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De «la mauvaise politique de l'emploi»
En octobre dernier, annonçant le nouveau «plan emploi» du gouvernement, Laurent Wauquiez avait déclaré au micro de i>Télé qu'il fallait réfléchir aux contrats aidés «en ayant un raisonnement en terme de formation professionnelle» et de «vrais passerelles pour un emploi durable» dans les entreprises, «le but [n'étant] pas de faire des contrats aidés pour faire des contrats aidés».
Le problème numéro un, c'est que ces contrats — véritable maquis supposé se limiter au CIE pour le secteur marchand et au CAE pour le secteur non marchand depuis le Grenelle de l'insertion, il y a un an — tels qu'on les utilise aujourd'hui, participent à la banalisation du sous-emploi : ils coûtent une fortune à l'Etat et aux collectivités locales qui les subventionnent, servent à compenser les suppressions de postes dans le secteur public (scolaire, sanitaire et social…), sont une aubaine pour les employeurs et, majoritairement jetables, maintiennent les «bénéficiaires» dans la misère tout en ne remplissant que rarement leur fonction d'insertion. Le problème numéro deux, c'est que les régions fixent elles-mêmes leurs critères et que celles qui ne peuvent pas suivre financièrement tentent de réaliser des économies de bouts de chandelles.
Bien que dénoncée par Laurent Wauquiez, vu le marasme actuel, cette «mauvaise politique de l'emploi» ne risque pas de changer. En effet, lors du Grenelle de l'insertion, le territoire de Belfort avait fait valoir son CDAE (contrat départemental d’accès à l’emploi), initiative pilote de qualité lancée en 2005, qui ne prenait pas les chômeurs pour une variable d'ajustement et responsabilisait les employeurs. Hélas, cette formule réellement efficace et pleine de bon sens a été renvoyée aux calendes grecques, tout comme le «contrat unique d'insertion» censé assainir l'ensemble du dispositif. Preuve que les contrats aidés n'ont pour vocation que de servir de voiture-balai au chômage de masse et à la crise.
Une politique contre-productive
Revenons en Lorraine. Bénévole dans une association verte œuvrant dans le secteur du développement durable et qui aurait bien besoin d'un permanent, un chômeur à l'ASS découvre que l'arrêté préfectoral cité plus haut lui interdit de se faire embaucher en CAE par cette structure pour laquelle il offre ses compétences avec motivation. Nous avons affaire ici à une double absurdité : sont compromises non seulement l'occasion de créer un nouvel emploi (qui ne se substitue pas à un emploi public), mais aussi le développement d'une activité d'avenir (quid du Grenelle de l'environnement ???). D'un point de vue économique et social, ces restrictions sont totalement grotesques !
Non seulement l'attribution des contrats aidés ne devrait pas être arbitrairement fixée en fonction des publics, mais aussi tenir compte de la nature des postes à pourvoir. Loin des misérables emplois de service ou des jobs dans la sécurité privée qui caractérisent l'ambition ô combien limitée de Laurent Wauquiez, tous les secteurs d'avenir (développement durable, énergies renouvelables, éco-construction, AMAP…) doivent être privilégiés. Mais d'un gouvernement qui ne raisonne qu'à court terme, il est inutile d'espérer une lueur d'intelligence...
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Commentaires
Le plan de cohésion sociale qui devait tout simplifier au niveau des contrats aidés (en supprimant les CES) a, en fait, tout compliqué. On a d'un côté les contrats aidés réservés aux publics bénéficiaires d'un minima social (CAV et CI-RMA), et de l'autre les contrats aidés ouverts à tous (CAE et CIE).
Ce qui se passe dans beaucoup de régions, c'est que les bénéficiaires des premiers (CAV et CI-RMA) sont exclus des seconds (CAE et CIE) car, en théorie, les premiers sont plus avantageux pour les bénéficiaires de minima sociaux et qu'ils leur sont réservés.
Ce ne serait pas dramatique si :
- 1/ CAV et CI-RMA étaient aussi avantageux pour les employeurs que le CAE et le CIE (ce n'est pas toujours le cas… aujourd'hui avec un CAE avec un taux de prise en charge de 90% il vaut mieux faire un CAE qu'un CAV)
- 2/ les CAV et CI-RMA pour les bénéficiaires du RMI dépendent des conseils généraux. Et là il y a autant de politiques que de départements. Exemple en Bourgogne. Le conseil général de l'Yonne fait beaucoup de CI-RMA et de CAV. Il co-finance les CAE et CIE pour les bénéficiaires du RMI. Ces derniers sont donc acceptés sur ces types de contrat. Dans un département voisin, la Nièvre, c'est totalement différent. Le département de la Nièvre refuse de co-financer les CAE, donc le préfet refuse que les bénéficiaires du RMI soient acceptés sur des CAE.
Le CG58 a obligation de financer CAV et CI-RMA pour les bénéficiaires du RMI. Or le CG58 ne fait pas de CI-RMA mais uniquement des CAV (pas plus de 150 cette année pour un population de + de 4000 bénéficiaires du RMI !!!!)
Le contrat d'insertion unique devrait simplifier tout cela… quand il arrivera. Mais petite remarque mesquine pour nos politiques : ils existaient, ces contrats uniques. Il s'appelaient CES et CIE ! Or un gouvernement a supprimé le premier pour le remplacer par CAV et CAE, et fait pour le second une distinction stupide entre CIE et CI-RMA !
A. Répondre | Répondre avec citation |
Effectivement, il y a un an, le Grenelle de l'insertion devait mettre fin au maquis de contrats aidés générés par Jean-Louis Borloo : Le Grenelle de l'Insertion sonne la fin du contrat d'avenir et du CI-RMA…
Mais, au final, le «contrat unique d'insertion» (ou CUI), qui devait se décliner en CAE et CIE «en faveur de la totalité des publics bénéficiaires», a été renvoyé aux calendes grecques !
Pitoyable. Répondre | Répondre avec citation |