A peine 17% des établissements du secteur privé envisagent de recruter en 2009. L'enquête fait état de 989.400 projets de recrutement, soit 308.800 de moins qu'en 2008… soit le plus bas niveau enregistré depuis son origine, en 2002.
Si le BTP et l'industrie sont les secteurs où la dégradation des perspectives d'embauche est la plus forte, l'enquête montre que toutes les familles de métiers sont touchées. Et plus du quart de ces «projets», hors intérim, sont liés à une activité saisonnière, donc à statut précaire...
Une stagnation persistante
Ne nous illusionnons pas. Depuis la création de l'enquête BMO, seules deux années vantèrent une progression : 2008 avec + 6,1% des «intentions» d'embauche par rapport à 2007, et 2007 avec + 2,4% par rapport à 2006, «une première depuis cinq ans», disait-on à l'Unedic. En effet, sur les exercices précédents, ces «intentions» reculaient de 1,5 point chaque année...
Des «intentions» qui ne profitent pas aux chômeurs
De plus, invariablement, 4 «intentions» sur 10 correspondent à des transferts de personnel au sein de la même entreprise (promotion interne, remplacement des départs à la retraite…), 3 sur 10 concernent des salariés qui changent d'entreprise (mais pas de métier ou de branche) quand seulement 2 sur 10 profitent à des privés d'emploi ou à des inactifs, et 1 sur 10 permettent à des jeunes d'entrer enfin sur le marché du travail.
En 2007, Jobetic avait déjà relevé que de trop nombreux recruteurs refusent d'embaucher des chômeurs ou des «primo arrivants», une discrimination manifeste. «A quand une taxation des récalcitrants ?» s'interrogeait Jobetic à l'heure où il était question de sanctionner ceux qui refuseraient «deux offres d’emploi raisonnables»… que Pôle Emploi est, aujourd'hui, totalement incapable de fournir.
Des employeurs toujours aussi exigeants
L'enquête BMO mesure aussi la «perception par les employeurs de la difficulté à recruter» : pénurie de candidats, profils inadéquats... Malgré un chômage de masse persistant et son explosion actuelle qui ne leur laisse que l'embarras du choix, 43% des établissements qui ont répondu persistent à déplorer des «projets» de recrutement «difficiles» (ils étaient 51% l'année dernière) ! C'est donc à l'Unedic, qui assume déjà la prise en charge financière des victimes du chômage, de mettre en œuvre des actions visant à satisfaire les critères d'entreprises qui ne font plus l'effort d'intégrer et de former leurs collaborateurs.
L'Unedic, à votre service !
Notons qu'en 2007 (le détail de 2009 reste inconnu), seuls 327.700 établissements sur 1,5 million d'affiliés ont daigné remplir et retourner le questionnaire BMO. Et c'est sur la base — faiblarde — de ces 20% de réponses que l'Unedic a planifié ses budgets, actions et formations à venir, l'objectif principal de l'enquête consistant à orienter/modeler les demandeurs d'emploi en fonction des besoins des entreprises — les fameux métiers dits «en tension» —, le chômeur, lui, n'ayant plus le choix. (Pour la bagatelle, on rappelle qu’en cette même année 2007, l'Unedic n'a dépensé que 51,3% de son budget formation et que seuls 5% des demandeurs d'emploi en ont bénéficié… une honte !)
Outre le fait que les visées et l'utilité de l'enquête BMO soient tronquées [lire en commentaire], elle reste un thermomètre parmi d'autres.
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Commentaires
On sait que la formation permet d'améliorer l'employabilité des demandeurs d'emploi. Pourtant la moitié du budget formation de l'Unedic 2007 n'a pas été utilisé. La raison ? Ils sont faits pour financer les Besoins en Main d'Oeuvre (BMO), or ceux-ci seraient très difficiles à prévoir. Quand ils sont connus, c'est trop tard. Désespérant !
Le budget Unedic 2007 alloué à la formation des chômeurs, soit presque 400 millions, n'a été utilisé qu'à moitié. Alors que le gouvernement et les syndicats patronaux prônent haut et fort une amélioration de la formation des chômeurs afin de leur permettre une meilleure employabilité, on s'étonne que le budget prévu à cet effet n'ait pas été utilisé en totalité l'année dernière.
Au bout du compte, les 82.172 bénéficiaires de ce budget formation ne représentent que 5% des demandeurs d'emploi, même s'il faut faire la distinction entre les bénéficiaires potentiels du budget Unedic et les autres.
Pour mieux comprendre, rappelons qu'il existe plusieurs formes de formation des demandeurs d'emploi selon leurs prises en charge par l'Etat, les Conseils Régionaux et l'Unedic. Le nombre de chômeurs ayant bénéficié d'une formation est de fait beaucoup plus important si l'on tient compte de ces divers financeurs.
Pour prétendre bénéficier des fonds formation de l'Unedic, il faut être impérativement indemnisé par les Assedic.
L'Unedic finance trois types de formations :
• Les formations homologuées, c'est-à-dire des stages mis en œuvre et financés par l'Etat ou le Conseil régional. Les critères définis pour l'homologation sont pris en compte à partir des besoins en emploi identifiés comme prioritaires. L'Unedic finance alors uniquement les frais de transport et d'hébergement.
• Les formations conventionnées qui répondent aux critères de métiers dits "en tension". La liste de ces métiers est élaborée par région sur des postes non pourvus dans certaines filières.
• Les actions de formation préalables à l'embauche (AFPE) qui sont financées dès lors qu'un chômeur se voit proposer un emploi et qu'il lui faut suivre une formation d'adaptation.
