Ceux-là, on ne les entend pas, on ne les voit pas (ou si peu). Ils sont absents du débat qui mobilise organisations patronales, syndicales et universitaires. Ce sont eux pourtant qui paient au prix fort l'augmentation du chômage et les possibles dispositions de la Loi Travail.
Si les jeunes s’estiment les premiers concernés par la précarité, le chômage, la réforme du Code du Travail, et le font savoir, il n’en est rien !
Ce sont les travailleurs expérimentés de plus de 45/50 ans qui sont condamnés à une triple peine :
• Un taux de chômage qui s’accroît plus rapidement que la moyenne nationale,
• Une discrimination à l’embauche en raison de leur âge,
• Une possible facilitation des procédures de licenciement qui, indubitablement, encouragera les employeurs à se séparer de leurs collaborateurs âgés, généralement mieux payés que leurs cadets.
Si on ne peut contester que l’accès à un emploi stable et correctement rémunéré n’est pas aisé pour un jeune de 20, 23 ou 25 ans, cette opportunité se présentera à un moment ou un autre de sa vie, tant que les entreprises auront besoin de bras et de cerveaux pour produire biens et services.
La précarité des contrats et des conditions de travail impacte principalement les jeunes sans formation dont nombre d’entre eux ont quitté prématurément les filières d’enseignement. Même constat pour une frange importante de la jeunesse qui a opté pour des cursus ne présentant aucune garantie d’avenir professionnel alors que nombre de formations techniques souffrent d’une désaffection inversement proportionnelle aux besoins des entreprises.
L’abandon des études et le choix de parcours universitaires inadaptés aux réalités du marché constituent les deux blocages majeurs à l’insertion des jeunes dans le monde du travail.
Leurs aînés au chômage connaissent autant de difficultés à trouver un emploi, si ce n’est plus, bien qu’ils disposent d’une solide formation doublée de longues expériences. Leur âge et leurs (prétendues) prétentions salariales handicapent leur réinsertion. Passé 50 ans, et plus encore 55 ans, leur retour à l’emploi est compromis. Pour beaucoup, il est improbable !
Alors qu’un jeune de 25 ans décrochera un jour ou l’autre un contrat qui lui donnera satisfaction, à mesure que passent les mois et les années, le Senior, lui, voit s’éloigner cette perspective. Cette discrimination à l’embauche est d’autant plus préoccupante que l’on repousse l’âge de départ à la retraite. Ces chômeurs «trop vieux» doivent pourtant encore travailler 10 ou 15 ans.
Dans sa version initiale, le projet de Loi Travail visait à faciliter les licenciements en plafonnant les indemnités prud’homales accordées au salarié quand la Justice sanctionne une rupture de contrat sans cause réelle et sérieuse. Si les jeunes ont dénoncé cette facilitation synonyme de précarisation, elle concerne avant tout leurs aînés en poste depuis 10 ans ou plus dans une entreprise.
Pour un travail équivalant, un employeur a tout intérêt à se séparer à moindres frais d’un collaborateur âgé, plus avantageusement rémunéré qu’un jeune salarié. Dans l’absolu, plafonner les indemnités de licenciement abusif ou insuffisamment justifié pourrait encourager les entreprises connaissant une baisse d’activité à se débarrasser de leurs collaborateurs seniors. Écrit autrement : le plafonnement peut favoriser, à terme, l’embauche des jeunes.
Depuis 2004, Actuchomage fait de l’emploi des Seniors son principal cheval de bataille sans que nous constations la moindre amélioration. Au contraire, la situation se dégrade. Le sous-emploi des 50 ans et + poursuit son inexorable progression (lire en commentaire). La course au «jeunisme» dans les entreprises s’accélère avec pour corollaire les discriminations à l’embauche des travailleurs très expérimentés.
Au registre des réjouissances s’en ajoute une nouvelle : une possible facilitation des licenciements qui impacterait avant tout les collaborateurs les mieux rémunérés pour un travail équivalant, donc les plus âgés.
Yves Barraud
NB : Actuchomage consacrera prochainement un dossier à l’immersion professionnelle des + de 45 ans au chômage.
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