit pas la grande oubliée des choix à venir. Or on peut le craindre, compte tenu du freinage délibéré des recettes publiques et des budgets sociaux.
Un cas exemplaire est celui du RMI. On vient d'apprendre que le nombre de ses bénéficiaires a bondi de 9% en 2004, après une progression forte en 2003 (5,3%). Ce que l'on sait moins, c'est que le pouvoir d'achat des RMIstes n'a cessé de décrocher, depuis 1990, par rapport à la richesse économique par habitant et au niveau de vie moyen. Et même par rapport au seuil de pauvreté.
Entre 1990 et 2004, le produit intérieur brut par personne a progressé de 20,1% contre seulement 4,6% pour le pouvoir d'achat du RMI - une divergence spectaculaire. En 1990, le niveau de vie moyen en France représentait environ 3,8 fois celui d'un RMIste. En 2002, ce rapport était passé à 4,2 ; et il a encore progressé depuis cette date.
Le RMI a décroché aussi par rapport au seuil de pauvreté, défini comme la moitié de la"médiane"des revenus. En 1990, le montant du RMI pour une personne seule représentait 70% du seuil de pauvreté. En 2001, il n'en valait plus que 66%. Il est certain que les années 2002 à 2004, pour lesquelles on ne dispose pas encore de données, vont encore creuser l'écart.
Dernier chiffre : en 1990, le RMI mensuel équivalait à 67 Smics horaires brut. En 2004, ce chiffre n'est plus que de 50. Comparé au Smic, le RMI a perdu 25% de sa valeur !
Les salariés et les retraités ont pour eux des organisations syndicales disposant de pouvoirs reconnus de grève et de négociation, et qui les défendent lorsque le patronat et le gouvernement refusent de "partager les fruits de la croissance". Les plus pauvres, eux, n'ont rien de tout cela, en dehors de réseaux associatifs qui s'efforcent, avec des moyens limités, de faire connaître leur situation et leurs exigences de dignité.
Les revalorisations annuelles des minima sociaux sont décidées par des gouvernements qui, au cours de cette période, ont été obsédés, d'une part, par la baisse des prélèvements obligatoires et, d'autre part, par la crainte non fondée que le RMI n'incite les pauvres à la paresse (la "désincitation" au travail). La dégradation continue du pouvoir d'achat du RMI s'est produite sur un fond idéologique de culpabilisation des pauvres, qu'il fallait remettre au travail en leur montrant que celui-ci "paie". Cela devait réduire le chômage. Or, en contradiction complète avec ce raisonnement, le chômage a progressé alors que l'écart s'est nettement creusé entre RMI et bas salaires.
Enfin, puisqu'il est beaucoup question de relancer la consommation des ménages (le "moral des ménages") au nom de la croissance et de l'emploi, rappelons une évidence : contrairement aux 10% des ménages les plus riches qui épargnent 40% de leur revenu, les pauvres le dépensent en totalité. Ils sont les meilleurs acteurs d'une relance de la consommation !
La "cohésion sociale" est partout invoquée. Un ministère lui est même consacré. Sa première priorité ne devrait-elle pas consister à éviter que le pouvoir d'achat des plus pauvres ne décroche par rapport au niveau de vie moyen ? Augmenter fortement les minima sociaux, c'est bon pour l'emploi, c'est une exigence morale et c'est, aujourd'hui, une urgence sociale. Répondre | Répondre avec citation |