Un véritable coup d'Etat financier va se jouer en France à partir du 16 avril. En effet, le président Nicolas Sarkozy via l'AMF (Autorité des marchés financiers) vont permettre d'ouvrir sur l'Eurex, le marché des dérivés, un contrat à terme sur les emprunts d'Etat français, l'autorisation des ventes à découverts [1]. Ce mécanisme purement spéculatif, appelé en anglais «short selling» ou «shorting», consiste à vendre un titre dont on anticipe la baisse. Le vendeur s'engage à fournir à un certain prix à une certaine date, en faisant le pari que le titre va baisser entre temps...
Et oui, mes amis, l'AMF a mis fin à l'interdiction des ventes à découvert sur les titres émis par dix grandes banques et sociétés d'assurance cotées sur le marché parisien (AXA, BNP Paribas, Société Générale, Crédit Agricole…). Que cela veut-il bien dire ?
Cette pratique est parfaitement légale, mais peu encadrée et risquée. En effet, les actions les plus fragiles deviennent particulièrement vulnérables ainsi que les places financières. En plus simple : les spéculateurs du monde entier pourront vendre simplement de la dette française et ce à bas coût, avec un effet de levier de 20 pour les bons du trésor. Oui, avec 50.000 euros investis en cash, il sera possible de vendre à découvert 1 million d'euros d'emprunts d'Etat français en bons du trésor... Depuis la disparition du MATIF (Marché à terme des instruments financiers) il y a 13 ans, il n'était plus aussi facile de spéculer contre la France.
Et ce n'est pas tout, mes amis... La vente à découvert peut être également un emprunt. En effet, l'acheteur emprunte un titre uniquement en échange de la promesse de le rendre un peu plus tard au moment de la liquidation. L'acheteur va pouvoir le vendre, avec pour objectif que le cours baisse et qu'il puisse alors le racheter moins cher, avant de le rendre à son prêteur. Lorsque la vente a découvert est gagée sur un emprunt de titre, elle peut en outre être reportée.
La vente à découvert peut également s'effectuer "à nu". C'est à dire que l'acheteur n'emprunte rien et qu'il se contente de vendre à terme des titres qu'il ne possède pas. Il parie sur la baisse du cours de ce titre afin d'acheter à moins cher que ce qu'il a promis de vendre. Pratiquée massivement, cette technique provoque la baisse des cours que souhaitent les vendeurs.
Comble du cynisme calculateur, des ordinateurs peuvent en «trading automatique» jouer sur des écarts très courts dans le temps et ce à large échelle. Un programme informatique spécifique pour pratiquer la vente et le rachat très rapide de titres dès qu'il s'oriente à la baisse. A grande échelle, cela présente le risque d'amplifier les baisses en déformant les cours.
Ce mécanisme est très dangereux pour les Etats, les entreprises et les investisseurs. Le vendeur n'est pas obligé d'avoir l'argent pour ce qu'il compte vendre. Tout cela est rendu possible contre le paiement d'une CRD (commission de règlement différé). Cela permettra de ne payer que 5 à 20 jours plus tard à condition que les titres soient éligibles au SRD (service du règlement différé), ce qui est le cas des grandes capitalisations boursières. Bien entendu, cela n'est pas réservé à M. et Mme Toulemonde qui n'ont pas un centime de côté. Ils ont déjà bien du mal à ce que leur banque leur accorde un découvert autorisé ou se font refuser des chèques pour 20 euros...
Les vendeurs à découverts sont accusés depuis de nombreuses années d'être à l'origine des crises financières majeures. L'Agence Reuters, Bear Sterns, Lehman Brothers ont accusé de nombreux entrepreneurs «manipulateurs» de répandre de fausses rumeurs après avoir vendu à découvert les actions de leurs entreprises avant que ces dernières ne fassent faillite ou ne soient reprise par un concurrent. Un tel parallèle peut également tout à fait se faire au niveau des Etats et plus particulièrement ici, au niveau de la France, avec tout ce qui va de son lot de rumeurs et de manipulations d'un niveau bien plus considérable que celui des entrepreneurs indélicats. Cela ne sera possible qu'avec la complicité complémentaire de nombreux politiques, médias, analystes et grands comptes...
Monsieur le président des Français, Monsieur Nicolas Sarkozy, mais que faites-vous là à la France ? Qu'est-ce que ces basses manœuvres financières qui livrent tous les Français, du dernier né au vieillard qui se meurt, à la vindicte financière ? C'est ça, votre amour de la France ?
Autoriser cela à 6 jours du premier tour de l'élection présidentielle revient à organiser un attentat financier sur la France. C'est vraiment indigne d'un président et son gouvernement !
Honte à vous et ceux qui comptent profiter de cela pour mieux asservir le peuple français !
Médias, faites votre travail !
A la vue de ce qu'il se passe en Grèce, en Espagne, en France et partout ailleurs dans le monde, il se pose la question de la nécessité absolue de la création d'un Tribunal International des Crimes et Génocides Financiers et Economiques. Oui, il faut pouvoir réprimer toutes ces exactions comptables et financières qui sont réalisées en toute impunité en un simple clic et un éventuel coup de téléphone par les traders et autres larbins technologiques de nos politiques et banskters. Leurs implications ont directement des répercussions sur la vie de tous les jours de millions de personnes. La mascarade de la crise doit être mise à jour. [...]
(Source : Mediapart)
[1] Il semble que l'AMF n'y soit pour rien. Mais pas l'Agence France Trésor et les autorités françaises, Nicolas Sarkozy en tête, qui n'ont rien fait pour l'empêcher.
La chronique de Marc Fiorentino sur BFM-Business :
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