
Hélas, Geoffroy Roux de Bézieux a vite été surpris du peu de marge de manœuvre dont il devait disposer face au rouleau compresseur gouvernemental et aux positions bornées de son propre camp. Tel le roseau, il s'est plié. Tout juste a-t-il pu prendre une modeste revanche sur la contribution de 10% des recettes de l'Unedic exigée pour le fonctionnement de Pôle Emploi en faisant payer au prix fort la mise à disposition des locaux et du réseau informatique des Assedic dans le cadre de leur rapprochement avec l'ANPE : un joli pied de nez.
Mais Geoffroy Roux de Bézieux a aussi enchaîné quelques maladresses. Se substituant aux banques, il a pris l'initiative de donner un «coup de pouce exceptionnel» aux PME affiliées à l'Unedic, leur accordant des délais pour s'acquitter de leurs cotisations afin de les aider à affronter la crise financière : coût de l'opération, 12 millions d'euros. Puis il s'est honteusement fourvoyé, au cours d'une déclaration qui se voulait rassurante, sur «le chômage de masse» qui, tel le nuage de Tchernobyl, ne passerait pas au-dessus de la France... Suite à ces erreurs de jeunesse, il a pris ses distances et su se faire discret.
Le retour de «GRDB»
Cinq mois ont passé et le revoici sous les feux de l'actualité. D'un séduisant franc-parler, nettement plus convaincant que le gentil Laurent Wauquiez, il a d'abord estimé, le 1er mars à France Info, que les pronostics de l'Unedic sur le nombre de nouveaux chômeurs pour 2009 étaient franchement sous-évalués et, à contre-courant du Medef, avancé la nécessité de «réaugmenter» les cotisations chômage d'ici fin 2010. Jouant la carte de la transparence au micro d’Europe 1, il a osé dire «qu’on va vers quelques mois de chômage très violent» et «qu’il faudra cinq ans pour remonter cette crise qui est plus profonde et différente que les précédentes», reconnu que la fusion ANPE-Assedic s'est faite «très vite, à marche forcée» et avoué que le logo de Pôle Emploi a coûté la bagatelle de 500.000 €. «Dans la vitesse de la fusion, on a payé un peu cher», a-t-il concédé : ainsi dénonce-t-il de manière feutrée le prix de la précipitation sarkozyenne ?
Par contre, les couacs persistent quand il ose affirmer que 60% des demandeurs d'emploi sont indemnisés (en réalité c'est moins de 50% et, si le chômage a augmenté de 15% en un an, le nombre de chômeurs indemnisés n'a, lui, progressé que de 1% : cherchez l'erreur), qu'en France on est le pays d'Europe qui indemnise le mieux et surtout plus longtemps (c'est ignorer la Belgique et les pays scandinaves !), ou que le chômage partiel est «une bonne mesure» alors qu'elle n'est qu'un pis-aller. La cerise sur la gâteau se dessine, bien gluante, quand il nous sort avec optimisme que la prolifération des offres pour des contrats d'un jour constitue malgré tout «un marché [du travail] vivant»...
Ainsi va Geoffroy Roux de Bézieux, personnage atypique et, somme toute, plus sympathique que la moyenne. Son secret : une franchise pondérée qui inspire confiance, contrairement à d'autres qui échouent dans ce délicat registre. Ne nous leurrons pas : faux trublion plus obéissant que rebelle, à la fois anticonformiste et conservateur, Geoffroy Roux de Bézieux «joue son rôle», lui aussi… Mais, à l'inverse de Jean-Claude Trichet et consors, c'est son style qui le distingue.
SH
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Commentaires
Que d'éloge pour ce Monsieur…c'est bien ce qui était recherché…ils sont forts!
Il est beau, un beau sourire, sympathique, il parle comme le salarié…c'est de la com'…Le patronat communique sur une image conciliante…
A ne pas se tromper, la preuve…Il défend la ligne du patronat Répondre | Répondre avec citation |
Ceci n'est pas un "éloge" mais le portrait d'un personnage, dans toute son ambiguïté.
Dommage que tu n'aies relevé que ce qui est à sa décharge alors que ce qui est à charge est aussi relaté.
Comme tu le dis si bien à certains : RELIS. Répondre | Répondre avec citation |
C'est plus de la manipulation que le l'ambiguïté…
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C’est au Grand journal de Canal+ :
VISIONNER ICI
(émission du vendredi 13) Répondre | Répondre avec citation |
N'est-ce pas savoureux ce moment d'anthologie où Jean Michel Aphatie a la révélation par GRB que les 90 000+ chômeurs de plus en janvier est en fait un solde,
c'est à dire la différence entre le nombre de gens qui se sont inscrits au Pôle-emploi et ceux qui sont censés avoir retrouvés un emploi.
Sur son blog à propos du cas Total on peut lire:
Et puis, après avoir dénoncé, tempêté et hurlé, on a compris que les 555 suppressions de postes produiraient zéro chômeurs, que la disparition de ces postes commencerait en 2010 et s’étalerait jusqu’en 2013. Si tous les plans sociaux ressemblaient à celui là, franchement, nous serions des gens heureux.
Consternant.
Ces gens ne raisonnent plus qu'avec des chiffres et ne parviennent plus à voir derrière chaque cas de gens virés ce qu'il comporte de drame humain et financier, ils n'ont que les yeux braqués sur les chiffres du chômage.
Si 1000 personnes se font virer et que 1000 autres trouvent un emploi, cela relève du non-évènement pour ces gens qui n'ont qu'une vision globale des choses et se moquent des détails, c'est à dire la situation, des victimes des licenciements
En fait, qu'est-ce qu'ils en ont à faire du cas de ceux qui perdent leur emploi, eux ils ne risquent rien, ils sont bien payés et savent qu'ils n'auront jamais à franchir les portes d'une agence du Pôle-emploi et peut-être un jour se retrouver avec 400-450 euros pour vivre chaque mois. Répondre | Répondre avec citation |
Passer d'un emploi à l'autre en subissant précarité et déclassement, ça ne touche pas vraiment notre Chevalier blanc des PME.
Encore moins ces planqués d'Aphatie et Massenet qui ont qualifié les propos de Bernard Maris d’«idéalistes» et de «lunaires»… Ce sont pourtant eux, les minoritaires du pays, qui vivent sur une autre planète. Je te leur foutrais bien une petite «révolution culturelle» en les obligeant à vivre avec 400 € par mois pendant six mois (et encore, je suis cool) !
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