Ce ne sera pas nécessairement une grève générale, mais les 13 magasins Apple de France devraient connaître des perturbations liées à un mouvement social, ce vendredi, pour la mise en vente de l'iPhone 5, le dernier modèle du téléphone emblématique d'Apple. Origine du mécontentement : les négociations annuelles entre employés et direction. Les salariés réclament une revalorisation de leur salaire, un 13e mois, des tickets restaurant ou des fontaines à eau dans les arrière-boutiques...
Ce jeudi 20 septembre, une réunion de la dernière chance n'a pas permis de résoudre tous les points du conflit. Depuis plusieurs jours, la menace d'une grève grondait ; la fermeture de magasins ou la présence d'employés en sous-effectifs pour l'un des principaux jours d'affluence de l'année pourrait avoir de lourdes conséquences. Le lancement du dernier smartphone de la firme, l'iPhone 4S, avait été marqué par une grève d'employés de l'Apple Store de Rome.
"Nous battre pour le 13e mois"
De son côté, la direction explique que la marge de manœuvre est réduite, la filiale Apple Retail France, gestionnaire des magasins, est officiellement en déficit de 10 millions d'euros — même si le groupe engrange des profits records à l'échelle mondiale.
"Cela fait trois ans que nous nous battons pour améliorer nos conditions de travail. Nous sommes dans le dialogue et voulons vraiment nous battre pour le 13e mois. Nous avons plus ou moins obtenu, par accord oral, les tickets restaurant et une revalorisation du budget du comité d'entreprise", expliquait jeudi un représentant du syndicat Cidre (CFTC) joint par le Monde.fr. Au terme d'une réunion de la dernière chance, jeudi soir, la direction de la branche d'Apple a accepté d'accorder des tickets restaurants aux salariés et s'est engagée par écrit à ouvrir de nouvelles négociations d'ici la fin de l'année — à condition qu'il n'y ait pas de grève vendredi.
Suffisant pour empêcher un arrêt de travail ? Le syndicat Sud (25% des 1.500 employés) avait d'ores et déjà lancé un appel à la grève jeudi après-midi, estimant avoir "suffisamment de salariés pour faire une grève". Ses représentants ont par ailleurs appelé à se mobiliser dès 8 heures du matin devant l'Apple Store Opera, qui en compte à lui seul 300. De quoi parasiter les belles images habituelles des files d'attentes d'acheteurs impatients...
Au sortir de la réunion de jeudi, le Cidre n'avait pas encore défini un mot d'ordre définitif, mais appelait ses membres à poursuivre le mouvement de protestation au moins de manière symbolique, par le port de brassards verts marqués "Believe" ("croire"), ce vendredi.
Le mouvement pourrait être diversement suivi en fonction des villes. "Il y a des différences entre les régions. La colère est très importante dans les Apple Store parisiens, où le coût de la vie est plus élevé qu'en province. Dans le Nord, à Paris ou encore à Lyon, une grande majorité des employés sont pour la grève. Dans le Sud, les employés sont plutôt contents d'avoir obtenu les tickets restaurant", explique le Cidre.
(Source : Le Monde)
Les raisons de la colère
Un employé anonyme de l'Apple Store parisien d'Opéra explique que les pressions quotidiennes pour la performance, les contrôles constants et la fragmentation des horaires ont eu raison de sa passion pour la marque.
La grogne sociale monte dans les magasins Apple. Depuis quelques jours, certains vendeurs portent au poignet un bracelet en plastique vert avec un simple mot : "Believe" inscrit dessus, en référence aux promesses de la direction "qu'il convient de croire". Une manifestation discrète, difficile à répérer pour les clients. Mais symbole d'un ras-le-bol croissant chez les salariés des 13 boutiques françaises. David travaille au flagship (le vaisseau amiral de la marque) de la place de l'Opéra à Paris depuis deux ans. Et, pour lui, porter ce bracelet a du sens.
Des employés inquiets et divisés
"Il s'agit de montrer à nos managers, à la hiérarchie, notre implication dans ce mouvement", raconte le jeune homme. Pourtant, à quelques heures du lancement de l'iPhone5, un événement très attendu et très orchestré médiatiquement, la menace d'une grève aurait de quoi gâcher l'ambiance... "J'en rêve, confie David qui découvrira le produit en même temps que les clients. Mais ce sera très compliqué à mettre sur pied car les employés sont divisés et beaucoup craignent d'exprimer leurs revendications, pratique peu appréciée dans l'entreprise."
Ces prétentions n'ont pourtant rien d'un caprice. Au contraire. Les salariés des Apple Stores français réclament une augmentation de salaire, la mise en place d'une grille salariale et des horaires moins fragmentés.