Ce système a prouvé son efficacité, puisque 70% des chômeurs ayant pu bénéficier d'une formation préalable à l'embauche ont retrouvé un emploi à temps plein dans les trois mois. Parmi les 40.000 chômeurs qui ont bénéficié d'une formation conventionnée, la moitié d'entre eux ont trouvé du travail dans le même laps de temps. Et 42% pour les formations homologuées ! On peut donc s'étonner que la totalité des fonds ne soient pas utilisés.
L'explication, selon l'ANPE, viendrait en partie du fait que le «recensement des métiers en tension se fait par le biais de différents organismes : ANPE, DARES, INSEE, Sécurité sociale, entreprises… et que ce recensement prend parfois une année». En bout de chaîne, cela expliquerait l'inadéquation entre la liste des métiers en tension élaborée un an auparavant et les formations mises en place par la suite. «Les entreprises ont du mal à projeter les emplois sur un an ou deux, il est donc difficile de prévoir les formations sur la durée».
Bref, quand les chiffres officiels en BMO arrivent, les exigences des entreprises ont changé, la nécessité des formations n'est donc plus justifiée. Les budgets n'ont plus de raison d'être utilisés… Peut-être pourrait-on alors les allouer à financer d'autres formations, notamment celles en fonction des besoins des chômeurs ? Une fois encore le système marche sur la tête… Répondre | Répondre avec citation |
Dommage ! dit Fabienne Brutus à partir de la page 135 de son livre "Chômage, des secrets bien gardés" :
« Définir un plan de formation est devenu une usine à gaz (pour rebuter chômeurs et conseillers ?). On a assisté à une quasi-suppression généralisée. Seules subsistent les formations menant aux métiers en tension et des actions non qualifiantes, purement occupationnelle s.
D'année en année, la possibilité de formation se réduit à vue d'œil. Seuls les métiers considérés comme "en tension" par l'Assedic sont accessibles. Il faut donc qu'ait émergé un besoin non satisfait du côté des employeurs pour que la formation ad hoc soit prise en charge. Dès que le souhait s'éloigne des demandes officielles du marché, les aides éventuelles s'envolent.
(…) S'en tenir aux besoins exprimés par les employeurs, c'est prendre énormément de risques au niveau de la création d'entreprises dans les années à venir. Beaucoup de petits projets sont devenus grands, dans des secteurs où aucun besoin ne se faisait sentir. Réserver la formation à l'élite capable de la financer est plus qu'une injustice, c'est une bêtise incommensurable . L'Etat semble avoir fait une croix sur les forces vives et oublié que la créativité existe dans toutes les catégories socioprofession nelles.
(…) La reconversion professionnelle est désormais impossible. Au plan national comme régional, c'est une catastrophe. Acquérir un diplôme est doublement une épreuve, au premier stade presque insurmontable : le financement. Il semblerait qu'on veille à dresser une masse laborieuse, ouvrière et peu regardante. La qualification vers des emplois "supérieurs" est utopique.
La profession d'infirmier/infirmière est, par exemple, quasiment inaccessible à un chômeur. (…) Ils sont prêts à se mettre au service d'autrui, savent que les hôpitaux font appel à des infirmiers étrangers. (…) Mais un chômeur indemnisé n'est pas assuré de percevoir ses allocations durant les trois années d'études. Alors qu'à la sortie il est certain, sans l'ombre d'un doute, de trouver un CDI dans la structure de son choix. (…) Aux autres, chômeurs non indemnisés, on dira : "Faites un emprunt, vous êtes sûrs de trouver du boulot en sortant de l'école". Espérons qu'il n'y aura pas de redoublement, car les études d'infirmière ne le tolèrent qu'une fois sur la totalité du cursus. Un second redoublement, c'est le projet qui s'effondre, une somme astronomique à rembourser, et pas l'ombre d'un travail pour le permettre. »
L'Unedic, comme tout le monde, pratique les vues à court terme assorties d'économies de bouts de chandelles.
En moyenne, selon la DARES, seulement 7% des chômeurs bénéficient d'une formation. Répondre | Répondre avec citation |
Quelques précisions utiles…
L’enquête Besoins en Main d’Oeuvre (BMO) mesure les intentions de recrutement des employeurs pour l’année à venir, qu’il s’agisse de créations de postes ou de remplacements.
Sur 10 embauches réalisées par les entreprises, quatre le sont en interne, trois par appel à des candidats débauchés dans une autre entreprise, deux viennent diminuer les rangs des chômeurs ou des inactifs et une correspond à un "primo arrivant" sur le marché du travail.
L’enquête BMO 2009, huitième édition du genre, a été réalisée en octobre-novembre 2008, c’est-à-dire au moment où la crise n’en était encore qu’à ses débuts…
- Une enquête… PEU FIABLE (…)
- Les effets de la CRISE n'ont visiblement pas été pris en compte au moment de l’enquête (…)
- PLUS QUE JAMAIS, les employeurs, et en particulier les DRH des SSII, se moquent du monde quand ils parlent de "difficultés de recrutement" dans l'informatique (et ailleurs)…
(…) Répondre | Répondre avec citation |
Pourquoi former un quadra ou quinca quand on sait que les entreprises ne seront pas pénalisées si elles n'embauchent pas de seniors. On ne va pas investir dans une formation pour un "client" qui sera discriminé de toute façon à cause de son âge. En jouant à ce jeux, le pôle emploi participe activement à cette discrimination.
L'argument contre cette situation serait doublement fort si on avait des demandeurs d'emploi bien formés et qualifiés : ne gâchons pas nos investissements et nos compétences, donc il faut faire pression pour que les mentalités changent.
La vision court-termiste (faire travailler le plus rapidement possible les demandeurs d'emploi au détrmient de la formation) est et reste une balle dans le pied. Répondre | Répondre avec citation |