La loi NOME (nouvelle organisation du marché de l'électricité), adoptée cette nuit par le Parlement, aura des conséquences très importantes sur le fonctionnement de notre pays, autant en termes d'aménagement du territoire, de développement futur de notre outil industriel, qu'en termes d'égalité d'accès à l'électricité.
La CGT a toujours condamné les motivations qui poussent à mettre en place, à tout prix, la concurrence sur tous les marchés et les services. La question a fait naître de nombreux débats, comme celui qui a conduit au rejet du traité européen en 2005 et la réalité n'a malheureusement pas contredit — loin s'en faut — ce qui était annoncé à l'époque par celles et ceux qui refusaient de brader l'accès aux droits fondamentaux des citoyens, au profit des marchés et des spéculateurs.
La loi NOME vient perturber un dispositif déjà très dégradé par les précédentes lois. Elle casse les tarifs (vert et jaune) destinés aux entreprises, au motif — énoncé par la Commission européenne — que cela représenterait un avantage concurrentiel accordé par l'Etat français à ces dernières. L'«accès régulé à l'énergie nucléaire», soit la possibilité offerte aux concurrents d'EDF de s'approprier jusqu'à 25% de sa production d'électricité nucléaire, aura pour conséquence directe une augmentation du tarif aux particuliers de 20% d'ici à 2015.
Une électricité soumise aux seules lois du marché, c'est une augmentation inéluctable des tarifs, et c'est un risque de pénurie. Car nous sommes persuadés que la clause de destination (censée encadrer le dispositif pour que les volumes d'électricité rachetés correspondent exactement aux besoins des clients finaux français) n'a aucune consistance juridique : certains alternatifs n'utiliseront l'électricité produite par le parc nucléaire français que pour spéculer sur le marché de gros.
Cette loi fait également courir le risque de l'arrêt des investissements futurs. Cela concerne à la fois les réseaux — dont les usagers et les élus de proximité connaissent l'état de dégradation — et la construction de nouveaux moyens de production, qu'elle soit hydroélectrique, thermique, nucléaire ou à partir d'énergies renouvelables. Tout comme les investissements garantissant la sûreté des installations existantes.
La loi NOME porte en elle les germes de graves dysfonctionnements, susceptibles de rompre les équilibres fragiles de notre société. Plongé dans une grave crise économique, notre pays souffre autant du chômage que du manque de perspectives. Nombre d'entreprises croulent sous les charges ; nombre de familles sont en situation de grande précarité énergétique. Nous ne pouvons pas accepter que la situation de nos concitoyens empire du fait de l'abandon d'un système qui leur garantissait jusqu'ici une électricité fiable et pas chère, qu'ils ont par ailleurs financée par le règlement de leurs factures antérieures. Cela ne relève pas de l'idéologie ni d'un quelconque attachement au passé, mais de la responsabilité.
Les électriciens et gaziers subissent déjà les conséquences des lois de 2000 et de 2004. Beaucoup ont perdu leurs repères sur les missions de service public que l'Etat leur demande d'assumer, et ce dans des conditions de plus en plus difficiles. Ils savent que les usagers n'ont rien à espérer de cette nouvelle loi, qui vise à transformer un outil industriel en outil de performance financière, au service d'intérêts particuliers et à court terme.
Cette loi est injuste car elle détruit l'égalité d'accès à l'électricité et l'égalité entre les territoires. Elle privera la France des moyens financiers nécessaires au développement de nouvelles technologies, plus performantes, plus sûres et encore plus respectueuses de notre environnement. Si la modernité a un sens, celui-ci consiste à ne pas détruire mais plutôt à construire, dans l'intérêt de tous, un monde meilleur.
Virginie Gensel, secrétaire générale de la Fédération nationale Mines Énergies CGT
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