Alors qu'il annonçait provisoirement 39.400 créations de postes (dont 46% d'intérim…) dans le secteur marchand entre janvier et mars, voici qu'en réalité elles furent 70.700, soit quasiment le double. Quel miracle !
La progression est donc de 0,4% par rapport au trimestre précédent, et de 1,6% par rapport au 1er trimestre 2007. «Cela correspond à une économie qui fonctionne, qui tourne et qui crée des emplois», en conclut la ministre de l'Economie.
Dans le détail, c'est l'opacité la plus complète : on a beau chercher, on ne saura pas quelle est la teneur (CDI, CDD, intérim, temps plein, temps partiel ?) de ces créations nettes. Et aucune explication n'est fournie sur un tel écart entre l'estimation provisoire et le résultat définitif.
Pour l'Unedic, qui ne recense que les données des entreprises affiliées à l'assurance chômage, la hausse trimestrielle est de 0,3%, soit 55.900 postes dont 14.400 en intérim. Et on ne sait rien de plus sur la qualité de ces emplois.
Bref, on reste dans le flou : ça permet d'annoncer de «bonnes nouvelles» !
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Commentaires
(…) Ces révisions entre les chiffres provisoires et définitifs sont devenues quasi systématiques : les établissements de moins de 10 salariés, qui ne sont pas pris en compte dans le premier cas, sont en effet de plus en plus créateurs d'emplois.
(…) La prudence reste néanmoins de mise. Ces bons chiffres ne sont «pas durables» et ils ne disent rien sur la nature des emplois créés, rappelle Alexander Law (Xerfi). «Il ne faut pas s'emballer sur les chiffres du premier trimestre», renchérit Marc Touati (Global Equities). En effet, les emplois créés entre janvier et mars l'ont été, pour un quart, dans le secteur intérimaire (+ 14.500), rappelle l'Unedic qui s'attend, pour cette même raison, à une «forte décélération» au deuxième trimestre. Répondre | Répondre avec citation |
A quelques heures d'intervalle, la ministre de l'économie, un porte-parole de l'UMP et le chef du gouvernement s'en sont pris, vendredi 20 juin, aux "prévisions pessimistes" de l'Institut national de la statistique et des études économiques. Présentée jeudi, la dernière note de conjoncture de l'INSEE table pour 2008 sur une inflation à 3,2%, une croissance à 1,6% et une baisse du pouvoir d'achat par ménage (- 0,4%).
"Les prévisions de l'Insee sont comme d'habitude extrêmement pessimistes. On a vu ces derniers mois qu'elles ne se vérifiaient pas toujours", a dit François Fillon dans une allusion à la révision de la croissance 2007. "Ne me demandez pas de me passionner pour un document dont je sais qu'il sera révisé !", s'est exclamé Nicolas Sarkozy en marge du Conseil européen de Bruxelles.
Ces critiques, inhabituelles à la sortie des notes de conjoncture de l'Insee, entretiennent le doute sur le professionnalis me de cette institution, à un moment où le volontarisme du chef de l'Etat se heurte au retournement conjoncturel et aux contraintes d'une économie globalisée. "Il faut y voir une nouvelle manœuvre destinée non pas à casser mais à décrédibiliser le thermomètre de la conjoncture que constitue l'Insee", estime Michel Sapin, député de l'Indre et secrétaire national du PS à l'économie. "Il s'agit d'un raisonnement politicien primaire face à l'absence cruelle de marges de manœuvres budgétaires", ajoute l'ancien ministre socialiste des finances.
Trois types de critiques sont formulés par la droite : l'Insee réviserait trop souvent ses statistiques, ferait des prévisions d'inflation trop "sombres", et omettrait de tenir compte des "effets de la politique volontariste du gouvernement".
Qu'en est-il réellement ? La révision régulière des statistiques, aussi inconfortable soit-elle pour un gouvernement, est normale. Tous les statisticiens publics européens procèdent de la sorte. "Les comptes nationaux passent leur temps, par construction, à réviser leurs chiffres, à mesure qu'ils engrangent des données plus précises", expliquait au Monde, le 16 mai, Fabrice Lenglart, responsable de ce département. Les révisions de la croissance "trouvent leur source pour l'essentiel dans la difficulté à 'capturer' en temps réel l'évolution des revenus des entreprises et, en contrepartie, de leurs investissements ", avait indiqué, le 20 mai, Jean-Philippe Cotis, directeur général de l'Insee. "Nos équipes travaillent d'arrache-pied […] pour améliorer la robustesse des premières livraisons des comptes nationaux", avait-il ajouté, alors que l'institut sortait de mois de polémiques sur la fiabilité de son enquête Emploi.
Péché par optimisme. Sur France Info, vendredi matin, la ministre de l'économie Christine Lagarde a jugé la note de conjoncture "sombre" sur l'inflation. "Cela ne me paraît pas justifié par l'évolution que nous constatons actuellement sur le marché", a-t-elle précisé. Ce n'est pas une mince critique pour un ministre qui a la tutelle de l'Insee. Frédéric Lefebvre, ancien directeur de cabinet de M. Sarkozy à l'UMP, porte-parole du parti, est allé plus loin en assurant que "les chiffres retenus en matière d'inflation sont au-delà des prévisions de tous les experts". C'est inexact : si les Consensus Forecasts du 9 juin tablent sur une inflation moyenne à 2,9% en France (contre 2,2% selon le gouvernement), BNP Paribas prévoit 3,3% et Goldman Sachs 3,2%, comme l'Insee. Si l'Insee a péché depuis décembre 2007, c'est par optimisme : l'institut a dû revoir à la hausse ses prévisions d'inflation en raison de l'envolée des prix du pétrole.
Quant à l'accusation implicite de malhonnêteté formulée par M. Lefebvre, elle ne résiste pas à l'examen des faits. Contrairement à ce qu'a écrit l'élu UMP, la révision de la croissance 2007 ne s'explique pas par la prise en compte tardive de la loi sur le travail, l'emploi et le pouvoir d'achat (Tepa). Le 28 mars, l'Insee donnait la croissance 2007 à 1,9%. Le 15 mai, il la rectifiait à 2,2% à partir de révisions portant pour une large part sur le premier semestre et qui ne doivent donc rien à la détaxation des heures supplémentaires , entrée en application en octobre 2007.
Quant à la loi sur la modernisation de l'économie, elle serait, selon M. Lefebvre, "insuffisamment" prise en compte par l'Insee. "En réalité, nul ne sait évaluer l'effet final sur les prix du projet de loi de modernisation de l'économie", déclarait au Monde du 13 juin l'économiste Philippe Askenazy, directeur de recherche au CNRS, qui a conduit des travaux sur la grande distribution.
(Source : Le Monde) Répondre | Répondre avec citation |