Début mai, les journaux se faisaient l’écho d’une offre d’emploi diffusée par l’ANPE et proposant un poste à Pondichéry, en Inde, rémunéré entre 160 et 320 € par mois. C’était tentant, mais Le Plan B a trouvé mieux : un contrat à durée déterminée d’une heure et quarante-cinq minutes hebdomadaires à Fort-de-France, en Martinique, délivré par l’ANPE de… Toulouse.
Objet de la mission ? Distribuer des prospectus pour un salaire hebdomadaire net total de 13 €. Mise en ligne pendant un mois, cette annonce N°186862W n’a, curieusement, jamais trouvé preneur. Elle offrait pourtant l’occasion aux demandeurs d’emploi d’acquérir une «expérience d’expatriation», comme l’avait expliqué Christian Charpy, le patron de l’ANPE, au sujet du recrutement à Pondichéry. Après tout, il suffisait de sauter dans un avion, de mener rondement son affaire puis, fortune faite, de rentrer fièrement au pays en prévision de la prochaine convocation à l’ANPE. Mais les chômeurs n’ont pas l’esprit conquérant. D’où la nécessité de les punir s’ils refusent deux offres consécutives, ainsi que le prévoit la nouvelle «réforme» de l’assurance-chômage.
Contacté par Le Plan B, un cadre de l’agence toulousaine explique : «Nous proposons actuellement à peu près 20% d’annonces aussi bidon que celle de Fort-de-France. L’objectif est de regonfler les chiffres du marché de l’offre d’emploi en Haute-Garonne. Car, tout comme pour les expulsions de sans-papiers, nous devons nous aussi faire du chiffre».
Du coup, les opportunités de carrière se multiplient. Le 3 juin, L’Humanité citait le cas d’un ancien employé d’assurance auquel l’ANPE de Villeneuve-lès-Maguelone, près de Montpellier, proposait un emploi d’une heure par semaine à Sartène, en Corse, pour un magot mensuel de 36 €. «On nous demande de plus en plus de valider des offres d’emploi qui défient le droit du travail ou même le simple bon sens», précise au Plan B Sylvie Combes, une conseillère syndiquée CGT de l’ANPE d’Arles. «Tout récemment, j’ai refusé une annonce pour un CDD saisonnier parfaitement illégal qui ne prévoyait aucune prime de précarité. Mais mon chef d’équipe a validé l’offre. Tout est bon pour canaliser les chômeurs vers les secteurs en tension définis par la direction : les boulots les plus durs et les plus mal payés.»
Essorée, Sylvie Combes compte démissionner de l’ANPE cet été après quinze ans de service. Ça tombe bien : il reste sûrement quelques prospectus à distribuer aux Antilles...
(Source : Le Plan B)
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