Il y a quelques mois, nous avions dû intervenir pour une radiation liée à une prestation qu’un allocataire avait rompue d’un commun accord avec l’organisme prestataire «Dynamique Psycho» (voir le premier chapitre de la thérapie).
Toutefois, l’ANPE a de la suite dans les idées et n’arrête pas une thérapie comme ça.
Quelques mois à peine après avoir été rétabli dans ses droits, Monsieur A. fait valoir un projet à l’ANPE. Il a le malheur de penser trouver auprès de son référent un minimum d’aide concernant la recherche d’une formation et le financement de celle-ci. Au lieu de cela, l’ANPE lui impose les services d’un autre prestataire au nom évocateur qui n’est pas sans rappeler quelque chose : «Psycho Forme»...
Ce suivi de 6 mois a pour but de vérifier la validité du projet de Monsieur A. Le métier qu’il souhaite exercer ne rentre dans aucun secteur défini par un code ROME (le Répertoire Opérationnel des Métiers et des Emplois de l'ANPE), ce qui est en soi un symptôme d’inadaptation sociale possiblement révélateur d’une psychose grave et répandue chez les chômeurs : le projet autonome de recherche d’emploi.
Il est dirigé bon gré mal gré vers l’ANPE Saint Georges (commerce), à Paris, ou la formation des agents ne correspond en aucune façon à ses besoins et à ses attentes. Cette agence, plutôt que de faire confiance à son projet, décide de lui faire perdre à nouveau six mois afin de faire vérifier par un prestataire privé, au coût probablement plus élevé que la formation demandée et aux compétences certainement aussi limitées que l’ANPE concernant le domaine de Monsieur A, si le projet est valide ou non.
L’allocataire connaît parfaitement le métier pour l’avoir exercé pendant plusieurs années mais, pour une raison inconnue, l’ANPE préfère que des sommes d’argent soit dépensées à la simple validation d’un projet par une association privée plutôt que de lui faire confiance.
Pour vérifier s’il s’agit du même genre de prestation que celle qu’il avait quittée précédemment, il se rend au rendez-vous. Au programme : atelier CV et autres ateliers de remobilisation, tout ceci assuré par une équipe dont les membres ont pour beaucoup une formation de psychologue. C’est-à-dire grosso modo le même programme que celui proposé par «Dynamique Psycho».
Il refuse le jour même la prestation.
Ce qui est perçu par l’allocataire comme une perte de temps concernant son projet, un frein à ses recherches de financement et de la formation appropriée est jugé, du point de vue de l’ANPE, comme un refus de prestation et une insuffisance de recherche d’emploi. Immédiatement, elle déclenche la procédure de radiation.
Nous sommes de nouveau contraints de nous rendre à la direction déléguée de l’ANPE à Paris. On nous sort un vaste blabla dormitif au possible avec, au bout, la promesse d’un rendez-vous avec le directeur de l’agence afin de faire valoir la contestation de Monsieur A. Rendez-vous présenté comme un droit pour tous les allocataires (et effectivement, sur le papier, c’est un droit).
Cela dit, le secrétaire général de l’ANPE-Paris, comme le directeur délégué, sont bien d’accord sur un point : effectivement, si les formations réelles étaient financées selon les besoins des demandeurs, ces prestations "psychologiques" n’auraient pas lieu d’être. Et, bien évidemment, elles ne sont jamais proposées aux demandeurs d’emploi qui acceptent un job dans les secteurs en tension.
En bref, pas besoin de bilan de compétences, tout le monde peut se reconvertir en maçon ou en cuistot, par contre quelqu’un qui veut simplement continuer à bosser dans son secteur est, lui, immédiatement suspecté d’avoir un projet "irréaliste".
Au bout d’une semaine, aucune nouvelle et aucun rendez-vous n’est donné à Monsieur A. Il reste alors peu de jours avant que la radiation ne soit effective. C’est donc directement à l’agence Saint Georges que nous irons collectivement prendre ce droit.
Devant le nombre, nous sommes reçus rapidement par le directeur adjoint. Là, pour une fois, il semblerait que l’on remarque les dysfonctionnements dans le dossier de Monsieur A. C’est seulement collectivement que nous arrivons enfin à faire valoir la spécificité de son métier et ses demandes, et à faire annuler la radiation en cours.
De là à supposer que l’ANPE estime que ne pas exercer un métier qualifié par un code ROME est le signe d’un dérangement mental de l’usager, il y a un pas que nous ne franchirons pas. A condition, bien sûr, qu’on ne lui propose pas un troisième stage Psycho-bidon de 6 mois dans quelques semaines… et toujours aucune offre d’emploi dans son secteur.
Avis aux usagers de l’ANPE Saint Georges : le directeur adjoint nous a affirmé que son bureau était "toujours ouvert" aux demandeurs d’emploi. Pour y accéder, prendre le couloir à gauche dans l’entrée, première porte sur le mur de droite !
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