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C’est à ces deux questions qu’ont voulu apporter des réponses Michèle Loup, conseillère régionale d’Ile-de-France, groupe Les Verts, et Claire Villiers, vice-présidente du Conseil régional. C’est à elles que Jean-Paul Huchon (PS), président du Conseil régional, a confié l’organisation annuelle du colloque sur les violences faites aux femmes dans le cadre de la mobilisation demandée à chaque pays par l’ONU. Pour cela, elles ont invité élus, associations, médecins, juristes, inspecteurs du travail, conseillers prud’homaux… qui ont tous répondu présent pour s’exprimer devant un public de femmes. Signalons néanmoins la défection de la Direction départementale du Travail et de l’Emploi (DDTEFP).
Sur le constat de la situation aujourd’hui, en entreprise, pour les femmes victimes de violences sexuelles et sexistes, l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) a exprimé un point de vue sans appel : «Ça fait encore partie du boulot». On en parle, on en parle, mais les mentalités évoluent peu. «Dans les faits, les femmes en situation de violence et qui la dénoncent le paient toute leur vie professionnelle, explique Marilyn Balbeck (AVFT), leur carrière n’évolue pas, quand elles ne sont pas tout simplement licenciées pour incapacité au poste». Et d’indiquer qu’aujourd’hui ce qui mobilise les entreprises, au sujet des femmes, c’est avant tout l’égalité professionnelle et notamment salariale. «Or, derrière un cas de discrimination salariale se cache, pas toujours mais souvent, une situation de violence, assure Marilyn Balbeck, on voudrait qu’il y ait une prise de conscience de ce fait.»
Heureusement, le cadre juridique évolue favorablement. Michel Miné, professeur de droit social au Centre national des Arts et Métiers (CNAM), a informé de tous les textes sur lesquelles les femmes peuvent s’appuyer. Quels sont-ils ? L'accord national interprofessionnel sur l’égalité professionnelle (2004), l'accord européen contre les violences et le harcèlement (27 avril 2007). «Actuellement, un projet de loi contre les discriminations est en cours d’examen, il est très prometteur, annonce Michel Miné. Il prévoit une prise en compte du harcèlement par l’environnement de travail. On va sortir de la notion de pressions pour obtenir des faveurs sexuelles, comme le stipulent les textes aujourd’hui, et qui est une notion très restrictive, peu en lien avec les réalités». Aussi, il a enjoint les syndicalistes et les inspecteurs du travail présents de s’approprier ces nouveaux outils juridiques. Il a insisté sur deux derniers arrêts de la chambre sociale de la Cour de cassation, qui sont de véritables leviers pour intervenir : 21 juin 2006, arrêt concernant l’obligation de résultats de l’employeur en matière de politique de sécurité et de santé à l’intérieur de son entreprise ; 9 janvier 2007, arrêt reconnaissant la discrimination indirecte. Attention à ne pas se tromper : tout cela relève de la juridiction civile, non du pénal.
«L’évolution à terme est prometteuse, juge Michel Miné. Dans le futur, devant les tribunaux, on parlera de discrimination sexuelle et non plus de harcèlement moral ou d’abus de pouvoir, qui sont des termes inopérants. Ainsi on entrera dans la question de fond, l’analyse du contenu du travail.»
En attendant, l'application des textes rencontre encore des réticences. Et Gilles Soetemondt, président du conseil des Prud’hommes de Paris, l’a clairement déploré, tout en garantissant que le nombre de conseillers élus dans le collège syndical s’appliquent à faire évoluer les mentalités et à rappeler à tous les nouvelles lois. L’avenir de l’homme n’est-il pas la femme ? Moins de discrimination contre les femmes, ce sera de meilleures conditions de travail pour tous.
Pour s’informer :
• Les lois sont parues dans Liaisons Sociales Quotidien, au moment des dates concernées : voir leur site WK-RH
• L'AVFT : voir leur site www.avft.org
• Le CNAM va entamer prochainement une session de formation sur la discrimination (écrire à Cette adresse email est protégée contre les robots des spammeurs, vous devez activer Javascript pour la voir. )
Patricia SUDOLSKI pour Actuchomage.org
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L'écart de salaire mensuel entre hommes et femmes, de 18,9% en 2005, a fortement diminué jusque dans les années 90 puisqu'il était de 34% en 1950. Mais la baisse semble avoir atteint un seuil, malgré l'élévation du niveau d'éducation des femmes et leur présence massive dans l'emploi. "Depuis une dizaine d'années, l'écart des salaires mensuels entre hommes et femmes est resté d'une étonnante stabilité", expliquent Sophie Ponthieux (INSEE) et Dominique Meurs (Paris II). L'écart salarial est en effet le résultat de "normes sociales" qui sont difficiles à faire évoluer par la loi, souligne Mme Ponthieux.
