Un projet de rapport de trois économistes, Pierre Cahuc, Patrick Artus - tous deux membres du Conseil d'analyse économique (CAE) - et André Zylberberg, portant sur "la réglementation du temps de travail et son impact sur les revenus et l'emploi", critique l'impact d'une telle mesure, estimant qu'elle "ne constitue pas un moyen efficace de valoriser le travail". "Une fiscalité spécifique sur les heures suplémentaires, quelle que soit sa forme, aurait au mieux un effet incertain sur l'emploi et le revenu global, avec un risque de coût exorbitant pour les finances publiques [1] qui se double d'une complexité accrue du système fiscal", écrivent les auteurs dans un document révélé par Les Echos.
Pour les économistes, la défiscalisation des heures supplémentaires est porteuse de nombreux effets pervers, en premier lieu sur l'emploi. Les employeurs seraient ainsi incités à faire faire à leurs salariés des heures supplémentaires, moins chères que les heures normales, plutôt que d'embaucher, et ainsi "substituer des heures de travail aux hommes". En outre, les auteurs pointent un risque de réduction du salaire horaire et de fraude. La défiscalisation des heures supplémentaires pourrait avoir pour conséquence, selon eux, d’"abaisser (ou ne pas augmenter) le taux de salaire des heures normales et à déclarer fictivement un grand nombre d'heures supplémentaires".
Le projet de rapport a donné lieu à un débat contradictoire au Conseil d'analyse économique (CAE) mardi lors d'une séance plénière. Placé auprès du Premier ministre, cet organisme a pour mission "d'éclairer les choix du gouvernement en matière économique par la confrontation des points de vue", rappelle un communiqué de son président délégué Christian de Boissieu. Or, celui-ci souligne que la mesure voulue par le président de la République "a un certain nombre de partisans au sein du CAE".
Mesure phare du programme économique et social de Nicolas Sarkozy, la défiscalisation des heures supplémentaires a fait l'objet d'un projet de texte transmis pour arbitrage lundi par Bercy à Matignon et l'Elysée. Jean-Louis Borloo, le ministre de l'Economie et de l'emploi, doit consulter en fin de semaine les partenaires sociaux sur le sujet. L'exécutif souhaite que la mesure soit votée pendant l'été et qu'elle s'applique à l'ensemble des salariés, y compris ceux qui ne font pas d'heures supplémentaires (travailleurs à temps partiel, cadres au forfait), du public comme du privé.
(Source : La Tribune)
[1] NDLR : le coût cette mesure a été évalué par l'Institut de l'Entreprise à 4,6 milliards d'euros dont 2,83 milliards de manque à gagner pour la Sécurité sociale... Quand on songe aux 600 millions d'euros "économisés" grâce aux 9.500 suppressions d'emplois dans la Fonction publique l'année dernière, on se pose des questions.
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