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L'Agirc (cadres) et l'Arrco (non-cadres) sont des régimes de retraite complémentaire obligatoires qui complètent le régime de base des salariés du secteur privé, dont le revenu de remplacement demeure inférieur à 50% du salaire [1]. Ces deux caisses, qui ne sont pas encore déficitaires, fonctionnent sur le mode de la répartition et de la gestion paritaire.
Contrairement au régime général, et en raison de l'opposition forcenée du patronat [2], le droit à la retraite à 60 ans n'a jamais été reconnu comme tel pour les régimes complémentaires où l'âge d'ouverture des droits est demeuré à 65 ans. Pour y pallier, en 1983, fut créé un fonds spécifique : l'ASF, devenu ensuite AGFF (Association pour la gestion des fonds de financement, qui associe le financement de l'Agirc et de l'Arrco), alimenté par une cotisation qui permet, par dérogation, aux salariés affiliés de liquider leur retraite entre 60 et 65 ans sans abattement.
Cependant, ce mécanisme doit être validé périodiquement dans le cadre de négociations interprofessionnelles. L'actuel accord AGFF, qui devait être renégocié avant le 31 décembre décembre 2008, a été prorogé jusqu'en avril 2009 pour des raisons techniques. Mais depuis l'annonce de la possibilité de laisser travailler les seniors jusqu'à 70 ans, on peut s'attendre à ce que le dispositif ne soit plus reconduit...
Si l'AGFF est supprimée, dès le 1er mai 2009, les prétendants à la retraite de moins de 65 ans pourraient se voir appliquer une décote pouvant aller jusqu'à 22% du montant de la pension complémentaire. Pour bénéficier d'une complémentaire retraite sans abattement, des milliers de futurs retraités seront ainsi obligés de trimer jusqu'à 65 balais.
La menace est sérieuse : le Medef, qui fulmine de ne pas avoir obtenu du gouvernement le recul de l'âge légal de la retraite à 62 ou 63 ans, a annoncé qu'il se saisira des négociations Agirc-Arrco pour remettre sa revendication sur le tapis. Jean-René Buisson, le président de sa commission "protection sociale", a aussi déclaré : «On peut très bien ne pas maintenir l'AGFF», dont la cotisation est tant salariale que patronale et la suppression ferait bien l'affaire d'un patronat qui ne cesse de réclamer moins de "charges", tandis que la baisse scélérate des cotisations chômage reste en suspens.
Chaque fois que le patronat a voulu s'attaquer au non-renouvellement de l'AGFF (car ce n'est pas la première fois qu'il la remet en cause), il a été confronté à des répliques grévistes importantes. Fin janvier, si celui-ci persiste, il s'expose à de nouvelles mobilisations. D'autant plus que le montant des pensions, la question de la valeur du point et le niveau du taux de remplacement sont les autres enjeux, au cœur de la négociation.
[1] Actuellement, la retraite complémentaire représente 33% du montant total de la pension d'un salarié non-cadre et 66% de celle d'un cadre.
[2] En effet, souvenez-vous : c'est en 1982 que l'âge légal de la retraite fut rabaissé de 65 à 60 ans par la gauche au pouvoir. Devenue nécessaire, l'ASF a été créée l'année suivante afin de ne pas pénaliser les salariés et surtout les cadres qui souhaitaient partir dès 60 ans. Mais ce système, resté "à part", s'est transformé en faille : bien que l'intégration de l'AGFF dans les cotisations retraites du régime général soit une évidence, elle fait l'objet depuis vingt ans des obstructions répétées du patronat.
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Commentaires
• Retraite, protection sociale : un marché de dupe et une spoliation en règle
• Crise économique : notre protection sociale est en danger ! Répondre | Répondre avec citation |
Des retraités manifestent devant la préfecture
Une cinquantaine de personnes, à l'appel de l'ensemble des syndicats de retraités, se sont rassemblées hier à 10 h 30 devant la préfecture de Côte-d'Or, à Dijon.
Une délégation a été aussitôt reçue par Christiane Chavanelle, représentant le préfet. Les « revendications prioritaires », annoncées en préambule de la manifestation, sont les suivantes : « l'augmentation immédiate des pensions, l'accès aux soins et à la santé et l'amélioration de la prise en charge de la perte d'autonomie ».
Une fois sorti, Jean Belin, au nom de toutes les organisations syndicales, a lu la motion rédigée par celles-ci. Le report par le gouvernement de la prochaine revalorisation des pensions du 1er janvier au 1er avril a été qualifié de « provocation que les retraités se refusent à avaler ».
Parmi les revendications de la motion figurent notamment « un minimum de pension au niveau du SMIC revalorisé » et « le versement d'une prime exceptionnelle de 300 € à tous les retraités ».
Avant de se séparer, les manifestants se sont donné rendez-vous le 29 janvier, jour où les organisations syndicales appellent à la grève générale au niveau national.
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Les syndicats avaient mis en garde contre une éventuelle non-reconduction de l'AGFF, une structure finançant la retraite complémentaire de 60 à 65 ans des assurés de l'Agirc et de l'Arrco. "Quelles que soient les décisions que nous pourrions être amenés à prendre, ce sont des décisions que nous prendrions sur le moyen ou le long terme", a déclaré le chef de file de la délégation patronale Jean-René Buisson. "Les gens qui partiraient demain ou en avril en retraite, ou bien l'année prochaine, n'auraient aucune incidence ou très faible sur leur pension de retraite", a-t-il ajouté, estimant que les organisations syndicales avaient "dramatisé ce sujet".
Mais le patronat, déçu que le gouvernement n'ait pas reculé l'âge légal de la retraite en 2008, n'en a pas abandonné pour autant son projet de proposer de reculer l'âge à partir duquel l'AGFF entre en jeu, "à raison par exemple d'un trimestre par an à partir de 2010".
"On est un peu rassurés (…) mais le fait qu'on va se retrouver en négociation pendant deux mois va laisser planer un doute sur la pérennité de l'AGFF", a toutefois estimé Bernard Devy (FO).
Déficit en vue
Patronat et syndicats ont par ailleurs partagé la même inquiétude face à de nouvelles projections sur la situation financière des deux régimes de retraites complémentaires (Agirc et Arrco), intégrant les effets de la crise économique. Selon ces projections, ces deux régimes seront globalement en déficit dès 2009, soit cinq ans plus tôt que prévu.
Les partenaires sociaux, qui gèrent paritairement l'Agirc (cadres) et l'Arrco (salariés), devront trouver des mesures pour faire face à cette situation lors de quatre séances de négociations programmées les 9 et 17 février, et les 12 et 23 mars.
"On a tous été très surpris de l'impact économique de la crise", a déclaré Bernard Devy, à l'instar des autres syndicalistes et du patronat face aux nouvelles projections qui avancent de cinq ans, à 2009, l'entrée en déficit global des régimes (en cumulant leurs résultats).
L'Agirc sera en déficit technique de 720 millions d'euros en 2009, malgré des transferts financiers en provenance notamment de l'AGFF. En 2020, son déficit atteindrait 2,5 milliards d'euros. Quant à l'Arrco, il sera déficitaire à partir de 2010, de 620 millions d'euros, et son déficit atteindrait 5,1 milliards en 2020.
Face à ses perspectives, le Medef veut essentiellement jouer sur l'âge de la retraite, mais les syndicats ont avancé plusieurs autres propositions, comme l'élargissement de l'assiette des cotisations (CGT) ou le montant ou la durée des cotisations (CFE-CGC).
(Source : Le Monde) Répondre | Répondre avec citation |