Le projet de loi généralisant le RSA au 1er juillet 2009, qui était à l'ordre du jour de la session extraordinaire du Parlement et dont l'examen devait commencer mardi après-midi, puis mercredi, est finalement repoussé à jeudi. Et si son examen ne commence pas jeudi, il pourrait être reporté à la semaine du 7 octobre (date à laquelle il devait faire l'objet d'un «vote solennel») afin de ne pas «saucissonner» le texte, explique-t-on de source parlementaire. Car les députés commencent rarement à débattre d'un texte le vendredi.
Désordre à l'Assemblée
Dans le cadre de cette session extraordinaire, était aussi inscrit à l'ordre du jour le projet de loi sur les «revenus du travail», qui inclut notamment des réformes autour de la participation et l’intéressement des salariés ainsi que sur la revalorisation du Smic. Un texte défendu, au nom du gouvernement, par le ministre du Travail Xavier Bertrand.
Or tout a (mal) commencé, dès mardi matin, à cause de l'intéressé qui n'en finissait pas de prendre son petit-déjeuner à la buvette de l’Assemblée... Du coup, la séance s'est ouverte avec vingt minutes de retard. «Xavier Bertrand est allé à la buvette parce qu'il n'avait pas de majorité dans l'hémicycle», s'est amusé le député de l'Aisne Jean-Pierre Balligand (PS). Selon les socialistes, à l'ouverture de la séance, n'étaient présents que deux députés de droite contre une dizaine de députés de gauche. Pour protester contre ce retard, l'opposition a multiplié les rappels au règlement et les demandes de suspension de séance. «C'est vraiment très incorrect», a protesté Jean-François Copé, le président du groupe UMP. Quant à Roger Karoutchi, le secrétaire d'Etat chargé des Relations avec le Parlement, il s'est dit «affligé».
S'est engagée ensuite une farouche bataille d'amendements autour du projet de loi de Xavier Bertrand. Entamée lundi soir, la discussion n'a jusqu'ici permis d'adopter que deux des cinq articles du texte. Mercredi, à la mi-journée, plus de 1.400 amendements restaient à débattre, soit seulement 400 de moins que ceux de la veille !
«Un pur travail d'obstruction»
Un contretemps que n'a pas manqué de dénoncer Jean-François Copé : «On recommence cette session parlementaire dans des conditions caricaturales. Les socialistes sont tellement perdus en termes de ligne politique que, pour donner le change, ils se lancent dans l'obstruction», a-t-il déclaré en recevant quelques journalistes dans son bureau de l'Assemblée nationale aux côtés de Xavier Bertrand, indigné.
Le secrétaire d'Etat à l'Emploi, Laurent Wauquiez, a pour sa part accusé le PS de se livrer à un «pur travail d'obstruction», lançant en pleine séance : «J’espère que votre objectif caché n'est pas de repousser le débat sur le RSA».
«Un plan caché»
«La vérité, c'est que les députés PS ne veulent pas du RSA car c'est le constat de l'échec de la réforme du RMI. C'est un plan caché pour empêcher la mise en œuvre d'une réforme indispensable», a accusé Jean-François Copé. Xavier Bertrand a lui aussi dénoncé «l’attitude inadmissible et illisible vis-à-vis de l'extérieur d'un parti et de députés socialistes aux abois, qui cherchent à prendre en otage des textes attendus par les Français».
«Ils nous auront tout fait», a par ailleurs renchéri Frédéric Lefebvre, député et aboyeur (pardon, porte parole) de l’UMP : «Un quorum [procédure qui demande de compter le nombre de parlementaires], des rappels aux règlements, une suspension de séance… (...) Le débat sur le RSA est repoussé, en espérant que la gauche arrête cette bataille stérile. Les socialistes ne pensent qu’à une chose : le premier secrétariat, et montrer qu’ils sont contre Nicolas Sarkozy».
Les socialistes réfutent
Au lieu d’obstruction, ils affirment — au contraire — qu'en présentant des amendements sur la suppression du bouclier fiscal, la réduction de la TVA, la revalorisation du Smic ou le conditionnement des bonus ou des stock-options, ils luttent vraiment en faveur du pouvoir d'achat des salariés français.
«C'est vous qui avez choisi de ne pas mettre le RSA au début de la session extraordinaire. Si le RSA était un texte important, alors il fallait commencer par là», a répondu le socialiste Alain Vidalies à Laurent Wauquiez. Des propos vifs ont aussi été échangés, par exemple lorsque Jean Mallot (PS) a ironisé sur le fait que Jean-Pierre Soisson (UMP) «se réveillait deux fois dans l'après-midi, c'est bien».
En attendant, c'est Martin Hirsch qui doit passer de bien mauvaises nuits, lui qui rêve de passer à la postérité avec son usine à gaz, fort malmenée par cette tourmente parlementaire. Rions-en un peu avant que d'en pleurer : c'est toujours ça de gagné, puisque nous avons beaucoup à perdre.
=> NOTRE DOSSIER sur le RSA
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