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Le cercle vicieux du chômage de longue durée

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Selon l'économiste américain James Bradford DeLong, le chômage à long terme risque de plomber toute reprise dans les deux prochaines années.

Dans l’hiver de 1933, à son plus bas, la Grande Dépression prenait la forme d’une folie collective, les travailleurs se trouvant désœuvrés car aucune entreprise ne voulait les engager. En fait, ces dernières n’embauchaient personne car elles ne voyaient aucun débouché pour leur production. Et leur production ne trouvait pas preneur, puisque les ouvriers n’avaient pas de salaire à dépenser...

À partir de ce point, la plupart des sans emploi étaient devenus des chômeurs de longue durée, avec deux conséquences. Primo, le fardeau de la désintégration économique n’était pas réparti également. Puisque les prix au détail se sont mis à baisser plus rapidement que les salaires, ceux qui ont conservé leur emploi ont vu leur pouvoir d’achat grandir dans la Grande Dépression. Massivement, ceux qui sont devenus chômeurs et qui le sont restés sont ceux qui ont le plus souffert. Secundo, la réintégration des chômeurs s’est avérée très difficile, ce qui est déjà vrai dans une économie de marché qui tourne rondement. Après tout, n’est-il pas normal pour les employeurs de préférer une recrue qui vient d’entrer sur le marché du travail à quelqu’un qui n’a plus travaillé depuis des années ? Le simple fait qu’une économie ait récemment subi un épisode de chômage de masse rend difficile le retour aux niveaux de croissance et d’emploi fréquemment atteints en temps normal.

Des dévaluations monétaires, des déficits budgétaires publics modérés et le passage du temps ont tous été des remèdes inefficaces. Pour ce qui est de résorber le chômage à long terme, les marchés du travail centralisés et à haut taux de syndicalisation, comme celui de l’Australie, n’ont pas mieux fait que les marchés du travail décentralisés et libres, comme celui des États-Unis. La solution fasciste prônée par l’Italie n’a pas mieux fonctionné, sauf lorsqu’elle a été jumelée au réarmement effréné de l’Allemagne.

En fin de compte, aux États-Unis, c’est l’approche de la Deuxième Guerre mondiale et la demande dérivée de biens militaires qui a incité les employeurs du secteur privé à embaucher les chômeurs de longue durée à des salaires qu’ils étaient prêts à accepter. Cependant, même aujourd’hui, les économistes ne peuvent vraiment expliquer pourquoi le secteur privé ne trouvait pas le moyen d'employer ces chômeurs dans la période qui a presque duré une décennie, de l’hiver 1933 jusqu’au début de la mobilisation des troupes. Le chômage permanent généralisé, malgré des structures différentes des marchés du travail et des institutions nationales, laisse croire qu’il faut accueillir avec un grain de sel toute théorie qui explique la débâcle par une seule cause.

Car pendant la Grande Dépression, les chômeurs ont d’abord cherché d’autres débouchés d’emploi de façon active et assidue. Mais, après environ six mois sans avoir été rembauchés, ils se sont sentis découragés et désemparés. Après douze mois de chômage continu, le chômeur typique cherchait encore un emploi, mais sans enthousiasme ni espoir. Aussi, après deux ans au chômage, ce même travailleur, s’attendant à toujours se retrouver à la fin de la file de recrutement, a perdu espoir et a été pratiquement évincé du marché du travail.

C’était là le sort des chômeurs de longue durée dans la Grande Dépression. C’était également celui des chômeurs à long terme en Europe de l’Ouest à la fin des années 1980. Et dans une année ou deux, le même scénario risque de se reproduire pour les chômeurs de longue durée de l’Atlantique Nord.

J’ai avancé depuis quatre ans que nos problèmes de fluctuation économique exigent d’autres mesures monétaires et budgétaires fortement expansionnistes, et aussi que nos plus grands problèmes fondraient comme neige au soleil si de telles politiques étaient adoptées. C’est encore le cas. Toutefois, pour les deux prochaines années, à moins d’un revirement subit et inattendu de la trajectoire actuelle, ces mesures deviendront de moins en moins applicables.

(Source : Les Echos)

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Mis à jour ( Mercredi, 01 Août 2012 11:53 )  

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