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Pétrole : la spéculation bat son plein

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Le pétrole justifie chaque jour davantage son surnom d’«or noir». Depuis quelques semaines, son prix affole les marchés. Depuis octobre, le light sweet crude à New York a bondi de plus de 20 dollars. Mercredi 21 novembre, le prix du baril de brut a atteint 99,29 dollars sur le marché américain avant de terminer à 97,35 dollars. Pendant plusieurs heures, seuls quelques cents l'ont séparé du seuil symbolique et inédit des 100 dollars.

S'agit-il de pure spéculation, comme l'a laissé entendre l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) ? Lors de son sommet de Riyad, samedi 17 et dimanche 18 novembre, elle a estimé que l'envolée des cours n'était pas sa faute mais celle des financiers. Notamment celle des fonds spéculatifs, les hedge funds.

Pour les experts, cette assertion n'est que partiellement vraie. "La spéculation force le trait", reconnaît Hervé Lievore chez Axa IM, mais elle n'est pas responsable à elle seule de la flambée des prix. Les cours s'envolent, car le marché redoute une pénurie de l'offre alors que la demande augmente irrésistiblement avec la consommation de pays émergents comme la Chine. Structurellement, les prix montent. Les fonds spécialisés "accompagnent et amplifient la tendance", estime Noël Amenc, professeur de finance à l'Ecole des hautes études commerciales (Edhec) et spécialiste des hedge funds. Pour Stephen Thornber, analyste chez Threadneedle, la spéculation renchérirait le baril "de 15 à 20 dollars". Moncef Kaabi, analyste chez Natixis, évoque 25 dollars.

Chiffrer l'ampleur de la spéculation est un exercice délicat, voire "impossible", admet M. Lievore. Mais une chose est certaine : depuis cinq ans, les fonds spéculatifs sont là. "Leur présence se voit, car il y a désormais des acheteurs sur le marché à terme (qui parient sur une hausse des cours) jusqu'à dix-huit mois plus tard", indique M. Thornber. Les industriels, eux, achètent pour consommer dans un délai de deux à trois mois maximum.

SPÉCULATION

Les hedge funds sont très actifs sur le pétrole mais aussi, souvent, sur les autres marchés de l'énergie comme le gaz et les matières premières (or, céréales…). Kostas Iordanidis, gérant d'un fonds de fonds chez Olympia, évalue leur nombre à 600. La plupart sont très discrets, mais certains se sont distingués par leurs performances spectaculaires avec "des rendements supérieurs à 100% l'an", glisse M. Iordanidis. Les fonds BP Capital, AAA, Merchant Commodity, Armajaro Commodity sont les plus célèbres. Depuis 2001, l'industrie des hedge funds aurait aussi récupéré la plupart des meilleurs spécialistes du courtier en énergie Enron, disparu après un scandale financier retentissant en 2001.

L'arrivée des fonds spéculatifs sur le marché du pétrole n'est pas un hasard. "Ce sont des gestionnaires intelligents et opportunistes", juge M. Thornber. Et "ce marché a les caractéristiques idéales" pour gagner de l'argent, indique Graham Birch, gérant pour un fonds de BlackRock. A commencer par celle d'une tendance forte, nourrie par la pénurie anticipée de l'offre. "L'OPEP sera incapable de faire face à la demande" dans quelques années, avance un gérant. En outre, les fonds sont très friands des "anomalies" qui règnent sur les échanges de pétrole et de la volatilité qu'elle provoque. "L'information y est imparfaite comme sur les autres marchés de matières premières", réplique M. Lievore chez Axa IM. Très réactifs et informés, les fonds parviennent ainsi à engranger des profits en anticipant mieux que les autres les évolutions des cours.

Enfin, alors que le dollar est en chute libre, le pétrole fait de plus en plus office de valeur "refuge". Et les turbulences apparues depuis cet été sur les marchés du crédit ont incité les hedge funds à se recentrer sur des domaines plus porteurs, comme les matières premières et le pétrole.

La spéculation semble donc partie pour durer. A moins que le seuil psychologique des 100 dollars ne représente un plafond. S'il est dépassé, il pourrait alors déclencher des ventes en chaîne. "Si un signal de baisse se confirme, les fonds vendront pour éviter de plonger", atteste M. Amenc. Les prix pourraient alors retomber à un niveau estimé par les analystes entre 70 et 80 dollars le baril. Pour Eric Chaney, économiste en chef chez Morgan Stanley Europe, il pourrait même chuter en dessous de 50 dollars dans les deux ans à venir.

(Source : Le Monde)

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Mis à jour ( Jeudi, 22 Novembre 2007 16:42 )  

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