Après des années de vaches maigres, les salariés sont bien décidés à profiter du retour à la croissance. 80% des Allemands estiment ne pas avoir jusqu’à présent bénéficié de l’amélioration économique. Et 67% sont favorables à l’instauration d’un salaire minimum valable pour toutes les branches, un sujet très sensible, qui se heurte au refus obstiné des patrons et d’Angela Merkel.
Joli pataquès. L’instauration d’un salaire minimum pour les facteurs (8 € de l’heure en ex-RDA, 9,80 € à l’ouest du pays), votée le 14 décembre par les députés du Bundestag après d’âpres négociations entre les sociaux et les chrétien-démocrates au pouvoir a causé un joli pataquès. Les deux principaux concurrents privés de la Deutsche Post ont ainsi annoncé hier qu’ils continueraient à payer leurs salariés entre 6,50 et 7,50 €, au risque d’aller devant les tribunaux.
Traditionnellement, le gouvernement allemand se tient en effet à l’écart de la politique salariale, dont les grandes lignes sont directement négociées par le patronat et les syndicats. L’Etat peut tout au plus être appelé par les partenaires sociaux à «corriger» les choses lorsqu’un secteur de l’économie pratique des salaires «indécents». Gerhard Schröder avait ainsi imposé un salaire minimum dans le bâtiment et le nettoyage industriel à la demande du patronat, inquiet de la concurrence bon marché des pays de l’Est.
Depuis, les inégalités entre salariés n’ont cessé de se creuser. Aujourd’hui, 21% des salariés allemands ne peuvent vivre de leur salaire, selon l’institut de recherche sur le travail (IAT). Au hit-parade des emplois les plus mal payés, on trouve les coiffeuses est-allemandes (2,75 à 3,05 € de l’heure, soit 400 € bruts par mois pour un temps plein !), le personnel de sécurité (moins de 5 € de l’heure), les bouchers charcutiers (5,70 €) et le personnel d’hôtellerie (entre 5,13 et 7,25 € de l’heure).
«Menace». A la veille d’importantes élections régionales (fin janvier en Hesse et Basse-Saxe) et à deux ans des législatives, le salaire minimum est devenu LE sujet qui fâche. Le ministre du Travail, Olaf Scholz (social-démocrate), y est favorable. Son collègue de l’Economie, Michael Glos (social-chrétien), estime lui que l’instauration d’un salaire minimum généralisé «menacerait des millions d’emplois». La CSU s’appuie sur les calculs de l’institut IFO, réputé proche du patronat, pour qui l’instauration d’un salaire minimum interprofessionnel se traduirait par la suppression de 1,9 million d’emplois.
Le Smic gagne pourtant du terrain. Les salariés des services de sécurité, du traitement des déchets et du travail temporaire pourraient prochainement bénéficier à leur tour d’un salaire plancher valable dans l’ensemble du pays.
(Source : Libération)
NDLR : Rappelons que l'Allemagne, première puissance économique d'Europe et 4e mondiale, reste l’un des six pays de l’UE27 où il n’existe pas de salaire minimum pour tous. Même les Etats-Unis en ont un… c'est pour dire !
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