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Hold-up sur EDF !

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Tandis que la réforme des retraites monopolise l'actualité sociale, nos parlementaires décident discrètement de l'avenir du service public de l'électricité. Puisque la concurrence ne fonctionne pas, plus de 96% des Français étant restés fidèles à EDF, le gouvernement a décidé de la créer… artificiellement.

L'ouverture du marché de l'énergie, le 1er juillet 2007, n'a pas eu les effets escomptés, l'opérateur historique détenant encore 95% du marché des particuliers dans l'Hexagone. Ce que la Commission européenne voit d'un mauvais œil...

Imposé par Bruxelles afin d'accélérer et renforcer la libéralisation du secteur dans l'Hexagone, le projet de loi sur la "nouvelle organisation du marché de l'électricité" (NOME), présenté mi-avril en Conseil des ministres et examiné le 8 juin à l'Assemblée nationale, oblige EDF à céder jusqu'à 25% de la production de son parc nucléaire aux nouveaux fournisseurs (GDF-Suez, Poweo, Direct Energie, E.ON, Enel, RWE…), et ce à un "prix de gros" — au moins 42 € par MWh, a dit EDF; au moins 34 € par MWh, plaident ces concurrents — pour leur permettre d'accéder à une électricité à bas coût qu'ils pourront revendre.

Mais la Commission de régulation de l'énergie (CRE), chargée de veiller sur nos tarifs, doit aussi veiller à ce que les nouveaux entrants ne soient pas pénalisés : elle juge le prix d'EDF trop élevé et défend un tarif plus proche de 37 €. Un véritable «pillage», selon le pdg d'EDF Henri Proglio, qui doit déjà trouver 35 milliards d'ici à 2030 afin de prolonger de dix ans la durée d'exploitation de ses 58 réacteurs.

Non, vous ne rêvez pas !

Adopté en première lecture le 15 juin par les députés de droite, le projet doit maintenant passer entre les mains des sénateurs. Si la loi NOME est votée (et elle le sera), elle entrera en application le 1er janvier 2011.

A partir de cette date, ces "fournisseurs alternatifs" se verront donc offrir à prix coûtant un quart de la production nucléaire d'EDF — dont les Français, Etat et usagers, ont payé l'investissement — afin qu'une soi-disant concurrence soit rétablie. Dans le monde de la "concurrence libre et non faussée" selon Bruxelles, c'est une première d'obliger une entreprise à céder une partie de ses atouts à ses concurrents et, dans ce cas précis, à des affairistes qui ne produisent que peu ou pas du tout d'électricité : bref, des intermédiaires qui profiteront de la manne nucléaire d'EDF sans avoir à investir, et dont les profits iront directement dans les poches de leurs actionnaires.

Dans son principe, cette loi cautionne le parasitisme économique.

Concurrence et conséquences

On le sait, la plupart du temps, la mise en concurrence ne favorise ni la qualité du service ni la baisse des prix, bien au contraire.

Ayant perdu son monopole, EDF a délaissé l'entretien de son réseau, qui ne cesse de se dégrader. De L'Expansion à Alternatives économiques, le constat est le même : ERDF pâtit des choix de sa maison mère, tout comme Réseau Ferré de France (RFF) pâtit des stratégies de la SNCF, autre entreprise publique à qui l'UE impose la dérèglementation par le biais de nos gouvernements. Quant à l'entretien de ses sites nucléaires, EDF réserve les tâches les plus dangereuses à des sous-traitants qui emploient des salariés au statut précaire.

Pour financer les investissements liés à la rénovation des réacteurs, les usagers devront déjà mettre la main à la poche : des hausses sont attendues cet été. Avec la loi NOME, puisqu'il est reconnu par Bruxelles que la concurrence dans ce secteur ne peut s'exercer à cause des tarifs trop bas d'EDF, ceux-ci vont mathématiquement augmenter grâce à ces "fournisseurs-intermédiaires" qui ne produisent quasiment rien et, quel que soit le prix de rachat du MWh décidé par la CRE, chercheront tous à dégager une marge.

Ces augmentations — estimées par la CRE à 11,4% une fois la loi votée et à +3,5% par an entre 2011 et 2025 pour les particuliers (soit +25% d'ici 2015 !); pour les entreprises, à +14,8% une fois la loi votée, puis à +3,7% par an entre 2011 et 2025 — grèveront lourdement le pouvoir d'achat des consommateurs et porteront un coup supplémentaire à un secteur industriel déjà mal en point, le prix de l'énergie étant un facteur de localisation d'activité. De plus, si elle consent à maintenir le principe des tarifs réglementés pour les ménages et les petites entreprises, la loi NOME prévoit la suppression des tarifs réglementés pour les moyennes et grandes entreprises à partir du 31 décembre 2015.

Revenons à la SNCF, grosse cliente d'EDF. La loi NOME va induire une hausse de 25% de la facture de l'entreprise publique, qui achète son électricité à un tarif préférentiel (le TARTAM, qui ne sera pas reconduit car, comme l'ensemble des tarifs réglementés d'EDF, celui ci ne respecte pas "la concurrence libre et non faussée" aux yeux de Bruxelles). Le prix du billet de train flambera en conséquence alors que, réchauffement climatique oblige, il faudrait tendre vers le contraire.

