En obtenant la signature très probable de quatre syndicats sur cinq, le gouvernement peut se féliciter de la bonne santé du dialogue social. Mais ce succès est également contraignant. «Avec trois syndicats sur cinq, nous aurions pu prendre quelques libertés par rapport au projet d'accord. Avec quatre signatures, cela est tout simplement exclu», reconnaît un conseiller de l'exécutif. «S'ils ont trouvé un accord, surtout s'ils sont nombreux à l'avoir signé, je ne vais pas, moi, ministre du Travail, casser ou changer leur accord» a confirmé Xavier Bertrand, chargé de transposer dans la loi les mesures finalisées vendredi. La perspective d'une approbation quasi unanime des syndicats interdit même toute initiative complémentaire, au moins quelques temps, ce qu'aurait souhaité une partie de la majorité.
Le projet est pourtant loin des objectifs que François Fillon avait assignés aux partenaires sociaux dans un document d'orientation datant du 18 juin 2007.
• «Instaurer un contrat de travail qui se substitue en tout ou partie aux formes juridiques existantes»
Dans son document d'orientation, le Premier ministre avait renoncé à évoquer le contrat de travail unique, qui faisait l'unanimité contre lui. Mais il avait encore en tête de simplifier le droit du travail, en réduisant la multitude de contrats existants. L'objectif, avait-il écrit, est de «lutter contre la segmentation du marché du travail en redonnant une cohérence d'ensemble aux différents contrats». Le projet d'accord ne prévoit rien de tel. Attaché aux CDD et au travail temporaire, le patronat a tenu à rappeler leur «utilité économique», dans un environnement «en perpétuelles fluctuations» et dans un contexte de «concurrence mondiale avérée». Au lieu de simplifier, les négociateurs ont instauré un nouveau contrat de travail, le «CDD à objet précis», à la fois plus long et plus souple que le CDD classique.
• «Développer les procédures alternatives à la saisine du juge»
Cet objectif a constitué l'un des fils directeurs de la négociation. Les partenaires sociaux ont créé un nouveau mode de rupture, dite «conventionnelle», censée réduire les contentieux prud'homaux. Au gouvernement, certains conseillers ne cachent pas leur embarras. En effet, la rupture de gré à gré ne privera pas le salarié du droit au procès, consacré par le Code du travail et la Convention européenne des droits de l'homme. Tout juste permettra-t-elle de renforcer la place du juge administratif par rapport à celle du juge prud'homal, la procédure étant validée par les services de l'Etat (Direction départementale du travail). Les partenaires sociaux demandent aussi aux pouvoirs publics de plafonner les indemnités en cas de licenciement abusif. En limitant la compétence des juges, cette demande peut sembler, elle aussi, juridiquement contestable.
• «Simplifier le dispositif d'assurance-chômage»
François Fillon avait demandé que soit revue la répartition des rôles entre le régime de solidarité, financé par l'Etat, et le régime d'assurance-chômage. Il a également invité à redéfinir l'«offre valable d'emploi» qu'un demandeur d'emploi ne pourrait durablement refuser sans perdre son droit aux allocations. Les partenaires sociaux ont reporté ces différents sujets au printemps prochain et se sont limités à quelques déclarations de principe. Il s'agira de «mieux indemniser les allocataires, pour des durées plus courtes», ont-ils précisé par avance. Des concertations doivent avoir lieu à Bercy dès le premier trimestre pour accélérer la réflexion.
• «Encourager la mobilité en préservant les droits liés à la situation précédente»
Les partenaires sociaux avaient pour tâche d'«encourager l'initiative et la mobilité, en garantissant le transfert des droits lors des changements de situation». Ce transfert des droits, limité dans le temps, ne pourra se faire qu'avec l'accord du nouvel employeur et ne concernera que le droit à la formation. Le gouvernement, qui a chiffré l'impact financier de la mesure, juge l'effort patronal «limité». Il espère aller plus loin dans les prochains mois.
(Source : Les Echos)
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