Jugeant que le soutien à l'aide alimentaire doit être assuré par les Etats et non par le budget de la PAC, les ministres de l'Agriculture de six pays membres (Allemagne, Suède, Pays-Bas, République tchèque, Autriche et Danemark) sont restés inflexibles. Du fait de leur objection, les crédits alloués par l'UE pour les aides alimentaires risquent d'être divisés par quatre, passant de 480 millions d'euros cette année à 113,5 millions en 2012.
Avec des répercussions en cascade : «Pour la France, cela signifie que 63 millions d'euros manqueront au budget des associations en 2012 et que 130 millions de repas ne seront pas distribués l'an prochain. Et la situation devrait être pire pour 2013», explique Jean-Louis Callens, secrétaire général du Secours populaire. Son seul espoir désormais, c'est «que les associations et l'opinion publique fassent un grand ramdam dans les prochains jours pour pousser les pays réfractaires à faire marche arrière». Si aucune issue n'est trouvée, les associations n'auront plus qu'un recours : demander à l'Etat français de mettre la main à la poche.
Le Secours Populaire, la Croix Rouge, la Fédération Française des Banques Alimentaires et les Restos du Cœur ont donc réagi, adressant un courrier commun à tous les chefs d'Etat et de gouvernements européens :
Paris, le 20 octobre 2011
Lettre ouverte à Mesdames, Messieurs les Chefs d'Etat et de Gouvernements européens
Aujourd'hui, le Conseil des ministres européens de l'Agriculture vient de refuser de voter l'évolution du Programme européen d'aide aux plus démunis (PEAD). Pourtant cette prolongation, seul moyen de répondre aux besoins des 18 millions d'Européens les plus démunis, était demandée par la Commission européenne, votée par 85% des eurodéputés et soutenue par 21 Etats sur les 27 que composent l'Union européenne.
Cette décision est incompréhensible pour l'opinion publique, habituée à un fonctionnement démocratique de la vie politique depuis des décennies.
Ce nouveau report traduit le désaveu d'un des principes fondateurs de l'Europe, visant à assurer la sécurité et l'autosuffisance alimentaire de tous, et en particulier des plus démunis.
Les conséquences d'un arrêt aussi brutal d'un dispositif parfaitement géré depuis presque un quart de siècle et représentant seulement 1 € par Européen, ne pourront en aucun cas être compensées pour 2012.
L'Europe ne peut pas laisser de côté les 18 millions d'Européens concernés par l'aide alimentaire et, au-delà, les 80 millions de citoyens européens les plus fragiles : une catastrophe humanitaire est désormais à craindre sur notre continent.
Les principes de démocratie, d'humanisme, de respect des engagements et de fidélité au traité de Rome dépendent aujourd'hui de la responsabilité des Chefs d'Etat en charge de la construction de l'Europe.
Les associations humanitaires françaises vous appellent solennellement à ne pas abandonner les plus pauvres dans cette période de crise et, au-delà, à mobiliser toute votre énergie pour prolonger un soutien efficace de l'Union européenne à sa population la plus démunie.
Jean-François MATTÉI pour La Croix Rouge française,
Alain SEUGÉ pour la Fédération Française des Banques Alimentaires,
Olivier BERTHE pour les Restaurants du Cœur,
Julien LAUPRÊTRE pour le Secours Populaire français
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