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Accueil Social, économie et politique Un certain regard de la presse allemande sur «l'ère Sarkozy»

Un certain regard de la presse allemande sur «l'ère Sarkozy»

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Quand les «réformes» (qui se traduisent par une baisse des salaires, des retraites, la stigmatisation totale des chômeurs et l'adieu aux principes de la solidarité nationale) commencent à provoquer le ressentiment de son propre peuple, c'est chez le voisin que l'on cherche justification et réconfort.

Enfin, le plan Hartz arrive en France ! Le quotidien allemand Handelsblatt, journal économique de renom, parle de notre pays et de… «l’Agenda 2010 de Sarkozy». Je cite : «Avec quelques années de retard, la France aussi aura son Agenda 2010» [1]. Le Handelsblatt parle de «gaspillages, escroquerie et inefficacité de la sécurité sociale» (les bénéficiaires de la CMU apprécieront le "gaspillage" qui leur permet de se soigner). Enfin, les Français font aussi ce que nous avons fait !

Quand, en 2003, l'ancien chancelier Schröder avait introduit le paquet de réformes nommé "Agenda 2010" dont le fameux plan Hartz (I à IV) fait partie, il avait évidemment parlé de «réformes» et non de régression sociale tous azimuts. La très grande majorité des médias avait joué le jeu, sémantiquement et idéologiquement. Ces «réformes» ont conduit au départ prématuré de Gerhard Schröder (SPD, parti socio-démocrate) et ont produit une vague de fuite de ses membres. Fin 2002, le nombre d'adhérents du SPD était de 693.894 et, après l'annonce des réformes, environs 100.000 socio-démocrates ont quitté leur parti en l'espace de deux ans. En 2005, la crise dans le SPD et la politique sociale particulièrement dure du plan Hartz IV mène Oskar Lafontaine à démissionner, et le chancelier se voit dans l'obligation d'organiser des élections anticipées où il sort perdant de son mandat. A ce moment, le SPD compte encore 590.000 membres. Aujourd'hui, ils sont 545.000. De 1990 à aujourd'hui, le SPD a perdu 37% de ses adhérents.

L'une des conséquences de ces «réformes» est la misère, devenue le lot quotidien de près de 7 millions d'Allemands (dont 2,6 millions d'enfants qui vivent en dessous du seuil de pauvreté), avec un avenir sans perspectives, l'indigence programmée des retraités, un écart toujours plus important entre riches et pauvres, mais une croissance économique tout à fait satisfaisante avec des profits dont les salariés, dans la grande majorité, ne voient pas la couleur !

Quel bonheur donc quand on voit que son voisin français va se plier à la même "sagesse" et appliquer dans les grandes lignes les mêmes méthodes que l'on a appliquées pour soi-même. Le Handelsblatt parle de la «bureaucratie sociale inerte» et du «droit du travail rigide» en France, qu'il s'agit de changer.

Le quotidien Sueddeutsche va plus loin. Il parle de «privilèges de retraite, ancien de trois siècles», il parle d'un «système de retraite privilégié pour 1,6 millions employés, dont les cheminots, les marins et les mineurs» (personnellement je n'ai pas encore rencontré un mineur privilégié, quant au cancer des poumons et aux accidents du travail de ces salariés, c’est autre chose), et de la «nécessité d'adapter ces professions aux pratiques de l'industrie» [2]. Quel bonheur quand on voit enfin son voisin appliquer les mêmes régressions sociales, volant ainsi au secours de la critique qui monte chez soi, une critique qui vient d'en bas et qui remonte ! Vous voyez bien que nous devions faire ces réformes, la France a enfin adopté notre philosophie, c'est la preuve que nous avons eu raison, suggère le Sueddeutsche aux Allemands qui en doutent...

Sarkozy serait dur, mais prêt à négocier. Le quotidien allemand constate le «doigté et le tact dont le président français fait preuve dans la communication avec les syndicats» (!!!). Les 35 heures, qui n'existeraient plus dans la pratique, c'est ce que Sarkozy veut supprimer, il va «dépolitiser» le Smic, et introduire plus de contrats aidés pour des salaires au rabais.

Cette perception déformée des réformes que mène Nicolas Sarkozy est exactement à la hauteur des inégalités sociales que l'Agenda 2010 a produites en Allemagne.
C'est ainsi que l'on se rassure mutuellement.
Vive l'Europe !

[1] Handelsblatt
[2] Sueddeutsche

Stephan M. / Les dessous de l'Allemagne

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Mis à jour ( Vendredi, 23 Novembre 2007 18:08 )  

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