Mais si, vous savez bien, c’est l’acronyme british-chic qu’on prononce bêtement à la française, le fameux return on investment. Autant vous y habituer car cet indicateur de rentabilité est devenu l’unité de mesure préférée des DRH, le sésame du frémissement des embauches. Ce n’est rien moins qu’un ratio financier qui chiffre les pépètes gagnées par rapport au magot investi. Les pépètes, c’est l’argent que vous rapportez à l’entreprise et le magot, votre salaire.
D’aucuns soutiendront qu’ils n’ont pas une gueule de ratio financier. La nature, nous-mêmes, et tous les esprits libres leur donneront raison. Las, le ROI est roi. Cadre ou pas, ingénieur ou non, commercial ou rien, tu n’auras plus le temps de te couler dans le moule. Ton embauche coûte tant. Tu dois en rapporter 3 fois, 5 fois, 10 fois plus, et pas plus tard qu’immédiatement. C’est la crise, on vous dit. On navigue à vue. Alors on n’a ni le temps ni l’argent pour former de braves gens ou attendre qu’ils soient rentables.
C’est que, ces temps-ci, la corporation des recruteurs et ceux qui les paient pour recruter veulent de l’opérationnel illico. De la qualité de son ROI dépend donc la capacité de chaque chercheur d’emploi à décrocher un job. Et tous ne sont pas égaux devant le souverain.
À commencer pas les jeunes, les 600.000 qui vont débouler sur le marché dans les semaines qui viennent. Diplômés de grandes ou de petites écoles, ils vont se heurter au mur de la citadelle du premier job. Et devant les difficultés qui les attendent, on comprend l’embarras de Martin Hirsch (Haut commissaire à la Jeunesse) et de Laurent Wauquiez (secrétaire d’Etat à l’Emploi).
Le premier est ressorti atterré d’une réunion au Syntec Informatique au cours de laquelle les dirigeants du syndicat lui ont expliqué que, cette année, leurs adhérents n’embaucheraient pas un seul jeune dip’. Alors que ce secteur en recrutait 8.000 à chaque rentrée. Le secrétaire d’Etat, quant à lui, exhorte chaque jour Pôle emploi de s’activer pour éponger les dossiers en suspens dans le but d’accueillir les centaines de milliers de nouveaux qui vont s’ouvrir très vite, faute de ROI assez rapide.
Une fatalité qui ne touche pas seulement les jeunes, mais aussi tous ceux qui souhaitent se réorienter. Le temps n’est plus à la découverte d’un nouveau métier ou d’une nouvelle branche d’activité. Il faut connaître son job sur le bout des doigts et l’avoir pratiqué depuis des lustres.
Alors, si les jeunes diplômés de l’année risquent d’être sacrifiés, on se dit que les seniors au moins vont s’en tirer. Après tout, ils ont un ROI digne du roi Usein Bolt et de son 100 mètres berlinois. Et puis les entreprises savent que, faute d’avoir pris des mesures pour l’embauche de seniors avant le 1er janvier prochain, elles risquent désormais une amende. L’avenir dira si les quinquas seront, encore une fois, sacrifiés ou pas dans l’allée du ROI.
Sylvia Di Pasquale pour Cadremploi
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