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Ravi de redorer son blason sérieusement terni aux yeux de l'opinion publique, le Premier ministre a trouvé une belle occasion de faire preuve de "patriotisme économique". Dès sa descente d'avion, sur le tarmac, face aux hangars de l'usine de maintenance, élégant et bronzé, le chef du gouvernement a voulu affirmer sa détermination : «Qu'il y ait dans notre pays, comme partout, des mutations industrielles, c'est normal. Mais que d'un trait de plume on décide de supprimer 1.100 emplois, c'est inacceptable. (...) J'ai un objectif : obtenir qu'une activité industrielle se poursuive par le groupe EADS ici, à Mérignac, et que le plus grand nombre d'emplois soient préservés. L'industrie aéronautique est installée à Mérignac depuis des générations, il est donc important que cette activité continue.» Et de rajouter : «Je retiens que, oui, il y a un avenir pour ce site industriel. Il y a un savoir-faire, une technologie, une compétence, qui méritent d'être défendus.»
Pourtant, la veille à Paris, les représentants de l'intersyndicale s'étaient heurtés à une fin de non-recevoir de la part de la direction du groupe. Cet après-midi, Dominique de Villepin recevra à Matignon le coprésident d'EADS Noël Forgeard, ainsi qu'Arnaud Lagardère, actionnaire à 7,5%.
Bernard Tachoires (FO) accueille avec réserve la succession des événements : «On sent bien que le gouvernement se lance dans un bras de fer avec EADS, mais ce que l'on souhaite, c'est un projet fort et concret. Là, il n'y a rien de gagné, on attend la réaction de l'industriel.» Car suite au passage du Premier ministre, le groupe EADS a indiqué qu'il allait étudier la réindustrialisation partielle du site "visant un noyau de 300 emplois". Une mesure loin d'être suffisante.
Le représentant FO n'est pas dupe : «Des hommes politiques de haut rang, de droite, de gauche, on en a reçu quelques-uns. Quel que soit leur bord, ils ont tout intérêt à se saisir d'un problème industriel. Et puis, la politique, elle se fait sur l'ours ; pourquoi elle ne se ferait pas sur nous ? On voulait un débat national, on l'a. Pour nous tout est bon.» En dix jours, les salariés de la Sogerma ont vu se précipiter à leur chevet (entre autres) messieurs Hollande, Fabius, Emmanuelli, Mamère ou Borloo… jusqu'à la dernière démonstration de politique-spectacle offerte par Dominique Galouzeau de Villepin. Et c'est dignement qu'ils manifesteront aujourd'hui à Paris devant le siège d'EADS France, puis devant l'Assemblée Nationale.
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"On va tout tenter pour conforter 300 emplois sur le site aéronautique, c'est la mesure d'apaisement que notre conseil d'administration, sur ma recommandation et avec le plein soutien de l'ensemble du conseil notamment du représentant de l'Etat français a prise hier", a-t-il dit. Mais, rappelant les pertes de la Sogerma, il a indiqué que "ça ne peut pas continuer".
A propos du reste des 1.100 salariés concernés par la fermeture du site de Mérignac, M. Forgeard a affirmé qu'il n'y avait "aucun problème, ils seront tous reclassés s'ils le souhaitent car les 3.000 emplois que le groupe crée en France cette année leur seront proposés en priorité". "Personne ne sera licencié" a-t-il assuré. Les emplois proposés seront "à Toulouse (siège d'Airbus), à Marignane (siège d'Eurocopter), avec des aides exceptionnelles au déménagement. Tous ceux qui voudront faire un effort réel de formation, de flexibilité auront un emploi dans le groupe EADS", a-t-il affirmé. Répondre | Répondre avec citation |
"Les discussions d'aujourd'hui nous permettent de vous dire qu'on va essayer d'avancer ensemble sur un objectif commun de maintenir jusqu'à la moitié des effectifs", a déclaré M. Lagardère à l'issue d'un entretien avec le Premier ministre Dominique de Villepin. "Quoi qu'il arrive, aucun salarié de Sogerma ne restera sans solution", a-t-il assuré.
Il a précisé que des groupes de travail allaient se réunir "dans les jours qui viennent" pour trouver des projets industriels permettant de maintenir ces emplois à Mérignac. Ces projets devraient permettre de sauver 200 emplois supplémentaires par rapport aux 300 emplois que le co-président d'EADS, Noël Forgeard, s'était engagé dans la matinée à conserver sur le site.
Des solutions sont d'ores et déjà trouvées pour les 500 à 600 autres salariés de Sogerma, a ajouté M. Forgeard. Selon lui, "200 postes" ont d'ores et déjà été trouvés dans le "Grand Bordeaux, dont 60 chez Dassault Aviation". Par ailleurs, "300 personnes ont exprimé la volonté de partir à Airbus Toulouse ou Eurocopter Marignane" dans le cadre de reclassements internes au groupe aéronautique et "100 personnes peuvent compte tenu de leur âge bénéficier de pré-retraites".
Le co-président d'EADS a demandé au ministère de la Défense de participer la réindustrialisa tion du site de Mérignac. "J'ai une attente forte vis-à-vis du ministère de la Défense qui pourrait, devrait nous aider", a-t-il déclaré.
Noël Forgeard a appelé les salariés de Sogerma à reprendre le travail. "Pour réussir tout cela, il faut que tout le monde se remette au travail à Mérignac", a-t-il dit. Répondre | Répondre avec citation |
Dans un communiqué, l'intersyndicale CGT-CFDT-FO-CFE-CGC a fustigé "la sous-activité programmée" de la branche maintenance, occasionnant "10% de la totalité des pertes". A propos de l'activité VIP (aménagement d'appareils pour clients fortunés), "les contrats (au) Qatar ont été pris à moins de 50% du prix du marché, entraînant une perte de 35 M EUR", a-t-on indiqué. "Prise à des conditions du marché, elle aurait été profitable".
En 2005, les "238 millions d'euros de pertes du groupe Sogerma (4.000 salariés dans le monde)" comprennent "160 millions de provisions", a précisé dans son communiqué l'intersyndicale, et la part du site de Mérignac représente "60 millions d'euros, provisions comprises".
"Au vu de ces analyses (…), l'intersyndicale dénonce la manipulation financière qui consiste à trouver un alibi financier" à la fermeture de la Sogerma-Mérignac, annoncée le 12 mai par sa maison-mère EADS.
Les syndicats ont également critiqué "l'absence de communication officielle depuis le 24 mai (quand le co-président d'EADS Noël Forgeard et l'actionnaire Arnaud Lagardère ont rencontré le Premier ministre Dominique de Villepin)". "Lagardère nous propose de conserver 200 emplois de plus (soit un total de 500 sur le millier que compte le site), mais il ne connaît pas trop notre métier, que va-t-il nous faire faire ?", s'est interrogé Vincent Loizeau (CGC) qui a évoqué "un déclin du dialogue social".
En conclusion, l'intersyndicale a appelé "l'ensemble des salariés et leurs familles à participer à l'opération 'Mérignac, ville en colère, ville solidaire'" ainsi qu'à "une manifestation à Bordeaux" le samedi 3 juin. Répondre | Répondre avec citation |