Petites roueries ou gros mensonges : le Projet de loi de finances (PLF) pour 2007, dernier de la législature, est présenté comme un modèle par le gouvernement. «Solide, sérieux et juste», pour le rapporteur du budget Gilles Carrez (UMP), «ambitieux et vertueux» selon le ministre de l'Economie et des finances Thierry Breton. Hier, pour l'ouverture du débat budgétaire à l'Assemblée nationale, gouvernement et députés de la majorité ont rivalisé dans l'autosatisfaction. L'opposition socialiste et communiste, mais aussi l'UDF ont entrepris de démonter les ficelles qui permettent de présenter un budget «chloroformé par la propagande du gouvernement» (Didier Migaud, PS). Examen critique des principales affirmations.
Le déficit public en baisse ? Avec un déficit budgétaire de 41,6 milliards d'euros contre 42,7 milliards en 2006, le budget de l'Etat sera moins déficitaire l'an prochain. C'est «miraculeux», estime Gilles Carrez. En réalité, à ce niveau on stabilise juste la dette mais on ne la rembourse pas encore. Et cela ne prend en compte que la dette de l'Etat, et non l'ensemble des déficits publics qui devraient représenter en 2007 2,5% du PIB, au lieu de 2,7% cette année. Mais cette diminution relative doit davantage à la croissance du PIB qu'à la baisse des déficits.
Les dépenses maîtrisées ? Le gouvernement affiche une progression des dépenses de seulement 0,8% soit un point de moins que l'inflation. En euros constants, donc, les dépenses de l'Etat baissent. En réalité, estiment les socialistes, si l'on tenait compte des transferts aux collectivités et surtout au budget de la Sécurité sociale d'un certain nombre de charges (comme les nouveaux allégements au profit des PME), la comparaison 2006/2007 serait beaucoup moins flatteuse. Les socialistes Eric Besson et Didier Migaud estiment que sans ces «multiples manipulations comptables», le budget de l'Etat aurait progressé de + 2,49% soit nettement plus que l'inflation.
Le budget de plus en plus transparent ? Pour la seconde année, les principes de la Loi organique de la loi de finances (Lolf) sont appliqués. Ils permettent de davantage responsabiliser chaque ministère en distinguant les grandes missions de l'Etat. Pour autant, estiment les députés, non seulement de l'opposition mais aussi de l'UDF, ce budget est «insincère», selon François Sauvadet au nom du groupe UDF qui «ne le votera pas», une partie des députés s'abstenant et les autres votants contre.
Réforme fiscale : les classes moyennes en profitent ? Le ministre délégué au Budget, Jean-François Copé, s'en félicite : «La réforme fiscale votée l'an dernier se traduit par un allégement de 4,9 milliards d'euros pour les ménages.» Le changement des barèmes de l'impôt sur le revenu se traduit effectivement par une baisse de la charge fiscale qui bénéficie à plusieurs millions de contribuables. Mais, rappellent les députés socialistes, le «bouclier fiscal profite aux contribuables les plus aisés, assujettis à l'ISF», et «au total, 10% des contribuables capteront 60% de la baisse de l'impôt sur le revenu».
Les promesses de baisse d'impôts tenues ? «Depuis 2002, l'impôt sur le revenu aura baissé en moyenne de 20%», soulignait hier Jean-François Copé. Pourtant, le poids de prélèvements obligatoires reste le même. Explication, selon le ministre : «L'Etat n'est pas le seul acteur, et les impôts locaux ont explosé.» Ce serait donc la faute aux socialistes, qui gèrent toutes les régions sauf une. A un détail près : l'Etat, depuis quatre ans, a transféré dans le cadre de la décentralisation nombre de ses charges. «L'Etat doit près de 2 milliards aux collectivités», rappelait hier Augustin Bonrepaux (PS, Ariège).
De plus en plus de recettes fiscales versées à la Sécu ? Non seulement l'Etat se montre vertueux, se félicitent les ministres qui ont préparé le budget, mais il vole au secours de la Sécurité sociale en affectant une partie des droits sur les tabacs, à hauteur de 500 millions d'euros, à l'assurance maladie. Geste généreux, mais qui ne fait que compenser des allégements de charges accordés aux entreprises par l'Etat. Le système tend à se généraliser. Les règles européennes ne permettant plus de verser des subventions aux entreprises, les cadeaux fiscaux se font par le biais d'allégements de charges. Pour la bonne cause, puisque selon l'expression de Thierry Breton, c'est un élément de l'«enchaînement vertueux» qui «débouche sur la création d'emplois». Mais les députés UDF reprochent à l'Etat de ne pas tenir ses engagements sur les remboursements à la Sécu des allégements de charge qu'il a décidé.
(Source : Libération)
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