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Accueil Mobilisations, luttes et solidarités «La peur du chômage déséquilibre la négociation sur les salaires»

«La peur du chômage déséquilibre la négociation sur les salaires»

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Les 35 heures sont-elles responsables de la baisse du pouvoir d’achat ? Alors que l'Assemblée nationale entamera mardi l'examen du projet de loi sur la réforme du temps de travail, Pierre Larrouturou, économiste et délégué national Europe au Parti socialiste, répond à Libération.

Le projet de loi portant sur la «rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail» doit être examiné à partir de demain par l’Assemblée nationale. Fervent défenseur de la réduction du temps de travail (RTT), Pierre Larrouturou revient sur cette énième tentative de la droite destinée à «détricoter» les 35 heures.

La droite veut «libérer» le travail en remettant en cause ce qu’elle appelle le «carcan» des 35 heures. La législation est-elle si rigide ?
La durée moyenne de travail des salariés à temps plein en France est encore de 39,2 heures par semaine. Ce qui signifie que non seulement il n’y a pas de carcan, mais qu’en plus, nombre de salariés (40% selon la CFDT) n’ont jamais goûté aux 35 heures, essentiellement dans les entreprises de moins de 20 salariés. Ces dernières sont restées à 38 ou 39 heures, et l’application de la loi s’est faite par la transformation en heures supplémentaires des heures au-dessus de 35 heures. Une des conséquences de la deuxième loi Aubry, dite «balai», qui n’exigeait plus aucune création d’emplois en échange des réductions de cotisations sociales. De plus, cette loi a autorisé l’exclusion des temps de pause du calcul du temps de travail, amoindrissant d’autant la baisse effective de la durée du travail.

Pourquoi alors cet acharnement de la droite à vouloir remettre en cause les 35 heures ?
C’est en effet la septième fois en six ans que la droite légifère sur la durée du travail. Pour la majorité et le Medef, la dérégulation du temps de travail relève d’une vraie stratégie avec, comme modèle, le système américain d’un marché «totalement libre». Mais ce que la droite ne dit pas, c’est qu’aux Etats-Unis, la durée moyenne de travail de l’ensemble de la population active, temps partiels compris, est de 33,7 heures contre 36,2 heures en France. Car outre-Atlantique, d’innombrables petits boulots se sont développés. Cette précarité crée une pression sur les salariés à temps plein, et donc sur le niveau des salaires. En France, l’objectif du gouvernement n’est pas tant d’augmenter le temps de travail que de renforcer, par cette précarité, un rapport de force en faveur du patronat dans les négociations salariales. Avec ce système, aux Etats-unis, la part du PIB destinée aux salaires est retombée au niveau de 1929.

La RTT est pourtant un mouvement naturel des sociétés développées…
Il n’a jamais été «naturel». Il y a toujours eu un conflit pour savoir si la productivité profitait aux actionnaires ou aux salariés. Il n’empêche, la réduction du temps de travail est un mouvement général dont on peut constater la réalité dans l’ensemble des pays développés. Tous les pays qui ont un faible taux de chômage sont ceux où la durée effective du travail, temps partiels compris, est la plus faible. Elle est ainsi de 29,9 heures aux Pays-Bas, de 32 heures en Angleterre… et encore de 36,2 heures en France. La question n’est donc pas de savoir si on est pour ou contre la RTT, mais de choisir entre une organisation négociée et une mise en place sauvage, c’est-à-dire par la précarité, avec certains salariés qui travaillent beaucoup, et une grande partie des autres à temps partiel. Aujourd’hui déjà, en France, les créations d’emplois sont souvent de faible durée (12 ou 15 heures par semaine). Ne vaudrait-il pas mieux augmenter le temps de travail de ceux qui sont à temps partiel plutôt que de faire faire des heures supplémentaires à ceux qui sont déjà à temps plein ?

La droite rend en partie responsable les 35 heures de la baisse du pouvoir d’achat…
En France, la part des salaires dans le PIB a baissé de 11% en vingt-cinq ans. Si l’on reprenait la répartition capital-travail d’il y a un quart de siècle, 200 milliards d’euros supplémentaires devraient aller aux salariés cette année, au détriment des actionnaires. Le mouvement est le même au Japon, en Allemagne, et dans l’ensemble des pays occidentaux. L’explication par les 35 heures ne tient donc pas la route. Dans tous les pays, c’est plutôt la peur du chômage qui déséquilibre la négociation sur les salaires. A cet effet, la gauche devrait avoir comme objectif de lutter contre le chômage, ce qui passe par la poursuite d’une forte réduction du temps de travail.

Une RTT que vous préconisez notamment par la semaine de quatre jours…
La mesure qui peut créer plus d’un million et demi d’emplois, c’est la semaine de quatre jours. Plus de 400 entreprises y sont déjà passées dans des secteurs aussi différents qu’une auto-école, un fabricant de logiciels, une menuiserie, ou encore Mamie Nova. La réduction sous forme de jours est plus créatrice d’emplois, car un salarié absent une journée entière doit être remplacé. A l’inverse, une réduction de deux ou trois heures par semaine peut être compensée par des gains de productivité, sans création d’emploi.

A quelques mois du congrès du PS, la gauche semble avoir la RTT honteuse…
Le silence de la gauche face aux attaques du gouvernement sur les 35 heures est inquiétant. Au PS, plus personne ou presque ne veut en parler. On reste sur un statu quo. On n’assume pas. C’est dommage, car la question du temps de travail est au cœur du débat sur la répartition des richesses. Pour réveiller nos responsables, nous allons cette semaine déposer une contribution qui portera, entre autres, sur le temps de travail, pour les inciter à construire un vrai projet.

(Source : Libération)

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Mis à jour ( Vendredi, 07 Janvier 2011 17:03 )  

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