Il s’agissait en fait de proposer "aux heureux élus", tous diplômés de moins de 31 ans (bac + 4), un parcours d’accompagnement dans l’emploi : toujours le même principe, si les chômeurs ne trouvent pas d’emploi, c’est un problème individuel, de bonne présentation ou de motivation...
Une quarantaine de chômeurs et précaires sont convoqués pour 16H45 dans les locaux du Conseil Général (communiste) : apparemment plusieurs autres séances d’environ une heure trente ont eu lieu dans l’après midi, donc très certainement plusieurs centaines de convoqués... et combien de radiés pour absence à convocation ? D’ailleurs, dès l’entrée, le ton est donné : une dame nous enjoint de prendre absolument le petit questionnaire et de le rendre "sinon vous serez radiés".
La directrice de l’ANPE Saint-Ouen est en retard, elle a le droit, elle, ce qui nous laisse le temps de lire les deux feuillets qui nous sont remis avec le questionnaire.
Ces deux feuillets décrivant la prestation proposée seront ensuite projetés morceaux par morceaux sur un écran diapo, et leur lecture constituera l’essentiel de cette réunion d’information. Leur envoi par la poste aurait donc suffi pour que chaque précaire ait connaissance de ce partenariat MEDEF/ANPE : mais l’objectif est bien de convoquer et de radier en masse ; pas d’informer ou de conseiller. D’ailleurs, malgré nos questions précises, il sera impossible de savoir ce que recouvre cette prestation qui dure neuf mois.
Le résultat de l’année dernière ? L’ANPE annonce 72 contrats de travail sur 180 (?) personnes qui ont suivi le dispositif ; comme d’habitude, impossible de connaître la proportion de CDD et de CDI, celle des contrats aidés (le prospectus parle cependant d’une prestation : Savoir proposer un CIE - Contrat Initiative Emploi). Impossible aussi de savoir combien de ces emplois retrouvés l’ont été du fait de la prestation ou d’autres démarches.
Le contenu de cette prestation ? L’ANPE est incapable de donner la liste des entreprises participant au dispositif, seuls la connaîtront ceux qui se seront déjà inscrits.
Interrogée par une demandeuse d’emploi sur les secteurs concernés, l’ANPE répond "Euh, à peu près tous". Sur le questionnaire figure une question "Cherchez-vous un emploi à titre alimentaire ?" En clair, avez-vous tellement besoin de bouffer qu’on puisse vous proposer n’importe quoi...
Incapable aussi de nous expliquer ce que la prestation offrira de plus que celle de l’ANPE : il s’agit, nous dit la directrice de l’ALE Saint-Ouen, "d’une approche différente de la recherche". Il y aura donc un parrainage, pour certains par des chefs d’entreprise : parrainage ne signifie pas embauche, mais le patron vous présentera à d’autres patrons.
Il y aura des discussions informelles à 25 avec des chefs d’entreprise, "plus conviviales".
Il y aura - évidemment - des ateliers CV, présentation de soi, préparation à l’entretien, du vent donc, pardon du coaching : interrogée sur la signification de ce mot, notre directrice nous informe que le MEDEF dans sa grande générosité fournira lui même des "coachs", l’ANPE rémunérant les autres.
Il y a aussi le remplissage d’un CV original ou figure notamment une case "vos fiertés personnelles" et une autre "Que serez-vous dans cinq ans ?" : n’écrivez pas chômeur, trop défaitiste, ni "président de la République", trop exigeant : le coach vous indiquera les bonnes réponse… "RMAste en CDI dans le bâtiment" ou "Bac + 6 coincé dans un CDD au Smic".
Pressée de questions, la directrice de l’ANPE, après avoir prétendu que ce n’est pas le MEDEF qui convoque, reconnaîtra que l’association "Nos quartiers ont du talent" a bien été créée par le MEDEF 93, sans vouloir préciser si cette association bénéficie de financements publics.
A part nous, peu de précaires interviendront en pour ou en contre : deux personnes cependant nous demanderont d’arrêter de poser des questions "pour pouvoir partir plus vite"...
A la sortie, cependant, nous engagerons quelques discussions : la plupart des présents sont conscients de l’inutilité de la séance, certains vont quand même tenter mais s’inquiètent des conséquences en cas d’abandon en cours de route. Ils ont raison car si l’association ne peut pas radier, l’ANPE s’en charge généralement en invoquant le refus de prestation, ou l’insuffisance de recherche d’emploi.
Comme à chaque convocation collective, certains des convoqués sont déjà en emploi ou en formation...
Ces convocations collectives sont en tout cas une arme à retourner contre l’ANPE, puisqu’elles nous donnent l’occasion de nous retrouver nombreux entre concernés !
Collectifs AC! - 23 bis rue Mathis 75019 Paris
Tel : 01 40 09 27 49 / www.ac-reseau.org
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