Pas d'avantage salarial mais… un bon de réduction
"Dans un magasin, les salaires peuvent aller du simple au double. Tout dépend de ce que tu annonces à l'entretien, raconte le vendeur. Le palier minimum stagne à 19.000 euros bruts par an (soit 1.260 euros net par mois) ce qui est très bas lorsqu'on vit à Paris. Moi, je suis à 23.000 euros bruts par an. Et sans le moindre avantage : ni ticket restaurants, ni 13e mois, ni prime de participation ou d'intéressement. Ah si, on a des avantages sur les produits avec, par exemple, 27% de réduction pour acheter un ordinateur par an... Mais le plus injuste à mes yeux, c'est l'absence de grille salariale, l'opacité totale qui règne dans cette boîte."
La parole de la "secte" Apple
Apple, première capitalisation boursière, n'est pourtant pas vraiment dans le besoin. Le contraste avec la précarité de certains de ses vendeurs étonne donc. "Quand il s'agit de vendre des téléphones ou des iPad, nous faisons partie de la grande famille Apple; mais quand on parle salaires, on nous répond que notre filiale est déficitaire", commente David, amer.
En effet, les salariés des magasins dépendent d'Apple Retail France, une filiale du groupe, déficitaire. L'an dernier, elle affichait une perte de 10 millions d'euros. "On nous oppose cet argument-là et on nous pousse à vendre toujours plus de produits pour combler ces pertes, mais on en a marre."
Le mouvement a commencé dans le magasin du Louvre. Visiblement, il serait venu des Etats-Unis, il y a plusieurs mois. Il en a eu vent par Twitter et certains sites de fans de la marque à la pomme où la parole des revenus de la "secte" Apple se libère. Car le dialogue n'est pas le point fort de l'entreprise. Impossible, par exemple, de trouver le contact des représentants syndicaux maison en effectuant une recherche dans Google !
Pression constante des managers
"D'après ce que je sais, mais rien n'est clair et tout très compliqué à vérifier, les salariés américains, allemands et italiens auraient obtenu une hausse de salaire de 20%", poursuit le jeune homme, fatigué de l'ambiance très "Big Brother" qu'il subit au quotidien. "On est sous-payés, bien sûr, mais on doit aussi badger sans arrêt; au bout de six minutes de retard, on reçoit un mail qui nous demande où nous sommes et les raisons de notre absence; et puis il y a la pression constante des managers qui circulent dans le magasin, un iPad à la main pour vérifier en temps réel sur le planning que chacun est à son poste."
Lire également ici => Pression, salaires, flicage : malaise dans les Apple stores
Trois mois et puis...
Arrivé dans l'entreprise "par admiration pour cette marque mythique et amour des produits", David est aujourd'hui "écœuré". "Les nouveaux venus déchantent au bout de trois mois. Enfin, ceux qui restent parce que 7 candidats sur 10 sont virés pendant la période d'essai, lâche-t-il dans un sourire un peu dépité. Et la passion des produits, franchement, ça marche plus. Et cet iPhone 5 n'a rien de plus qu'un autre smartphone du marché."
Mais, vendredi, il devra retourner le vendre. "A reculons, précise-t-il, comme chaque jour où je vais travailler." Car désormais, David, n'y croit plus...
(Source : L'Entreprise)
Les consommateurs, eux, s'en fichent...
La menace s'est concrétisée mais les fans français d'Apple peuvent être rassurés : le préavis de grève déposé pour vendredi par le syndicat minoritaire Sud ne devrait pas les empêcher d'acheter leur iPhone 5 dans un Apple Store dès demain, jour de sortie du nouveau smartphone de la marque à la pomme. Les autres syndicats, dont la CFTC majoritaire, ne se joignent pas au mouvement. Et les représentants de Sud reconnaissent qu'ils n'ont pas l'intention de gêner la vente de l'appareil ou de bloquer les magasins.
[…] Devant la boutique de la capitale, une trentaine de "mordus" étaient installés dès jeudi après-midi devant l'entrée pour être les premiers à mettre la main sur le précieux téléphone. "Apple a su rendre accro les gens", a déclaré à l'AFP Sylvain Gautier, 38 ans, fonctionnaire de l'Education nationale, ajoutant qu'il prévoyait de passer la nuit sur son siège pliant devant la boutique. "A 8 heures, je suis servi. A 8h20, je vais chercher ma carte Sim et à 8h30, il est mis en route", a assuré cet adepte de l'iPhone. "Je pense que les employés des Apple Store sont intelligents. Je ne pense pas qu'ils vont bloquer le magasin. Du moins, je l'espère…", a-t-il ajouté.
A ses côtés, deux frères venus de Belgique, Brecht et Dieter Decuypere, 23 et 19 ans, dégustaient des pizzas. "On est venus en bus exprès ce matin", a expliqué l'un d'eux, précisant que l'iPhone 5 n'arrivait que le 28 sur ses terres. D'après certains analystes, Apple pourrait vendre jusqu'à 10 millions d'iPhone 5 le premier jour.
(Source : L'Expansion)
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