Ce rapport N°276, réalisé au nom de la Commission des Finances, de l'Economie générale et du Plan sur le projet de loi de finances pour 2008 (n°189) par M. Gilles Carrez, rapporteur général et député UMP, s'inspire de l'exemple britannique pour orchestrer la fusion ANPE-Unedic, en vantant les méthodes des Jobcentres Plus.
Lire des pages 19 à 21 => a) Un meilleur service rendu aux demandeurs d’emploi… b) avec pour contrepartie un contrôle accru. Extraits :
La fusion des anciennes Benefit Agencies (agence des prestations sociales) et des anciens Job Centres, lancée en 2002 et effectuée en quatre ans, a été centrée sur la qualité du service rendu aux «clients» (les demandeurs d’emploi). Leur premier contact avec le système se fait par un entretien téléphonique détaillé, à la suite duquel ils reçoivent un dossier de demande de la prestation financière à laquelle ils ont a priori droit et sont convoqués au centre dans les quatre jours. Ils sont suivis par un référent individuel, qui ne suit en principe qu’une trentaine de personnes.
S’y ajoutent les programmes New Deal, qui permettent un accompagnement renforcé (deux entretiens approfondis par mois) pour des publics cibles : jeunes de 18 à 24 ans dépassant les six mois de chômage, demandeurs de plus de 24 ans dépassant 18 mois de chômage, par exemple.
[...] Il convient de relever que le Royaume-Uni est allé très loin dans la politique du guichet unique puisque les Jobcentres Plus sont compétents pour la quasi-totalité des prestations sociales versées aux personnes d’âge actif. C’est, pour simplifier, comme si en France un seul guichet assurait les missions de l’ANPE, de l’Assedic, de la Caisse d’allocation familiale, des missions locales, des services sociaux du département, etc.
b) … avec pour contrepartie un contrôle accru
En contrepartie de ce service de qualité, le système est exigeant à l’égard des demandeurs d’emploi :
– ils signent un contrat lors de leur premier entretien approfondi au centre
– ils doivent se présenter physiquement tous les quinze jours pour un court entretien permettant de vérifier leur disponibilité et la recherche active d’emploi ;
– le versement des allocations peut être suspendu en cas de non respect de leurs obligations, pour une durée plus ou moins longue (de 1 jour à 26 semaines).
Le recours à la sanction est beaucoup plus fréquent qu’en France. Les fonctions de placement et d’indemnisation étant assurées par le même organisme (qui verse également toutes les autres prestations sociales), celui-ci est en mesure d’avoir une vision complète des ressources du demandeur d’emploi, qui ne peut s’adresser à d’autres guichets. Le Jobcentre Plus peut ainsi réellement lier l’allocation à la recherche active d’un emploi. En outre, l’allocation logement britannique n’est jamais remise en cause par les sanctions : cela permet d’avoir une politique de sanction plus ferme en ce qui concerne le volet allocation chômage.
En pratique, la plupart des sanctions sont prononcées au début de la période d’indemnisation (24% le sont lors des deux premières semaines et 41% le premier mois) et concernent les demandeurs d’emploi les plus jeunes (42% des demandeurs sanctionnés ont entre 18 et 24 ans, alors qu’ils ne représentent que 28% des bénéficiaires de l’allocation chômage). En outre, seuls 25% des demandeurs font l’objet de plus d’une sanction. Ces constatations illustrent l’efficacité du dispositif : la période d’apprentissage du fonctionnement du système achevée, les demandeurs se plient, dans leur intérêt, aux obligations de recherche active qui leur sont imposées.
La réforme britannique a ainsi accompagné l’amélioration de la qualité du service rendu aux demandeurs d’emploi par des obligations, assorties de sanctions. Il est essentiel de lier ces deux aspects.
c) En comparaison, un système français de contrôle complexe et faible
[...] Le nombre de contrôles et de sanctions reste particulièrement faible par rapport à nos partenaires. Comme le souligne l’indicateur de performances n°2.3 du projet annuel de performances, les contrôles effectués par les directions départementales du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP) ont concerné, en 2006, 0,3% des demandeurs indemnisés par le régime d’assurance chômage et 1% de ceux indemnisés par le régime de solidarité. Les chiffres devraient être à peine supérieurs en 2007 : 0,5% pour le régime d’assurance chômage et 1,3% pour le régime de solidarité. La cible fixée pour 2010 reste d’ailleurs très faible : 1% pour le régime d’assurance chômage et 1,8% pour le régime de solidarité. Cette situation contraste fortement avec celle observée chez nos voisins : le taux de sanction était, par exemple, de 4,2% en Belgique et au Danemark et de 10,3% au Royaume-Uni en 1998.
La fusion devra s’accompagner d’une réflexion, avec les partenaires sociaux, sur les sanctions à appliquer lorsqu’un demandeur refuse deux «offres valables d’emploi» – concept qui devra notamment être précisé, en s’inspirant des définitions retenues par nos partenaires. Ce devrait être au nouvel organisme de prononcer ces sanctions. Il serait utile de s’inspirer du système britannique sur ce point. Les sanctions y sont d’autant plus facilement prononcées, dans le propre intérêt du demandeur, que les agents chargés de les appliquer savent qu’elles ne conduiront pas celui-ci vers l’exclusion, l’allocation logement n’étant jamais remise en cause. En France, une partie de l’allocation chômage pourrait, sur ce modèle, être «sanctuarisée» (sauf en cas de fraude grave) afin de faciliter le prononcé des sanctions, qui ne pourraient porter que sur l’autre part de l’allocation.
La notion d’emploi convenable dans les autres États membres
[...] Au Royaume-Uni, en revanche, il n’existe pas de définition explicite de l’emploi convenable. Les textes prévoient néanmoins que le demandeur d’emploi a le droit de ne chercher que certains types d’emplois pendant une période limitée qui peut durer de une à treize semaines. Mais il ne peut définir seul les types d’emplois en question. Il doit faire la preuve, lors du premier entretien au Jobcentre Plus, qu’il a des chances raisonnables de sortir du chômage en se limitant à ces types d’emplois. Si l’épisode de chômage se prolonge, le demandeur d’emploi doit élargir ses recherches. En particulier, après six mois de chômage, il ne peut plus refuser un emploi en raison de sa rémunération.
.../...
Donc c'est clair : d'une part on ne sanctionne pas assez nos fainéants de chômeurs, même si en France n'y a toujours pas d'emplois décents pour tout le monde. D'autre part, il n'y aura peut-être pas de définition de «l'offre d'emploi valable» ou «convenable» : elle sera tout juste «acceptable». Et l'organisation du contrôle social de masse a de beaux jours devant lui : concrètement, tout cela signifie que l'ensemble de votre vie (travail, argent, impôts, logement, santé, famille) sera contrôlé par un référent tout puissant qui sera chargé de vous autoriser ou non un emploi. On atteint là des summums de perversité !
St Dumortier
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• Du contre-espionnage au contrôle social, la réalité britannique : désormais passé au détecteur de mensonge, le chômeur perçoit une allocation de 350 € par mois pendant 6 mois maximum - peu importent son ancienneté et son salaire antérieurs -, ce qui fait de lui le demandeur d'emploi le plus traqué, le plus soumis et le plus pauvre d'Europe ! Bientôt chez nous...
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