Les discriminations sexistes pures, pour lesquelles tout un arsenal juridique existe, ne comptent plus que pour une part minoritaire dans les écarts de salaires entre hommes et femmes (estimée autour de 7%). "Il n'est plus nécessaire de faire la guerre sur ce terrain, elle est déjà pratiquement gagnée", ajoute Mme Ponthieux. En revanche, il y a énormément à faire pour qu'évoluent ces "normes sociales" qui pénalisent les femmes dans l'entreprise. Ainsi, l'importance du temps partiel dans l'emploi féminin est une des causes "structurelles" de l'écart de salaire, mais un grand nombre d'emplois à temps partiel s'expliquent par la garde des enfants ou, de plus en plus, de parents âgés, traditionnellem ent dévolue aux femmes.
L'écart salarial s'accroît au fur et à mesure que l'on monte dans la hiérarchie. Au plus bas de l'échelle, le salaire d'une femme était en 2004 de 9,3% moins élevé que celui d'un homme (- 10,1% en 1996), selon une étude du ministère de l'Emploi, alors qu'une femme cadre gagne 25,2% de moins que son collègue masculin (- 27,2% en 1996).
La sur-représentation des femmes dans les bas salaires est en grande partie due au "plafond de verre" qui bloque l'avancement ou, au contraire, à ces "planchers collants" qui maintiennent les femmes, à caractéristique s égales, dans des emplois moins rémunérés.
Les inégalités persistantes dans le partage des tâches domestiques et l'éducation des enfants, qui pénalisent les femmes, contraintes à des horaires plus courts et des absences répétées, "justifient" aussi la méfiance des patrons envers les salariées. Pour la sociologue Margaret Maruani, "la notion de salaire d'appoint est toujours présente" dans les esprits, "dans la tête des employeurs, une femme est toujours potentiellement enceinte, avec des enfants en bas âge potentiellement malades". "Il est encore plus ou moins perçu comme anormal qu'un homme s'occupe de son enfant quand il est malade, l'école appelle toujours la mère, même si le père a laissé son numéro de téléphone", note Sophie Ponthieux.
L'égalité salariale demande un changement de mentalité, de comportement des hommes, de gestion du personnel, une évolution dans l'orientation scolaire et professionnelle ainsi que le développement des modes de garde.
Cette stabilité des écarts salariaux n'est pas spécifique à la France, notent Sophie Ponthieux et Dominique Meurs, puisque les pays nordiques, pourtant attentifs à la question de l'égalité professionnelle , subissent également une panne du rapprochement des salaires. Répondre | Répondre avec citation |
A peine ouverte la conférence tripartite sur l'égalité professionnelle et salariale entre les hommes et les femmes lundi matin au ministère du Travail que les divergences s'expriment. Ainsi, la présidente du Medef Laurence Parisot se prononce en faveur d'une "amende" pour les chefs d'entreprise peu respectueux d'une telle parité, en échange du délit pénal qu'ils encourent actuellement en cas d'infraction et dont Laurence Parisot souhaite tout bonnement la "suppression".
La présidente du Medef a expliqué lundi matin sur LCI que "ce n'est pas avec du pénal que l'on change l'état d'esprit de toute une société", d'autant que "les pré-rapports ont montré l'inefficacité du délit pénal dans ce type de circonstances". Les groupes de travail préparatoires à la conférence ont recommandé dans leur synthèse des "sanctions financières" pour les entreprises qui n'auraient pas fourni de bilan annuel en la matière ou qui n'auraient pas ouvert de négociations pour "réduire les écarts".
Le président de la République a fait de l'égalité salariale et professionnelle entre les hommes et les femmes l'une de ses priorités. La lettre de mission adressée par Nicolas Sarkozy au ministre du Travail Xavier Bertrand fixe comme objectif d’"atteindre une fois pour toutes l'égalité homme femme en 2009". Autant dire un vœu pieu pour les gouvernements de gauche comme de droite depuis 25 ans.
(Source : La Tribune) Répondre | Répondre avec citation |
L’égalité hommes-femmes en deux ans : un mensonge
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