Si l'on tient compte de l'augmentation moyenne de 3,4% déjà intervenue le 15 août (et qui était, pour les ménages, la plus élevée depuis juillet 2003), ce nouveau coup de massue portera la hausse à plus de 6% sur six mois — l'une des plus fortes depuis 30 ans —, alors même que l'inflation est supposée ne pas dépasser 1,6%.
Selon l'UFC-Que Choisir, dans un contexte de dégradation économique et sociale lourde, cette hausse se traduira par une surfacturation minimum de 15 € par an, jusqu'à 50 € pour les ménages qui se chauffent à l'énergie électrique. L'association de consommateurs dénonce des faits inédits : alors qu'EDF est censé appliquer une augmentation annuelle limitée au niveau de l'inflation, voilà que le rythme s'accélère (deux par an) et dépasse toute mesure (le plafond de l'inflation, on s'en tape !), avec la bénédiction du gouvernement.
Surtout, l'envolée des tarifs d'EDF succède à celle du gaz : en juillet dernier, la facture avait pris 5% de plus, et cette augmentation survenait quatre mois à peine après un premier relèvement de 10%. Pour les ménages, cette série noire a provoqué une flambée des factures comprise entre 12 et 85 € par an selon l'utilisation faite de cette énergie : cuisine ou chauffage.
Avec la crise, plus de 3,4 millions de familles sont victimes de la précarité énergétique : les impayés et les coupures explosent. La satisfaction des besoins élémentaires (se nourrir, se loger, se soigner…) coûte de plus en plus cher : les gens sont étranglés.
Le solaire a bon dos
Cette décision malvenue, pour ne pas dire malfaisante, résulte d'un amendement au budget 2011 soutenu par le gouvernement, qui prévoit de relever la contribution au service public de l'électricité (CSPE), taxe forfaitaire payée par chaque consommateur afin de couvrir — entre autres — les charges liées au rachat, au-dessus des prix du marché, de l'énergie photovoltaïque produite par les particuliers. En tous cas, c'est le motif invoqué par François Baroin qui a rappelé que le soutien aux énergies vertes, encore peu compétitives, "est une déclinaison du Grenelle de l'environnement, qui lui-même est une déclinaison de la plateforme de Nicolas Hulot".
Or, il est vrai qu'EDF doit racheter l'électricité produite par les énergies renouvelables jusqu'à 58 centimes le KWh, alors qu'elle le revend autour de 10 centimes. Du fait de la multiplication par dix de la puissance du parc de panneaux solaires en France, passé de 81 mégawatts fin 2008 à 880 MWh fin 2010 (ce qui, entre nous, ne représente que 0,01% de la production électrique française), l'entreprise affirme n'être plus couverte par la CSPE à hauteur de 1,6 milliards d'euros alors qu'elle réalise, par ailleurs, des profits importants. La solution est donc toute trouvée : piocher une fois de plus dans la poche des usagers avec la bénédiction de l'Etat actionnaire. Le nouvel article 13 bis du projet de loi de Finances pour 2011 prévoit que la CSPE passera de 4,50 à 7,50 € par MWh, ce qui induira une hausse de 4% de nos factures. Selon le scénario envisagé par le gouvernement, la CSPE augmentera de 67% et devrait tripler d'ici trois ans.
A quoi sert la CSPE ?
La contribution au service public de l'électricité sert à compenser les surcoûts engendrés par la péréquation tarifaire (c'est-à-dire le fait que les usagers des DOM-TOM bénéficient d'un tarif identique à celui des métropolitains malgré un coût de production plus important), le rachat des énergies renouvelables, le financement de la production d'électricité à partir de la cogénération gaz et, enfin, celui de la tarification sociale (TPN et TSS). Or, pour 2010, la Commission de Régulation de l'Energie (CRE) a estimé que le financement des énergies renouvelables ne pèse que pour 24% de la taxe, alors que la cogénération gaz en pèse 32% et la péréquation tarifaire 41%. Historiquement, ce sont bien la péréquation tarifaire et la cogénération gaz qui captent la plus grande partie de la charge de service public de l'électricité. Quant aux tarifs sociaux, on voit bien qu'ils comptent pour du beurre (3%).
Il est donc évident que les énergies renouvelables, si elles bénéficient d'un soutien financier à travers la CSPE, ne représentent pas aujourd'hui, à elles seules, une charge qui justifie l'augmentation de 3 à 4% de la facture électrique. François Baroin nous enfume, et cherche à discréditer l'écologie.
Les écolos estiment que ce qui pèse le plus sur les factures des consommateurs est l'augmentation du tarif de transport et distribution, alors même qu'ERDF a chroniquement sous-investi dans ses réseaux et qu'une part toujours plus grande de ses bénéfices remonte à la maison-mère au lieu d'être investis. Imputer cette nouvelle hausse au soutien aux énergies renouvelables est, selon eux, malhonnête. Ce sont les choix stratégiques d'EDF que vont supporter les ménages : l'entêtement dans le nucléaire, les surcoûts du chantier de l'EPR à Flamanville, le prolongement de centrales vétustes, mais aussi les investissements hasardeux dans le nucléaire à l'étranger.
Petit tour dans les comptes de la société EDF => Lire ici… c'est très instructif !
Alors, de qui se moque-t-on ? Quand le cauchemar va-t-il finir ?
Hélas, il ne fait que commencer : la loi NOME, imposée par Bruxelles afin d'accélérer et renforcer la libéralisation du marché de l'électricité en France, entrera aussi en application le 1er janvier prochain. La mise à mort du service public se poursuit, et pour financer sa privatisation, on n'a pas fini d'être saignés. Vive le libéralisme économique !
SH
Sur ce graphique, on note à quel point la part sociale de la CSPE est riquiqui :
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