L'Europe de la faillite économique et sociale

Dans cette affaire, l'originalité de la France est d'accepter de saborder non seulement son système électrique, mais aussi son avantage compétitif.

Grâce à l'énergie nucléaire et à des tarifs régulés, nous bénéficiions d'une électricité parmi les moins chères d'Europe (plus de 30% inférieure à la moyenne). Grâce à l'Europe "libérale-absurde" — qui est déjà responsable de la faible croissance, du chômage, de la désindustrialisation, de la faillite des états et de la dérive de la monnaie —, cet avantage et cette stabilité, considérés comme un privilège inadmissible au sein de l'UE, sont mis à bas.

Quand il ne s'agit pas de mener des politiques d'austérité contre-productives à l'encontre des peuples, l'obsession européenne de la concurrence va jusqu'à contaminer un produit de première nécessité qui, de surcroît, ne se stocke pas et se transporte mal. Alors que la seule et véritable concurrence qui puisse être opposée à l'énergie nucléaire est le développement progressif des énergies renouvelables — mais pour cela, encore faut-il investir massivement… —, cette mise en concurrence factice entre un fleuron de l'électricité prêt à se faire tondre et des affairistes à l'affût nous dévoile toute l'ignominie du système ultralibéral, que la gouvernance européenne continue de servir avec zèle.

SH

DERNIÈRE MINUTE : Ça y est, la loi NOME est votée...

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Mis à jour ( Mercredi, 30 Novembre 2011 12:04 )  

Commentaires 

 
0 # pat.du49 2010-06-18 10:20 faut temperer avec le cout de l'electricité que serait moins cher de 30% en France.

quand on paye nos factures, on paye, un tout," abonnement, consommation ET TAXES".

50% de taxes et abonnement environs qui se rajoutent au prix du kWh.
au bout du bout, le Français, paye donc déjà son electricité, souvant bien + cher, que bien des voisins européens.
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0 # pat.du49 2010-06-18 10:26 démonstration :

ma dernière facture :

conso heures creuses : 594 kWh = 30,83€
conso heures pleines : 998 kWh = 83,73€
total conso : 114,56€

total à payer TTC : 175,76€
soit 55% de + au final, qu'il me revient le kWh, en comptant taxes, taxes sur les taxes, contributions diverses, et abonnement.
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0 # pat.du49 2010-06-19 07:52 1 MWh = 1000 kWh

TTC tout compris le kWh moyen me revient, à moi, client à 0,11€
soit le MWh à 110€.

si je ne mesure que le prix moyen HT et hors abonnements etc, il me coute 71,91€ HT le MWh

ça laisse imaginer déjà, les marges que prennent les différents opérateurs.

pour comparer avec des voisins européens, et autres pays, il faudrait prendre donc ce paramètre.
et prendre en considération également, le climat, le salaire minimum, etc ..

en france 1 MWh prix arrivé chez client represente env 25% du RSA

en sachant que les + pauvres, sont dans les logements les + énergivores.
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0 # laurent 2010-06-25 18:56 que dire aussi de ces KWh que EDF rachéte à prix d'or aux particuliers qui équipent leurs toits de panneaux solaire ou mettent des éoliennes dans leurs champs !

l'énergie n'a décidément pas le même coût pour tous
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0 # superuser 2010-10-29 12:37 La loi NOME a été adotée fin septembre par le Sénat. Le projet de loi doit être ensuite examiné à l'Assemblée Nationale par la Commission mixte paritaire, pour un vote définitif en fin d'année. Répondre | Répondre avec citation |
 
 
0 # superuser 2010-12-16 16:46 Carrefour et la RATP quittent EDF !

EDF va perdre deux gros clients, selon Le Figaro. Carrefour a décidé de faire appel à l'Italien Enel pour alimenter ses grandes surfaces en électricité, et la RATP va elle aussi se tourner vers un nouveau fournisseur d'énergie.

Avant l'été, le groupe de distribution Carrefour avait lancé un appel d'offres pour l'alimentation électrique de l'ensemble de ses grandes surfaces en France. C'est l'italien Enel qui a raflé le marché, jusque-là détenu par EDF. De son côté, la RATP avait mis deux lots en jeu qui représentent 90% de sa consommation. Deux opérateurs différents ont finalement été retenus - pour un contrat d'une durée d'un an - et, là encore, EDF sort du jeu.

Régulièrement attaqué pour le manque de concurrence en France, EDF rappelle au contraire qu'il a perdu entre 40% et 50% du marché des gros industriels, ceux qui consomment plus de 7 gigawattheures (millions de kilowattheures) . Un argument de plus pour défendre un prix plancher - estimé à 42 euros le mégawattheure par EDF - auquel l'opérateur historique sera contraint par la loi de revendre sa production nucléaire à la concurrence. Mais ses rivaux souhaitent un prix nettement inférieur. Les pouvoirs publics vont devoir arbitrer.

http://www.lefigaro.fr/societes/2010/12/15/04015-20101215ARTFIG00742-carrefour-et-la-ratp-quittent-edf.php
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0 # tintin74 2010-12-16 17:29 Quitter EDF est peut être valable pour les gros consommateurs, pour les particuliers c'est autre chose - j'en connais qui l'ont fait et l'ont amèrement regretté car ils sont tombés dans un grand "n'importe-quoi", surtout au niveau de la facturation Répondre | Répondre avec citation |
 

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