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Au total, ce sont donc 16.501 chômeurs belges qui se sont retrouvés dans le colimateur général, et dont le quart a été "puni" par ses soins.
Nous avions vu comment l'Autriche traite ses chômeurs et comment l'Allemagne maltraite les siens. En Belgique, la stigmatisation et les sanctions vont aussi bon train !
La Belgique n'est pas épargnée par le chômage de masse : à la fin du mois de janvier, l'ONEM recensait 465.882 demandeurs d'emploi indemnisés pour un taux officiel de 7,7%. La Belgique - comme la France… - se vante d'un taux de chômage en baisse constante depuis quatre ans, et ce grâce à une croissance économique soutenue (3% en 2006).
Malheureusement il ne baisse pas à Bruxelles, et le chômage de longue durée - 2 ans et plus - est même reparti à la hausse avec 236.453 chômeurs, soit la moitié des demandeurs d'emploi comptabilisés. Il est facile d'imaginer que les 4.000 sanctions infligées ciblent particulièrement cette catégorie à laquelle on ne doit proposer que des petits jobs sous-payés et déclassés qui ne peuvent certainement pas la sortir de sa situation.
Mais de là à soupçonner qu'il y aurait plus de 16.000 chômeurs belges, majoritairement wallons, qui refuseraient carrément de travailler, le postulat semble extraordinairement abusif. Et la haine contre ces "profiteurs" semble tout aussi ancrée dans la population : lire les commentaires de cet article de 7SUR7 («Vous n'avez que le mot victime à la bouche, mais ils sont loin d'être victimes, ils connaissent les ficelles pour "palper du blé sans rien glander" puis se servent de la victimisation comme d'un bouclier. Soyons plus ferme avec les sangsues», écrit un internaute)... Consternant !
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Commentaires
La Belgique a de fait instauré ce qui est communément appelé "la chasse aux chômeurs", qui consiste à convoquer les chômeurs de longue durée (deux ans et plus de chômage) afin d'évaluer leurs activités de recherche d'emploi. Le chômeur en question est convoqué par l'ONEM et doit prouver qu'il met bien tout en oeuvre pour se réinsérer sur le marché de l'emploi. Le chômeur doit se rendre chez un "facilitateur" qui remplit un dossier et "évalue" si vous faites bien tout ce qu'il faut.
Si le "facilitateur" estime que ce n'est pas assez, un plan est proposé au chômeur et, de fil en aiguille, le chômeur peut être suspendu de toute indemnité ! Le problème, c'est qu'il y a une large partie de subjectivité et que tout le monde n'est pas égal devant le chômage. Mais tout le monde est mis dans le même sac. Or il y a tant de critères qui font que l'on peut ne pas retrouver un emploi facilement : l'âge, le niveau d'études, la formation, le parcours professionnel, l'environnement familial, la santé.
Beaucoup partent en effet du triste postulat mentionné dans l'article ci-dessus : le chômeur est un parasite qui passe son temps, non pas à chercher un emploi, mais à tout faire pour ne pas en trouver et profiter des allocations de chômage + familiale.
Il faut aussi savoir que la Belgique est le seul pays européen à octroyer des allocations de chômage illimitées dans le temps. Ce qui a d'ailleurs récemment lui valu des remontrances de la part de l'OCDE…
Mais ce qu'il faut également savoir, c'est que les allocations sont très peu élevées et diminuent fortement après la première année d'inactivité. Aucun organisme ne prend en charge une partie du loyer et il n'y a pas toutes les aides qui existent dans d'autres pays.
Viennent se greffer là-dessus les problèmes communautaires. Le chômage est plus élevé en Wallonie qu'en Flandre pour des raisons économiques et structurelles. Le Wallon est depuis longtemps étiqueté "feignant" et "profiteur" par opposition au Flamand "travailleur" et "courageux". No comment… Ce cliché est ancré de longue date - et entretenu par les médias flamands, voire certains politiciens. D'où les commentaires qui fleurissent dans la presse et qui émanent de personnes qui sont à mille lieux de vivre l'enfer du chômage et des fins de mois qui débutent le 15.
Bref, ça craint aussi en Belgique. Il arrive que l'ORBEM propose des emplois. Le DE est alors obligé de se rendre chez l'employeur potentiel et, le cas échéant, ne peut refuser l'emploi, même s'il est sous-payé, même si c'est un mi-temps, un quart-temps etc. Si le DE refuse, son dossier est transféré à l'ONEM qui peut procéder à des sanctions (suspension des allocations, voire suppression pure et simple).
A terme, la Belgique veut s'aligner sur ses voisins européens en supprimant les allocations illimitées. "La chasse aux chômeurs" est un premier pas. Reste à savoir ce qu'il adviendra des DE laissés sur le carreau. Car il faudra que le gouvernement trouve un moyen pour ne pas laisser "crever" ses chômeurs.
Ces récentes mesures font que le chômeur est encore davantage stigmatisé par l'opinion publique. Car qui dit "chasse", dit forcément "gibier". En Belgique non plus, il n'est pas bon de perdre son emploi. Répondre | Répondre avec citation |
Pour un pays qui a 7,7% de chômage, je trouve que le prétexte des allocations illimitées ne pèse finalement pas tant que ça dans la balance de la fainéantise : si les chômeurs belges étaient vraiment des parasites, le taux de chômage serait à plus de 10% et la chasse aux chômeurs profiteurs se justifierait peut-être.
Mais ce n'est pas le cas. On a ici un taux de chômage qui se situe dans la moyenne européenne, inférieur à ceux de la France et de l'Allemagne. On voit bien que c'est un faux prétexte.
Cela me rappelle ce texte de Laurent Cordonnier du Monde Diplomatique : Les allocations chômage créent-elles du chômage ? où justement les théories de l'OCDE là-dessus ne se vérifient absolument pas. Répondre | Répondre avec citation |
Patrick, un autre lecteur belge, nous signale qu'il existe un collectif qui lutte contre cette politique de sanctions : www.stopchasseauxchomeurs.be Répondre | Répondre avec citation |
Par chômeurs complets indemnisés, l'ONEM entend aussi bien les demandeurs d'emploi classiques que des non demandeurs d'emploi ayant droit à des allocations. Dans ce dernier cas, on pense à des personnes dispensées de travail pour des raisons sociales ou familiales (9.250 personnes), les chômeurs de 50 ans au moins (116.169) et les prépensionnés à temps plein (111.069).
Depuis 2004, l'ONEM est chargé de l'«activation du comportement de recherche d'emploi» du chômeur complet. L'Office doit ainsi évaluer les efforts que fournit le chômeur pour se réinsérer sur le marché du travail. Près de 375.000 personnes (52% de Wallons, 31% de Flamands et 16% de Bruxellois) ont ainsi reçu un ou plusieurs avertissements.
Un entretien a été organisé pour près de 200.000 chômeurs. 153.000 se sont présentés. Si pour 84.000 d'entre eux, les efforts accomplis ont été jugés positivement par l'ONEM, quelque 50.000 ont été obligés de passer un contrat. Répondre | Répondre avec citation |