Yoland Bresson est un pragmatique. Il estime que tout changement trop brusque, trop radical est voué à l'échec. Il prend exemple sur les congés payés instaurés en 1936, une idée révolutionnaire qui avait pris naissance dans les années 20, si ce n'est avant. Peu à peu, malgré la ruine laissée par la guerre et le fait qu'il puisse sembler inapproprié d'offrir deux semaines de vacances par an aux salariés alors que le pays était à reconstruire, tout le monde a fini par être convaincu de leur bien-fondé et y voir de nombreux avantages (meilleure productivité, développement de nouvelles activités économiques…). Ainsi, la durée minimum des congés payés obligatoires n'a cessé de s'allonger par l'action législative : elle est passée à 3 semaines par an en 1956, puis à 4 en 1969 et à 5 en 1982. Aujourd'hui, hormis une poignée d'obscurantistes, plus personne ne conteste ce droit dont les bienfaits économiques et sociaux sont avérés.
Pour qu'une idée révolutionnaire ait toutes les chances de s'installer durablement dans les esprits, il faut aussi qu'elle soit, dès le départ, bien ficelée. Par exemple, l'idée de la réduction du temps de travail et des 35 heures était excellente, mais force est d'avouer que la loi Aubry II est bancale : aujourd'hui, ses détracteurs sont toujours aussi nombreux, la menacent et la contournent en permanence. C'est pour éviter cet écueil que Yoland Bresson a imaginé une période transitoire et indolore de cinq ans minimum, de façon à asseoir l'idée du revenu d'existence en limitant le nombre de ses opposants, de manière à la faire progresser indéfiniment, au gré de l'évolution de la société.
Contrairement à Bernard Friot qui rejette le terme "revenu", Yoland Bresson l'estime approprié : en économie, le revenu est, par définition, une ressource attribuée en contrepartie d'une participation à la production; or, tout échange de temps, peu importe sa forme, est créateur de richesse et participe à la production de la richesse commune. Quant au terme "existence", il va de soi : parce qu'on existe et qu'on est partie intégrante d'une communauté, donc source d'une multiplicité d'échanges, on doit bénéficier d'une part de la richesse commune. Ce revenu doit être inconditionnel (pas de contrôle social), égal pour tous, cumulable avec d'autres ressources, et inscrit comme droit civique.
Il ne s'agit pas de faire de la redistribution, mais de modifier en profondeur l'organisation de cette distribution. Pour ne froisser personne ni prendre d'un côté ou de l'autre — créer de nouvelles taxes ou impôts ou élargir la TVA selon la théorie bâloise du revenu de base, sacrifier des budgets alloués à telle ou telle dépense comme l'a préconisé Jacques Marseille… — en risquant des levées de boucliers conservatrices qui pourraient compromettre le projet, Yoland Bresson propose de créer des liquidités afin de nourrir un système indépendant de rente perpétuelle qui serait géré par un organisme financier national.
L'amorce est modeste : dans un premier temps ce revenu, distribué à tous de la naissance à la mort et dont le montant n'excèderait pas 400 €, n'aura pas vocation à se substituer à l'existant mais à lui apporter un "plus". Ensuite, une fois installé, ce "plus" ira de soi et grossira avec les années. On peut imaginer que plus tard, son financement pourra même être abondé par d'autres sources jusqu'à présent épargnées, qui seront au final admises comme mal ou injustement employées, et dévolues à son utilité.
A vous de juger :
L'avis de Yoland Bresson sur le "revenu citoyen" de Dominique de Villepin :
SH
Pour en savoir plus, voir :
• Le site de l'AIRE (Association pour l'Intauration d'un Revenu d'Existence) où tout est expliqué en détail
• Cette interview de Yoland Bresson sur owni.fr
Voir également la vidéo de la conférence organisée en septembre 2008 par le mouvement Utopia avec Yoland Bresson, Denis Baupin et Baptiste Mylondo :
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