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C'est mal parti pour la réforme du financement de la Sécu

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L’élargissement de l’assiette des cotisations patronales à la valeur ajoutée déboucherait sur des résultats nuls, selon des études ministérielles biaisées par des dogmes libéraux.

En annonçant, lors de ses voeux en janvier dernier, l’ouverture d’un chantier sur la réforme du financement de la Sécurité sociale, Jacques Chirac avait créé la surprise. À l’ordre du jour depuis des décennies, le sujet n’a fait l’objet, jusqu’ici, que de rapports (le premier remonte à 1975) et, au mieux, de promesses... non tenues, comme en 1997 où le PS avait mis le projet d’une cotisation sur la valeur ajoutée dans la corbeille de la gauche plurielle.

D’année en année, de mois en mois, la crise financière s’accentue. Retraite, santé, famille : alors que toutes les branches de la Sécu sont en déficit, les besoins de protection sociale explosent inexorablement, explosion liée à l’allongement de l’espérance de vie dû aux progrès technologiques notamment. La moindre volonté politique d’améliorer la situation est désormais hypothéquée par la pénurie de moyens, comme l’a encore montré le récent plan «solidarité grand âge», très en deçà des attentes pour d’évidentes raisons budgétaires.

Dégager de nouvelles ressources pour la Sécu s’impose donc bien comme une priorité. Revoir le mode de financement en est une autre, pas moindre. Chirac lui-même avait pointé l’anomalie du système où, «plus une entreprise recrute, plus elle doit payer» de cotisations et, «à l’inverse, plus elle délocalise, plus elle occasionne de dépenses sociales et moins elle contribue» à la Sécu. Le chef de l’État demandait d’étudier «une assiette plus juste et plus favorable à l’emploi».

Depuis février, un groupe d'experts de Bercy et du ministère des Affaires sociales planche sur le scénario d’un élargissement de l’assiette des cotisations patronales à l’ensemble de la valeur ajoutée (salaires + profits + impôts). Trois hypothèses principales ont été étudiées : la création d’une cotisation sur la valeur ajoutée, une modulation des cotisations en fonction d’un ratio masse salariale/valeur ajoutée, et l’instauration d’une «TVA sociale». Fin juin, dans un premier rapport remis au Conseil d’orientation de l’emploi, les experts rendaient des conclusions de nature à invalider, pratiquement, l’idée même de la réforme : dans tous les cas de figure, elle aurait, à long terme, un effet quasi nul sur l’emploi et sur les finances de la Sécu.

Problème : à bien y regarder, ces études sont, d’emblée, fortement biaisées. Sous des dehors techniques, elles s’inscrivent dans une logique très politique, celle de la baisse du coût du travail. Toutes les mesures prises depuis une quinzaine d’années consistant à alléger les cotisations patronales et à augmenter, en même temps, la part des recettes fiscales (via la CSG) dans le budget de la Sécu, sont jugées a priori comme «sans nul doute positives pour l’emploi». Dans cette optique les experts, excluant de remettre en cause les exonérations de «charges», ont délibérément limité le champ de la réforme aux petits 2,1 points de cotisations sociales patronales subsistant au niveau du SMIC, soit un volume de 9 milliards d’euros, sur un total 190 milliards de cotisations affectées aux régimes de base. Difficile évidemment, dès lors, d’en attendre un gros impact. D'autant que les modèles utilisés pour procéder à des simulations intègrent un autre dogme : tout nouveau prélèvement sur le capital serait défavorable à l’investissement et à l’emploi. Rien d’étonnant du coup si l’idée d’une prise en compte de la valeur ajoutée, et non plus des seuls salaires, n’apparaît guère viable. Notons toutefois que les experts disqualifient, de fait, la piste d’une «TVA sociale» défendue par le MEDEF, en raison de ses effets inflationnistes.

Pour sortir le dossier de l’impasse où il semble bien enfermé, la CGT, représentée au Conseil d’orientation de l’emploi qui se réunit aujourd’hui sur le sujet, a réclamé «de nouvelles simulations à partir d’“hypothèses alternatives”». Plus qu’un «simple élargissement de l’assiette à la valeur ajoutée», qui «ne tient pas compte de la gestion des entreprises ni des différences sectorielles» (les assurances, les banques et les services financiers versent à la Sécu, en pourcentage de leur valeur ajoutée, deux fois moins que l’industrie), le syndicat demande une étude approfondie de la modulation des taux de cotisation sur les salaires en fonction de la politique d’emploi des entreprises. Pour la CGT, les calculs devraient aussi porter sur une assiette où seraient réintégrés les exonérations actuelles (23 milliards d’euros en 2006) et les très substantiels éléments de rémunération (épargne salariale, intéressement, participation, stock-options... soit un pactole de 30 milliards d’euros) qui échappent actuellement à toute cotisation de Sécurité sociale, ainsi que les revenus financiers des entreprises. Autant de leviers pour «favoriser le développement d’un nouveau type de productivité faisant une place plus large au travail, aux qualifications, à l’emploi», tout en «confortant les ressources de la Sécurité sociale», souligne la centrale de Bernard Thibault.

La CFDT plaide pour une «remise à plat des allégements de charges qui se sont empilés depuis quinze ans et dont l’efficacité est discutée». Quant au MEDEF, il pousse en sens contraire, prônant une sorte de bigbang libéral : le transfert total des cotisations patronales sur les salariés, dont, promet Mme Parisot, «le salaire brut serait bien sûr parallèlement relevé pour compenser» le surcroît de prélèvements. Un schéma en bonne et due forme de privatisation de la Sécu, chaque individu étant alors renvoyé au marché pour trouver la couverture de son choix, ou plus exactement... selon ses moyens.

Solidarité et haut niveau de protection pour tous, ou libre marché et inégalités maximales ? Difficile de mieux dire l’urgence de remettre la réforme sur de bonnes bases en lui donnant sa dimension véritable de projet de société.

(Source : L'Humanité)

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Mis à jour ( Samedi, 15 Juillet 2006 08:45 )  

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