Alors que les négociations sur la «réforme du marché du travail» ont commencé hier au siège du Medef — les discussions auront lieu à raison d'une séance chaque jeudi à partir de ce 4 octobre, jusqu'à conclusion d'un accord avant la fin de l'année — et que le gouvernement, via le ministre du Travail Michel Sapin, a donné le ton — il faut «sécuriser l'emploi» et «lutter contre la précarité» —, les organisations syndicales semblent déterminées à s'opposer fermement aux projets d'un patronat qui réclame toujours plus de flexibilité et de baisse du coût du travail, dans l'optique d'en finir avec notre modèle social.
Le document d'orientation transmis aux partenaires sociaux insiste sur quatre points :
• Lutter contre la précarité sur le marché du travail.
• Progresser dans l'anticipation des évolutions de l'activité, de l'emploi et des compétences.
• Améliorer les dispositifs de maintien de l'emploi face aux aléas conjoncturels pour éviter les licenciements et les pertes de compétences dans les entreprises confrontées à des difficultés. (NDLR : Sur ce point, les accords appelés "compétitivité-emploi" sous l'ère Sarkozy deviennent "accords de sauvegarde"...)
• Améliorer les procédures de licenciements collectifs lorsqu'ils n'ont pu être évités par les actions d'anticipation ou d'activité partielle, pour concilier un meilleur accompagnement des salariés et une plus grande sécurité juridique pour les entreprises comme pour les salariés.
Comment FO aborde-t-il la négociation sur l'emploi ?
Avec, d'abord, l'intention de dresser un état des lieux de la situation réelle du marché du travail. Le patronat demande plus de flexibilité. Quand on entend parler ses représentants, on a l'impression de vivre dans un pays régi par le Gosplan et les kolkhozes. Mais, en trente ans, on a déjà flexibilisé à outrance le marché du travail : individualisation des rémunérations, envolée de l'épargne salariale, primat de la négociation d'entreprise sur la négociation de branche, annualisation du temps de travail, multiplication des emplois précaires... Nous disons stop. C'est allé trop loin. Il nous faut absolument sécuriser l'emploi. Nous suivons le document d'orientation à la lettre : la négociation doit aboutir à ce que le CDI redevienne la forme normale d'embauche. Nous avons de nombreuses propositions à faire.
Lesquelles ?
Pour décourager les abus sur les contrats précaires, nous allons remettre sur le tapis la taxation des contrats courts et la création d'une contribution dégressive du type accidents du travail, déjà évoquée sur l'assurance-chômage. Il faut que nous avancions aussi sur la portabilité des droits à formation, prévoyance et complémentaire santé. Il faut aussi traiter le cas des salariés qui n'ont pas assez travaillé pour que cela leur ouvre des droits à la Sécurité sociale. Et puis, il y a tout ce qui peut constituer un frein à l'emploi (logement, prime transport…) ainsi que les relations entre donneurs d'ordre et sous-traitants. Enfin, nous aurons évidemment un débat sur le retour de l'autorisation administrative de licenciement.
Quelle est la position de FO ?
Il faut redonner à l'administration un véritable rôle de contrôle en amont avec possibilité de suspendre le plan social pour remettre direction et syndicats autour de la table s'il n'est pas satisfaisant. Cela dit, il y a très peu de plans sociaux dans ce pays, et les recours en justice sur le sujet sont epsilonesques. C'est un sujet pour quelques grandes entreprises. Le sujet essentiel pour nous, ce sont les 5 millions de chômeurs et les 22% de chômage des jeunes.
Un des éléments les plus récents de flexibilité de l'emploi a été institué par un accord que vous avez signé. Le regrettez-vous ?
Les ruptures conventionnelles ne sont pas un outil de flexibilité supplémentaire. Elles ont rendu visibles des choses qu'on ne voyait pas. Et que ça fasse office de préretraites, c'est tant mieux pour les seniors. En revanche, nous devons être vigilants sur le risque d'une utilisation pour éviter les plans sociaux.
Qu'êtes-vous prêt à concéder au patronat dans la négociation ?
Nous allons avoir un vrai et beau débat idéologique avec le patronat au sens noble du terme. Il dit qu'il faut faciliter les licenciements pour que les entreprises embauchent. Or, qui peut le croire ? Faciliter les licenciements comme le demande le patronat, c'est en ce moment envoyer directement les gens à Pôle emploi. Nous sommes dans une crise profonde marquée par un chômage massif. Il ne faut pas croire aux miracles. Quand on n'a pas de croissance, on ne crée pas d'emplois, on en détruit.
Vous excluez donc a priori de signer le moindre accord ?
Cette question n'est pas d'actualité pour l'instant. Nous ne sommes même pas entrés en négociation. Vous avez lu comme moi les déclarations de Laurence Parisot. Ce sera une négociation extrêmement difficile dont nous ne sommes pas capables de dire ce qu'elle va donner.
François Chérèque ne signera pas un accord «mou» pour avoir plus de signatures syndicales. Il n'a pas l'intention de vous courir après...
Je trouve ça incroyable ! On n'est pas encore entrés en négociation que certains tirent déjà des plans sur la comète, se projettent dans trois mois, évoquant déjà un accord à 3, 5, 10, que sais-je... Moi, je ne sais pas ce qu'est un accord mou ou dur. Nous nous prononcerons en fonction du résultat des négociations. Cela étant, nous avons des contacts avec l'ensemble des organisations syndicales. Et d'ailleurs nous venons de nous rencontrer avec la CGT.
(Source : Les Echos)
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