Le rapport de la Cour des Comptes, publié ce mercredi, passe au crible les politiques publiques et fait cette année la part belle aux maladresses coûteuses et à la gestion approximative de l'Etat dans ses privatisations et ses opérations immobilières. Faute de stratégie claire et d'une bonne évaluation des conditions de marché, "l'Etat actionnaire" ne réalise pas toujours de bonnes affaires, et les recettes des privatisations ont eu trop souvent tendance à financer les dépenses courantes du budget général plutôt que le désendettement de la France. Bref, en résumé, l'Etat est un piètre trader.
La privatisation des sociétés d'autoroutes (de 2002 à 2006) est notamment montrée du doigt, l'Etat ayant au passage omis de protéger l'usager contre des hausses tarifaires excessives des nouveaux concessionnaires privés. Et, du coup, ces dernières ont explosé au plus grand bénéfice des nouveaux actionnaires… et à la plus grande défaveur des automobilistes.
Retards, surcoûts, incohérences : la compétence de l'Etat dans le domaine immobilier ne paraît guère plus satisfaisante à la Cour, qui dénonce des dérapages multiples et une gestion "au fil de l'eau".
Côté bancaire, la situation n'est guère plus reluisante. La liquidation des actifs douteux hérités du Crédit Lyonnais, du GAN ou du Crédit Foncier de France dans les années 90 aura coûté plus de 20 milliards d'euros au contribuable, qui a souvent réglé la note en lieu et place des sociétés concernées. Une illustration claire du principe de la privatisation des profits associé à la mutualisation des risques.
Le rapport passe ensuite en revue une vingtaine de sujets, du CNRS - dont l'Etat doit clarifier le rôle - à la fusion ANPE-Unedic, aux universités des villes nouvelles en Ile-de-France, victimes de leur succès. Mais les hauts magistrats s'alarment particulièrement de la situation de l'hôpital-prison de Fresnes et des "risques" qu'y encourent les patients, notamment à cause de la pénurie de médecins. L'Etat est encore une fois épinglé pour ses retards dans l'emploi des handicapés et sa "médiocre" gestion des retraites des fonctionnaires. Et la Cour inflige une volée de bois vert à la "dotation de continuité territoriale" destinée à subventionner les billets d'avions entre la métropole et l'outre-mer : un "échec" qui a en prime engendré des "abus".
Hasard de l'actualité, le rapport se penche également sur la réforme de la redevance télé, estimant difficile de maintenir l'audiovisuel public en équilibre financier sans ses ressources publicitaires. Le président de la république a en effet annoncé il y a quelques semaines la suppression des 800 millions de recettes publicitaires du service public de l'audiovisuel.
Fidèle à son devoir de réserve pour cause de campagne pour les municipales, la Cour épargne cette année les communes coupables de mauvaise gestion. Mais elle se rattrape avec deux bizarreries héritées du passé. D'abord, les Thermes nationaux d'Aix-les-Bains et leurs dizaines de "physiothérapeutes d'Etat" bénéficiant notamment de huit semaines de congés payés. Ensuite, le corps des "conservateurs des hypothèques" qui, en vertu d'une "curiosité administrative" de plus de deux siècles d'âge, puisque remontant à 1771, sont rémunérés au pourcentage des transactions qu'ils enregistrent. Ce qui leur garantit non seulement des salaires très élevés, nettement supérieurs à ceux des autres fonctionnaires et qui, de surcroît, sont indexés sur la hausse du marché immobilier, soit 13,1% en moyenne en 2006 et jusqu'à 50% dans certains cas.
(Source : La Tribune)
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