Alors que, conformément à l'article 11 du préambule de la Constitution, l'article 1er de la loi n°88-1088 du 01/12/88 instituant le RMI stipule que «toute personne qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental ou de la situation de l'économie et de l'emploi, se trouve dans l'incapacité de travailler, a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence», la loi n°2003-1200 du 18/12/2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion érafle ce principe en décrétant que le président du Conseil Général peut suspendre le RMI d'office : à charge pour le «bénéficiaire» de prouver qu'il y a droit.
Pour ce faire, l’«accusé» dispose de multiples recours. Tous susceptibles de longs délais en temps normal et a fortiori si l’accusation/administration y met de la mauvaise volonté.
Mais, en attendant, il faut survivre...
Un harcèlement en bonne et due forme
C'est ce qui arrive à notre ami Jean-Marc, président de l'APCD (Action des Précaires et Chômeurs de Dordogne), une structure qui accueille et défend les privés d'emploi du Périgord, avec la bénédiction du Conseil général qui la subventionne. Allocataire du RMI, Jean-Marc y endossait le rôle d'un travailleur social : une économie non négligeable pour la collectivité, qui s'appuie de plus en plus sur le tissu associatif et le bénévolat pour palier au désengagement de l'Etat.
Sauf qu'au printemps, le vent s'est mis à tourner. Jean-Marc a d'abord subi en mars un contrôle inopiné de la CAF. Puis, en mai, le site de l'APCD a été fermé par son hébergeur, le Conseil général de la Dordogne lui-même, à cause d'un lien qui menait sur un autre site où des commentaires d'article ont déplu... Ensuite, au mois de juin, l'association a du quitter son local qui était, lui aussi, fourni par le Conseil général de la Dordogne.
Cerise sur le gâteau : le 7 août, Jean-Marc a reçu une lettre recommandée avec accusé de réception lui signifiant la décision de suspendre son RMI dans les deux mois => LIRE ICI…
Jean-Marc devra donc se justifier devant une Commission locale d'insertion (CLI). Si son verdict, accepté par le président du Conseil général, est défavorable, Jean-Marc devra saisir le préfet et engager une longue procédure auprès de la Commission départementale d'Aide Sociale, avec le ventre vide et la terrible perspective de se retrouver à la rue. Ainsi le compétent Jean-Marc, qui a si bien aidé ses semblables en tant que travailleur social déguisé, ira rejoindre le bataillon des SDF : un bataillon qui coûte, finalement, tout aussi cher à la collectivité (sauf s'il se réfugie chez Emmaüs…) !
A ceux qui croient que le RMI est attribué trop facilement et que ceux qui en vivent sont des profiteurs, voici une affaire qui prouve le contraire. A l'instar du Conseil général de la Dordogne et des organismes caritatifs, ceux qui profitent du chômage et de la misère ne sont pas ceux que l'on croit. Laminer la solidarité et rétablir la docilité parmi les pauvres sont bel et bien l’objectif du moment en France.
A lire et visionner sur Rue89 : «Le RMIste, le travailleur social et sa calculatrice»
Dans le département des Bouches-du-Rhône, où le nombre de bénéficiaires des minimas sociaux reste considérablement élevé, pour réduire le nombre de RMIstes, des contrôles très stricts sont exercés conjointement par la CAF et le Conseil général. Ainsi, 15.000 allocataires ont été radiés depuis 2004 sans que personne ne s'inquiète de savoir ce qu'ils sont devenus...
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