UMP et sécurité. L'alliage a déjà pris en 2002 et 2007, mais quid de 2012 ? Car, cette fois-ci, la situation est bien différente. La crise est passée par là, traînant derrière elle son cortège de fermetures d'usine et de dégraissage des effectifs dans tous les secteurs. En octobre, le chômage a ainsi atteint un niveau jamais égalé depuis 1999.
Malgré tout, le parti présidentiel parle essentiellement d'insécurité et d'immigration, alors que les Français disent à longueur de sondages leurs préoccupations pour l'emploi. Depuis plusieurs jours, les responsables de la majorité enchaînent les prises de parole sur ce terrain dans le sillage d'un Claude Guéant, plus libéré que jamais.
Dimanche, il a ainsi jugé qu'il y avait "trop" d'étrangers en France, promettant de réduire le nombre d'immigrés légaux, aujourd'hui estimé à 200.000 par an (alors qu'il y a plus de 5,2 millions d'inscrits à Pôle Emploi). Il entend donc agir sur le regroupement familial, le recrutement des étrangers, dont les étudiants en fin de cycle, et même le droit d'asile. Et pour illustrer ses propos, le ministre de l'Intérieur n'a pas hésité à emprunter une comparaison chère au Front national : 200.000 immigrants, "c’est l’équivalent d’une ville comme Rennes". Pas étonnant dans ce cas que Marine Le Pen lui ait adressé un grand "merci" pour avoir, selon elle, reconnu "l’effroyable bilan de la politique d’immigration de Nicolas Sarkozy".
L'UMP brandit désormais la carte de la peur pour souder un corps électoral tenté par le centre, comme par l'extrême droite. Claude Guéant, toujours lui, a ainsi affirmé que donner le droit de vote aux étrangers non-communautaires risquait de conduire à l'élection de maires étrangers. "Je n’ai pas envie de voir dans le département de la Seine-Saint-Denis, qui a une forte population étrangère, la majorité des maires devenir étrangers", a-t-il ainsi expliqué. Qu'elle soit effrayante ou non, cette perspective relève du fantasme : le droit de vote des étrangers ne leur donnera pas la possibilité d'être élus maire ou adjoint.
L'UMP joue sur le registre de la peur
Le scénario dessiné par Arno Klarsfeld, président de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, mérite aussi d'être relevé : "Une vague fondamentaliste traverse le monde musulman, elle touche aussi par endroits le territoire français. Alors, voulons-nous des listes fondamentalistes aux élections dans certaines municipalités ?"
Cofondateur de la Droite populaire, Thierry Mariani porte ce même discours et, pour l'illustrer, s'est procuré les votes des Tunisiens de France lors du dernier scrutin, des électeurs qui avaient placé largement en tête le parti islamiste Ehannada. La victoire d'un autre parti islamiste au Maroc encouragera certainement le ministre des Transports à poursuivre sur cette voie.
Enfin, dernière étage de l'opération menée par l'UMP, la convention de Villeurbanne. Ce mardi soir, le parti présidentiel va présenter ses propositions en terme de sécurité, immigration et laïcité. Principale mesure : la création d'un code pénal pour les mineurs dès 12 ans...
Mauvais timing
La semaine dernière, dans le Nord, l'UMP causait mesures économiques et sociales : un "rendez-vous du courage" qui proposait de "sortir des 35 heures" et d'engager "une lutte déterminée contre la fraude" en stigmatisant les bénéficiaires de prestations sociales, autres boucs-émissaires du parti présidentiel. Autant dire que le timing n'est pas optimal. Car c'est cette semaine qu'il aurait fallu parler des solutions pour sortir de la crise au moment où les très mauvais chiffres du chômage étaient publiés. Au lieu de cela, l'UMP ouvre une séquence "sécurité", espérant qu'elle permettra de resserrer les rangs de son électorat.
A voir les préoccupations des Français, c'est pourtant loin d'être gagné. Les derniers sondages montrent tous une large domination des questions d'emploi et de pouvoir d'achat. Dans sa dernière enquête pour RMC, BFM et 20minutes, l'institut CSA donnait l'emploi en tête à 45%, très loin devant "la sécurité des biens et des personnes" (15%). Et si l'on en croit cette étude, ce thème séduirait à peine plus les électeurs de droite (22% contre 39% pour l'emploi).
2002... 2007... Usée, la recette pourrait ne plus fonctionner en 2012.
(Source : L'Express)
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